Se prémunir contre les mauvais coups quand on part en vacances est un art difficile, car deux dangers contraires guettent le consommateur. D’un côté, les mailles du filet des assurances obligatoires sont lâches et laissent des trous qu’il est important de combler. De l’autre, les prestations des divers acteurs du marché sont si enchevêtrées qu’il est difficile de ne pas s’assurer à double. Et donc de payer pour rien, car un même sinistre ne sera jamais remboursé deux fois. Pour y voir plus clair, suivons les aventures de Monsieur et Madame Tartempion, qui partent en voyage au Japon durant deux semaines en compagnie de leur fils de 10 ans et d’un de ses amis.
1. Les valises sont prêtes, mais le téléphone sonne…
La veille du départ, mémé Tartempion est hospitalisée. Son état est suffisamment sérieux pour que la famille renonce à ses vacances.
Sous-assurance Budget séré oblige, les Tartempion ont organisé leur voyage eux-mêmes et opté pour les offres les moins chères: billets non modifiables ni remboursables, hôtel réservé sur booking.com sans possibilité d’annulation et excursions résiliables au plus tard 48 heures à l’avance. Le tout a été réglé avec une carte de crédit à prépaiement et aucune assurance voyage n’a été conclue. Là, il n’y a aucun remboursement à espérer.
Surassurance Monsieur Tartempion est membre du TCS depuis longtemps et renouvelle chaque année son livret ETI valable à l’étranger pour toute la famille. Il paie toutes les réservations du voyage avec sa carte VISA de la Banque cantonale de Genève. Au moment d’acheter les billets d’avion, il se laisse tenter par l’assurance annulation proposée par le site internet sur lequel il passe commande. Cette fois, la famille est assurée à triple: tant le livret ETI que l’assurance annulation conclue avec le billet d’avion et celle liée à la carte VISA utilisée pour le paiement rembourseront le voyage, jusqu’à hauteur d’une somme qui varie (lire encadré).
2. Angoisse au carrousel à bagages
Groupée autour du tapis tournant, notre famille constate avec effroi que l’installation s’arrête sans avoir livré une de leurs valises. La nouvelle tombe elle est définitivement perdue.
Surassurance A priori, toute assurance est inutile ici, car les compagnies aériennes sont tenues de réparer le dommage dans tous les cas (lire page 22). Une somme forfaitaire est parfois allouée au passager lésé; pourtant, selon la Convention de Montréal, elles doivent rembourser non seulement la valeur exacte de la valise et des objets qu’elle contenait, mais aussi assumer les éventuels dommages consécutifs causés par la perte. Attention: le plafond est fixé à 1500 fr. environ, et il faut fournir des justificatifs pour quantifier les dégâts. Dès lors, les assurances bagages peuvent s’avérer utiles pour les contenus dont la valeur dépasse 1500 fr. De plus, elles offrent souvent des prestations supplémentaires, notamment contre le vol. Avant d’en souscrire une, vérifiez tout de même que vous n’avez pas déjà cette couverture intégrée dans votre assurance ménage.
3. Les dangers de la route
Subjugué par la contemplation des cerisiers en fleur, Monsieur Tartempion traverse la rue sans penser à regarder sur sa droite. Une voiture le heurte.
Sous-assurance On commence par une bonne nouvelle: comme il s’agit d’un accident, les frais de transfert à l’hôpital sont couverts par l’assurance accidents obligatoire. Mais à une condition: qu’ils n’excèdent pas 29 640 fr., ce qui est insuffisant si le blessé doit être rapatrié en Suisse dans un avion médicalisé particulier. Plus grave, hors de l’Europe, les frais médicaux ne sont remboursés que jusqu’à concurrence du double du prix forfaitaire qui serait appliqué en Suisse pour une pathologie identique. Etonnamment, dans certains pays, dont le Japon, c’est insuffisant. Conclusion: une couverture totale des soins à l’étranger est chaudement recommandée (lire encadré).
Surassurance Quelques jours avant le grand départ, notre famille décide de conclure une assurance voyage «tout compris», car elle sait que, cas de pépin à l’étranger, certains frais médicaux risquent de ne pas être entièrement remboursés. Une précaution sage, mais inutile: grâce à sa petite complémentaire maladie «Top», elle était, en fait, déjà couverte entièrement à l’étranger!
4. Malaise au Mont Fuji
En pleine ascension de la plus haute montagne du Japon, Madame Tartempion fait un malaise cardiaque. Elle est héliportée d’urgence vers l’hôpital le plus proche.
Sous-assurance Sans autre couverture que l’assurance maladie de base, c’est la catastrophe: étant donné qu’une crise cardiaque est considérée comme une maladie et non un accident, les frais de transport sont limités à 500 fr., soit bien trop peu pour payer le sauvetage et l’héliportage. Sur place, les médecins décident de soumettre la malheureuse à une batterie de tests. Pas de chance, aucun d’entre eux n’est prévu, en Suisse, en cas de problème cardiaque similaire. Ils ne seront donc pas remboursés par l’assurance maladie de base. Dans le pire des cas, la facture pourrait atteindre plusieurs dizaines de milliers de francs…
Surassurance Les risques sont les mêmes que pour l’accident: une complémentaire maladie ou alors le produit d’une association de transport (avec le supplément adéquat pour les frais médicaux), couvrent déjà les soins à l’étranger. Dans ce cas, il est inutile de souscrire une assurance voyage ponctuelle ou annuelle. Autre aspect à garder à l’esprit: en Europe, les soins sont couverts par l’assurance de base, sauf dans de rares établissements.
5. Le smartphone se fait la malle
Lorsque, pour la 35e fois de la journée, Tartempion junior glisse sa main dans sa poche arrière pour prendre son téléphone, il constate qu’il n’y est plus. Est-il tombé ou a-t-il été subtilisé? Mystère.
Sous-assuranceContrairement à la majorité des Suisses, notre famille n’avait pas opté, au moment de conclure son assurance ménage, pour le supplément «vol simple à l’extérieur». Ici, ni leur complémentaire maladie ni l’assurance annulation de leur carte de crédit ne les aidera. Les 900 fr. dépensés pour le smartphone flambant neuf sont perdus…
Surassurance L’option vol simple à l’extérieur est un grand classique de l’assurance ménage, pour un prix qui varie de 2 à 10 fr. par mois environ. Dans ce cas, la couverture vol/perte pour les bagages et les effets personnels proposée – obligatoirement ou en option – par la plupart des assurances voyages est inutile, sauf si la somme couverte est plus haute ou la franchise plus basse. De plus, si le vol a eu lieu dans votre voiture après effraction, il est également possible que la casco couvre le dommage.
Vincent Cherpillod
Pratique
Couvert mais pas trop: le pas à pas
Maladie et accident
Le risque à couvrir en priorité est celui des frais médicaux dans les pays extra-européens. Vérifiez impérativement les éléments suivants.
1)Suis-je couvert par mon assurance maladie? Avec la base, ce n’est jamais le cas. En revanche, certaines «petites» complémentaires incluent les soins à l’étranger. C’est souvent le cas de celles qui couvrent les médecines alternatives et autres soins préventifs. En la matière, les caisses Helsana, Visana, CPT, Assura, CSS et Swica offrent les meilleures prestations. Assura est l’une des rares à proposer à ses assurés un produit spécifique pour l’étranger (Mondia), dès 5 fr. par mois.
2) A défaut, suis-je couvert par une assurance liée à une association de transport (TCS, ACS, ATE)? Si oui, vérifiez que votre police est bien mondiale et non européenne et comporte les soins à l'étranger. Attention aussi aux produits destinés à l’ensemble du ménage: le plus souvent, seuls les personnes domiciliées au sein du foyer sont couvertes. Dans notre exemple, il faudra envisager une assurance spécifique pour l’ami du fils Tartempion.
3)En cas de réponse négative aux deux questions précédentes, il faut conclure une assurance de soins à l’étranger. Elle peut être ponctuelle ou annuelle – cette dernière option étant recommandée dès deux voyages par an. Pour une personne seule qui part deux semaines, on trouve l’offre la moins chère chez Atupri (22 fr.); pour une famille, chez CPT (50 fr.).
La majorité des assurances qui couvrent les soins à l’étranger remboursent aussi les frais de sauvetage et de rapatriement, mais pas toutes. Si ces prestations ne sont pas intégralement prises en charge, être membre de la REGA peut s’avérer utile. Attention toutefois, cette organisation n’est pas une assurance à proprement parler et n’a pas d’obligation légale envers ses membres.
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Annulation
Une telle couverture n’est pas toujours utile, car le remboursement des vacances en cas d’imprévu de dernière minute est déjà proposé dans les cas suivants.
⇨ Les prestations ont été payées avec une carte de crédit émise par Viseca (Banques cantonales, Banque Migros et Raiffeisen notamment). En cas d’annulation et sous certaines conditions, jusqu’à 10 000 fr. sont remboursés.
⇨ Les assurances des associations de transport comportent souvent un volet «annulation». Celui du Livret ETI est généreux, puisqu’il rembourse jusqu’à 120 000 fr.
⇨ Plusieurs des produits qui couvrent les frais médicaux à l’étranger (complémentaires maladie ou assurances voyages) englobent un volet «annulation». Il est même parfois impossible de dégrouper les deux prestations.
⇨ Si vous n’avez ni couverture pour les soins à l’étranger ni pour l’annulation, les «packs» voyage des grands groupes d’assurances peuvent devenir intéressants. Comparez les prix en ligne, en incluant ceux des offres proposées au moment de la réservation d’un billet d’avion (il s’agit souvent des mêmes produits).
⇨ Vous pouvez aussi renoncer à conclure une assurance annulation et payer un peu plus cher pour obtenir des billets d’avion modifiables ou remboursables, ou encore réserver des hôtels avec annulation gratuite jusqu’à la veille de l’arrivée. Les grandes plateformes de réservation en ligne proposent souvent ce service pour quelques francs supplémentaires. Vous pouvez aussi négocier cette option en réservant votre chambre par téléphone.
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