Les applications qui enregistrent chaque pas, ce n’est pas nouveau. Mais une caisse maladie qui exploite ces données par le biais de l’assurance de base, ça dépasse les bornes. Le Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence (PFPDT) a obtenu gain de cause au Tribunal administratif fédéral (TAF) au sujet de l’application Helsana+.
Ce programme octroie des points aux assurés qui prouvent vivre sainement en envoyant des photos de leur assiette ou le détail des kilomètres parcourus. Si le pouls, les calories ou les données GPS ne sont pas enregistrés, les données sur l’utilisation de l’application (photos et connexions au tracker pour l’obtention des points) sont stockées pendant trois ans à des fins de marketing ciblé.
Helsana précise que ces informations justifient les rabais sur les primes et les autres prestations en espèces. Elles en disent long sur l’assuré: impossible d’accumuler des points en mangeant des chips devant le téléviseur! Il s’expose ainsi à recevoir de la publicité ciblée dans sa boîte aux lettres, mais aussi par téléphone, mail ou SMS, ainsi que des promotions personnalisées sur le moteur de recherche Google ou les réseaux sociaux. On peut, certes, supprimer son compte, mais l’assureur conservera pendant trois ans toutes les preuves utiles pour accumuler les points.
La méthode est illégale
Le TAF a estimé que ce procédé est illicite: le consentement des assurés n’est pas valable, puisqu’ils ne savent pas comment leurs données seront exploitées. «Quand on télécharge l’application Helsana+, on devrait comprendre quelles informations on communique et dans quel but», explique Hugo Wyler, porte-parole du PFPDT, qui estime la perméabilité entre l’assurance de base et les complémentaires injustifiable.
L’assureur a, depuis la publication du jugement, modifié la procédure d’enregistrement pour les assurés de base. «Helsana ne voit dès lors pas la nécessité de modifier ses conditions d’utilisation et sa politique de confidentialité», explique le porte-parole Gaël Saillen en renvoyant à une vidéo explicative en ligne. Celle-ci ne totalise toutefois que 47 vues, alors que l’application a été téléchargée des dizaines de milliers de fois. De son côté, le PFPDT ne lâche pas son os: «Nous attendons de Helsana qu’elle remédie à ces lacunes», maintient Hugo Wyler.
Helsana n’est pas la seule à proposer un coach en ligne, mais les autres assureurs ne franchissent pas la ligne rouge. Le programme de la CSS My Step ne concerne ainsi que les complémentaires. Quant au Groupe Mutuel, il propose à ses assurés une application sans se préoccuper de leurs performances.
Claire Houriet Rime