C’est l’une des pépites du Valais. Un cépage enraciné dans son terroir pour des vins de stature internationale. La petite arvine, c’est une complexité aromatique ainsi que cette finale saline qui lui donnent cette signature insolite, si unique. Délicate et sensible comme une diva, elle est exigeante à travailler, mais accepte d’être déclinée en nectars aussi bien secs et tendus que tendres et mœlleux.
Elle est partout!
Encore confidentielle au début des années 2000, la production a progressé de manière spectaculaire en l’espace de deux décennies (lire encadré). Ce qui était alors impensable est devenu normalité: la petite arvine est diffusée dans toutes les enseignes de la grande distribution. De Lidl à Denner, en passant par Coop et Aldi, elle est partout. C’est ce que nous avons constaté en sélectionnant des crus 2018 vendus à moins de 20 fr.
Cette diversité ne laisse pas moins le consommateur dans un épais brouillard. Vin sec? Vin légèrement moelleux? Vin surmaturé? Aucune étiquette ne donne une indication précise sur le type de blanc dont il s’agit. Cette lacune, qui affecte d’autres blancs comme le pinot gris, est très agaçante. La parade n’est pourtant pas sorcière pour informer l’acheteur de la teneur en sucre résiduel. Les vignerons-encaveurs de Vétroz l’ont très bien compris pour l’amigne avec une indication sur l’étiquette subtile et efficace (système des abeilles).
Pas de grand écart
A l’entame de notre dégustation à l’aveugle, l’interrogation était donc de mise: l’exercice allait-il tourner au grand écart en raison de la sucrosité hétéroclite des douze bouteilles? Fort heureusement pas. On n’ira pas jusqu’à parler d’uniformité, mais la majorité des vins étaient plutôt secs, même si certains exhalaient un caractère plus tendre et flatteur que d’autres. Quoi qu’il en soit, la qualité de ces produits de grande distribution n’a pas déçu. Vinifiée en exclusivité pour Coop par Bonvin et Varone (Sion), la Petite Arvine de la gamme Bibacchus a été la plus appréciée de toutes. «C’est un vin au nez expressif avec des notes typique d’agrumes et une touche iodée. En bouche, on retrouve un bel équilibre et une structure bien faite», détaille Richard Pfister.
Petits prix sans complexe
La bonne surprise est venue des deux bouteilles les moins chères du lot (11.95 fr.) qui grimpent sur le podium. La première, vendue chez Aldi, n’avait certes pas l’élégance de la gagnante, mais son équilibre général et sa franchise ont fait mouche: «J’ai bien aimé ce vin sec qui représente bien le cépage. La bouche est assez opulente avec une pointe de gras et une finale iodée très agréables», note Claire Mallet.
La troisième place est revenue à la petite arvine vendue chez Lidl. Un produit qui, disons le tout de go, a un plumage aussi sexy qu’un extincteur. Entre son étiquette surannée et son bouchon à vis, ce flacon-là n’a pas grand-chose pour lui. Dommage qu’il ne mette pas mieux en valeur un vin vif, racé et plaisant.
Yves-Noël Grin
Un envol récent
Les recherches ont attesté que la petite arvine est un cépage indigène valaisan. Si des traces de son existence remontent au tout début du XVIIe siècle, sa vraie renaissance date de la fin du siècle dernier. En Suisse, l’essor de la petite arvine a été très marqué au cours des deux dernières décennies, avec une surface qui a bondi de 56 hectares (ha) en 1998 à 218 ha en 2018! Si d’autres cantons comme Genève, Neuchâtel ou Vaud en cultivent un peu, c’est bien le Valais qui se taille la part du lion (99,6%).
A l’étranger, plusieurs viticulteurs – notamment en France et en Italie – ont tenté d’introduire la petite arvine dans leur vignoble. Ce n’est que dans la vallée d’Aoste que le phénomène s’est inscrit durablement. En l’espace d’un demi-siècle, l’encépagement a progressé pour dépasser désormais 17 ha. De quoi placer la production valdôtaine au deuxième rang derrière le Valais.