Parler de retraite quinze ans avant de raccrocher son tablier, n’est-ce pas un peu tôt? «L’âge de 51 ans est l’âge charnière à partir duquel la perspective des rentes de vieillesse commence à jouer un rôle dans la souscription d’un prêt hypothécaire», explique Jean-Pascal Baechler, conseiller économique à la BCV. Ce calendrier est justifié par les conditions à remplir pour obtenir le feu vert de la banque. Credit Suisse passe le dossier au crible à 60 ans seulement, mais toutes les banques invitent à anticiper les éventuels problèmes.
Le tiers du revenu
Le total des charges (5% pour les intérêts hypothécaires, 1% pour l’amortissement et entre 0,7% et 1% pour l’entretien, voire davantage pour les constructions anciennes) ne doit pas dépasser 33% du revenu brut. «Les retraités disposent d’un revenu net, sans déductions sociales, qui n’est pas directement comparable», relève Maxim Wuersch, porte-parole de Raiffeisen. La banque pousse ainsi le curseur à 38%.
«Nous tenons également compte de la situation financière globale du propriétaire pour apprécier son cas», relève Jean-Raphaël Fontannaz, porte-parole d’UBS. En revanche, les institutions, sauf exceptions justifiables, ne font guère preuve de souplesse sur le calcul des charges. Le taux hypothécaire théorique de 5% n’a ainsi jamais été revu à la baisse alors qu’il est largement supérieur à ceux du marché. «Ce taux est considéré comme un standard durable. Il est soumis à la surveillance de la Finma qui veut s’assurer que les propriétaires soient en mesure de payer les intérêts sans être «pris à la gorge» et ce, même en cas de hausse comme c’est le cas actuellement. Les autorités de surveillance surveillent très étroitement toute modification», explique Jean-Paul Darbellay, porte-parole de Credit Suisse. La Finma n’a du reste pas apprécié les tentatives de revoir ce taux à la baisse. «Cette marge protège aussi le client. De son côté, la banque n’a aucun intérêt à devoir mettre un bien en vente forcée», renchérit Jean-Raphaël Fontannaz.
Amortir le tiers du bien
Le crédit hypothécaire se divise entre le premier rang, qui correspond aux 65% de la valeur du bien, et le second, qui équivaut à 15%. Ce dernier doit être amorti chaque année à hauteur de 1%, en quinze ans. Comme le revenu baisse drastiquement à la retraite, les banques exigent de rembourser l’hypothèque de 2e rang pour passer le cap, d’où l’attention particulière portée aux quinquagénaires.
«Si le bien a pris de la valeur au fil du temps, ce facteur entrera aussi en compte dans le calcul», relève Jean-Raphaël Fontannaz. Un crédit de 560 000 fr. pour un immeuble valant 700 000 fr. en 1990 peut ainsi représenter moins de la moitié de sa valeur sur le marché, aujourd’hui. UBS fait preuve de pragmatisme: si les intérêts sont payés régulièrement, la banque sera plus encline à trouver une solution pour renouveler le contrat. «De façon générale, il faut toujours mettre la situation à plat, sur la table. Chaque cas sera examiné individuellement pour trouver des solutions», commente Jean-Paul Darbellay.
Planifier les travaux
Si on consacre chaque année 1% de la valeur de la maison à son entretien ou au fonds de rénovation de la PPE, cela suffit à financer les travaux courants, mais pas forcément à assumer une grosse dépense, telle que le remplacement de la chaudière, par exemple, d’autant que certains cantons exigeront alors un bilan énergétique complet.
«Il est prudent d’anticiper les amortissements volontaires à la retraite, ainsi que la planification et le financement des travaux importants», relève Jean-Pascal Baechler. Avec des rentes modestes, on a peu de chances d’obtenir une rallonge du prêt pour la réfection du toit, par exemple.
L’approche de la retraite est l’occasion de réfléchir plus globalement à l’opportunité de conserver son bien, de le léguer ou de déménager pour un logement plus adapté au grand âge (lire encadré).
Claire Houriet Rime
Le moment de faire le point
L’approche de la retraite est le moment idéal pour faire le point sur son bien immobilier: quels sont les critères pour choisir de déménager, quel est l’enjeu d’un legs, d’un don ou encore de l’usufruit? Entre les perspectives de rente, l’optimisation fiscale et le bilan de santé, les enjeux sont de taille.
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