Rien ne vaut un séjour à l’étranger ou des cours intensifs pour apprendre une nouvelle langue. Sauf que ces deux options ont du plomb dans l’aile depuis le début de la pandémie. Dans l’attente de jours meilleurs, d’autres solutions sont possibles pour se familiariser avec une langue étrangère. C’est notamment le cas des applications qui se sont multipliées au cours des dernières années.
Peut-on vraiment apprendre une langue sur son smartphone? C’est la question que nous avons posée au linguiste Raphael Berthele, professeur au Département de plurilinguisme et didactique des langues de l’Université de Fribourg: «Ce sont d’excellents outils pour développer le vocabulaire et la compréhension de la langue, même si ces compétences ne sont parfois pas très durables.» Et, comme la démarche est individuelle, chacun peut fixer son propre rythme, tout en évitant la gêne de devoir s’exprimer devant d’autres personnes.
Le jeu comme moteur
A notre demande, Raphael Berthele a testé cinq applications populaires, en les évaluant pour l’apprentissage de l’italien. Le constat, c’est qu’il y en a vraiment pour tous les goûts et tous les budgets. Duolingo, par exemple, est celle qui mise le plus sur le principe de «gamification», c’est-à-dire que l’apprentissage s’apparente à un jeu vidéo. On gagne des récompenses au fil des exercices. Cerise sur le gâteau, sa version gratuite n’a pas de limitation de contenu par rapport à celle qui est payante.
A l’opposé, les élèves qui préfèrent une approche plus scolaire se tourneront vers Babbel. «Cela ressemble à un manuel transformé en application», glisse le spécialiste. Cette approche plaira à certains, mais elle n’exploite pas vraiment les possibilités que lui offre un tel support technologique. De plus, un abonnement payant est nécessaire pour avoir accès à l’intégralité du programme.
Une immersion indispensable
Pour entraîner la prononciation, les applications sont généralement dotées de la reconnaissance vocale. Si cette fonction ne donne pas de résultats époustouflants, elle est néanmoins meilleure sur certains outils que sur d’autres, note Raphael Berthele. Ainsi, Duolingo l’a, par exemple, félicité pour sa prononciation de mots qui n’étaient pas en langue italienne! Et son inconvénient, c’est de se contenter de signaler si la prononciation est bonne ou mauvaise, sans donner de précision. Babbel, en revanche, reconnaît même les gros mots. De son côté, Busuu donne des conseils de locution.
Gare à résilier dans les temps!
En résumé, le linguiste relève que ces applications sont idéales pour commencer l’apprentissage. Elles permettent de se familiariser avec la langue et d’étoffer rapidement le vocabulaire. Mais, à partir d’un certain niveau, il est important de s’immerger, par exemple en regardant la télévision dans la langue cible. Car, pour les applications comme pour les cours traditionnels, le grand défi est de pouvoir passer de la théorie à la pratique en exploitant ses connaissances en situation.
Comme on l’a vu, la stratégie commerciale des éditeurs est très variable. A l’instar de Duolingo, certains proposent une version gratuite plutôt complète. D’autres, comme Babbel, sont plutôt pingres et incitent l’utilisateur à passer à la caisse. En revanche, elles ont toutes, à l’exception de Mosalingua (paiement unique), une politique de prix dégressifs pour leur version payante. C’est-à-dire que plus un abonnement est conclu à long terme, moins son coût mensuel sera élevé. Mais attention au système de reconduction automatique. Si l’on ne souhaite pas poursuivre l’apprentissage, il ne faut pas oublier de résilier l’abonnement avant l’expiration de la période en cours. Chez Memrise, il faut le faire au moins vingt-quatre heures avant l’échéance. Babbel a un délai de quarante-huit heures.
Sandra Porchet