Le 25 septembre dernier, l’Agence française de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) appelait les Français à ne pas confondre châtaignes et marrons, sous peine d’intoxication alimentaire. En effet, si les premières sont comestibles, les seconds sont toxiques, car ils contiennent de la saponine, une substance susceptible de provoquer des douleurs abdominales, des nausées, des vomissements et des irritations de la gorge. Cette confusion assez fréquemment signalée dans les centres antipoison de l’Hexagone n’est heureusement pas mortelle.
Marrons des villes et châtaignes des bois
Il convient donc de différencier ces deux fruits apparemment semblables. Malheureusement, la langue française est source de confusion, car sous l’appellation «marrons glacés», «marrons chauds» et autre «purée de marrons», on a affaire à des châtaignes! Retenons donc que, une fois cuisinées, celles-ci deviennent des marrons…
Si les marronniers poussent en ville, dans les parcs, les allées et les cours d’école, on a peu de chance d’y rencontrer des châtaigniers; on les trouve en forêt ou dans les vergers, notamment en Valais et, bien sûr, au Tessin, loin des sols calcaires. Ces deux espèces se distinguent facilement par leurs feuilles: celles du marronnier, palmées, sont composées de cinq à sept folioles, alors que celles du châtaignier sont simples, dentées et allongées.
Leurs «bogues» sont également différentes: celle du châtaignier possède de nombreuses épines pointues (ci-contre), alors que celle du marronnier présente d’épaisses piques molles (ci-dessous). Enfin, à l’intérieur de la bogue, le châtaignier produit le plus souvent trois châtaignes, mais le marronnier un seul marron.
Une bonne source énergétique et de fibres
Introduite par les Romains, la culture du châtaignier s’est établie jusque dans les hautes vallées alpines, sur des sols arides, peu propices à la culture de céréales. Grillées, bouillies, réduites en farine, consommées en soupe, les châtaignes représentaient alors la principale source énergétique de l’alimentation. La propagation de la pomme de terre au XXe siècle a contribué au déclin de l’«arbre à pain des pauvres», comme on surnommait le châtaignier.
En totalisant plus de 38% de glucides, la châtaigne est donc une bonne source énergétique. Plus de deux tiers de ce sucre est constitué d’amidon, raison pour laquelle ce fruit est considéré comme un féculent, au même titre que le riz ou les pommes de terre. Le tiers restant est formé de saccharose (sucre de table), ce qui donne à la châtaigne son goût doucereux. Grâce à leur index glycémique modéré, ces glucides sont libérés progressivement dans le sang, ce qui contribue à prolonger le sentiment de satiété.
La châtaigne est également riche en fibres avec une valeur supérieure à 7 g pour 100 g! Elle peut ainsi participer à l’apport total en fibres. Une contribution précieuse, car l’absorption d’au moins 25 g de fibres par jour concourt à la réduction des maladies cardio-vasculaires, du diabète de type 2 ou encore du cancer colorectal, le plus meurtrier après celui des poumons. Et, comme la pomme de terre, la châtaigne est pauvre en matières grasses, mais aussi en protéines. Par ailleurs, elle constitue une excellente source en potassium et apporte des vitamines du groupe B.
A consommer toute l’année
Ces qualités nutritionnelles devraient nous inciter à consommer des châtaignes en toutes saisons. Pour cela, on trouve des «marrons» surgelés ou cuits et emballés sous vide en tout temps, et les recettes ne manquent pas. Même si ce sont plutôt des farineux, ils sont le plus souvent considérés comme accompagnement. Hormis la chasse, les châtaignes s’accordent très bien avec un ragoût de bœuf ou une tajine de poulet, par exemple. Un «ragoût végétarien» marrons-tomates-cerises-polenta peut être savoureux, de même que des brocolis avec une gremolata de marrons. Avec sa farine, on peut confectionner du pain, des crêpes et toutes sortes de gâteaux, mais cela nécessite souvent l’adjonction de farine de blé, car la châtaigne ne contient pas de gluten, nécessaire pour faire lever la pâte.
Doris Favre, diététicienne diplômée