Matières plastiques
Polyester / Polaire recyclé
C’est indéniablement la matière phare de la mode soi-disant durable. Quant à savoir si elle présente un intérêt écologique, cela dépend de la source du PET recyclé, explique Nina Bachmann, responsable de la durabilité à la Fédération Swiss Textiles. Si le tissu émane de bouteilles en PET provenant du circuit de recyclage, cela n’est pas durable, car les contenants en PET peuvent être de nouveau recyclés en bouteilles, tandis que les habits issus du PET ne peuvent plus être recyclés.
Pour trouver un intérêt écologique, il faut que la matière première provienne de déchets ramassés dans la nature ou les océans.
Or, la source n’est souvent pas mentionnée. Si elle l’est, on ne sait pas toujours non plus quelle part du produit fini elle représente, car aucune réglementation n’oblige à en faire mention. En d’autres termes, il peut s’agir d’une petite partie de «PET recyclé» mélangé avec du polyester vierge.
L’engouement actuel permet de vendre les habits avec la mention PET recyclés plus chers, note Nina Bachmann, qui appelle donc à la prudence.
Autre problème des habits en matières synthétiques: ils relâchent du microplastique au lavage (Lire «Le plastique dans les habits est un véritable fléau»).
Nylon recyclé / Econyl
Le nylon recyclé provient souvent d’anciens filets de pêche récupérés en mer. Une entreprise italienne, Aquafil, a mis au point une méthode permettant de recycler le nylon sans perte de qualité. La matière est commercialisée sous le nom de Econyl. Une très bonne initiative, estime Nina Bachmann. Il n’est toutefois pas épargné par le problème des pertes de microplastique au lavage.
Elasthanne (Lycra)
Mélangée avec du coton, cette fibre élastique – aussi connue sous le nom de la marque Lycra – le rend impossible à recycler. En effet, la procédure de séparation des fibres serait très compliquée et coûteuse.
Matières végétales
Coton bio
La culture de coton, qu’elle soit bio ou pas, requiert énormément d’eau. Points positifs pour l’environnement: le recours aux pesticides de synthèse et aux OGM, si répandus dans la culture conventionnelle, y sont prohibés. Toutefois, il est difficile de dire si la mention «bio» tient bel et bien ses promesses: en 2017, une enquête de notre partenaire saldo avait montré que, dans de nombreux cas, du coton indien vendu comme bio contenait un haut taux d’OGM.
Par ailleurs, la mention «bio» ne concerne généralement que la culture de la matière première, fait remarquer Nina Bachmann. Lorsque le coton est transformé en fils et en habits, de grandes quantités de produits chimiques entrent en jeu, pour teindre et traiter les étoffes. Certains labels portent également sur ces étapes.
A noter que la mention «bio» ne garantit pas non plus que 100% des fibres utilisées soient bio. L’étiquetage n’est pas réglementé en Suisse. Des labels comme GOTS (Global Organic Textile Standard) certifient une quantité minimale.
Le coton recyclé existe, mais avec une qualité amoindrie, car les fibres se dégradent dans le processus. Les fibres recyclées sont donc souvent mélangées avec des neuves.
Lin / Chanvre
Ces deux matières proviennent, comme le coton, de plantes. Mais leur écobilan s’avère bien meilleur: elles consomment moins d’eau, requièrent moins de pesticides et peuvent être cultivées en Europe. Le chanvre a un rendement plus élevé que le coton. Lin et chanvre sont aussi disponibles en version bio.
Leur développement est freiné par leur filière industrielle: les fabricants ne peuvent pas utiliser les mêmes infrastructures pour produire des habits en coton ou en lin, par exemple.
Ces matières ont des qualités très différentes du coton. Elles sont légères et fraîches – donc plutôt adaptées à l’été – mais se froissent facilement.
Matières compostables
Ces étoffes, qui ont fait le buzz, sont, en réalité, trop en avance sur leur temps. Contrairement aux promesses, on ne peut normalement pas les mettre dans le compost de son jardin, fait remarquer Nina Bachmann. Elles ne se dégradent que dans un compost industriel, pour lequel il n’existe pas encore de point de collecte.
Par ailleurs, composter des vêtements n’aurait de sens que pour des pièces qui ne sont pas demandées en seconde main, comme les sous-vêtements. Pour les autres, prolonger leur vie dans le circuit de la réutilisation est une option plus écologique.
Matière à base de cellulose
Viscose
La matière première de la viscose est le bois. A priori, une source renouvelable. Le problème c’est que ce bois ne provient pas toujours de plantations durables. Beaucoup se font au prix de la déforestation et de grandes monocultures.
De plus, la fabrication de la viscose implique l’utilisation de produits chimiques dangereux, ensuite rejetés dans la nature. Les employés des fabriques et les habitants des régions avoisinantes sont exposés.
Pour Nina Bachmann, même si les viscoses ne sont pas forcément toutes problématiques, il est presque impossible d’en avoir le cœur net. Mieux vaut donc les éviter.
Lyocell (Tencel)
Le lyocell, dont le nom de marque déposé est Tencel, est une forme plus écologique de viscose. Le procédé est le même, mais moins gourmand en produits chimiques et en énergie. Le bois provient de cultures certifiées.
Modal
Il s’agit également d’un textile à base de cellulose. La matière première est le bambou, une plante qui pousse vite.
Matières animales
Laine
Son traitement requiert moins de produits chimiques que le coton. C’est une matière respirante et chaude. Toutefois, se posent des questions sur le bien-être animal. En Australie par exemple, la pratique du «mulesing», qui consiste à écorcher l’arrière-train des moutons sans anesthésie, est courante.
L’organisation Quatre Pattes publie sur son site un guide d’achat pour la laine mérinos avec une liste de labels garantissant le respect des animaux.
Cuir
La fabrication du cuir conventionnel implique l’utilisation de nombreux produits toxiques, notamment du chrome. Certains fabricants misent sur un tannage et une coloration naturels biodégradables. Pour reconnaître ces cuirs nature, la Fédération internationale de l’industrie du textile naturel (IVN) a lancé un label: NATURLEDER IVN. Il n’est pas encore très répandu. Pour sensibiliser les commerces, n’hésitez pas à poser la question au magasin. Le label ne tient toutefois pas compte du bien-être animal.
Plumes
Là aussi, le bien-être animal est souvent bafoué. Les pratiques incluent le plumage à vif ou encore le gavage des oiseaux. Il existe des certifications de traçabilité et de bien-être, comme Downpass. Pour l’organisation Quatre Pattes, le mieux reste d’éviter les plumes. Il est très difficile de vérifier les pratiques utilisées.
Certifications et labels
La fabrication de vêtements est un processus complexe qui compte de nombreuses étapes. Aucune certification ne couvre l’ensemble de la production, de la culture à la fabrication, en passant par la toxicité pour l’environnement ou les aspects sociaux. Pour Nina Bachmann, responsable de la durabilité à la Fédération Swiss Textiles, les labels émis par des sources tierces peuvent être considérés comme fiables. Surtout ceux émis par une organisation tierce. Reste la difficulté d’effectuer des contrôles systématiques et la corruption qui peut, comme l’avait montré saldo en 2017, plomber leur crédibilité.
Une vue d’ensemble des labels et des certifications disponibles en Suisse se trouve sur labelinfo.ch
Sandra Porchet