La grande majorité des livres vendus en Suisse romande vient de France et les prix explosent en passant la frontière. Notre pointage révèle qu’ils coûtent, en moyenne, 72% de plus que chez nos voisins, avec des écarts allant de 54% à 90% (voir tableau). Un exemple: Payot propose «L’apiculteur d’Alep» de Christy Lefteri à 15.20 fr. alors qu’il est vendu 7.95 fr. (8.30 euros) dans le pays de Molière. Le constat n’est pas nouveau, mais la différence moyenne n’était «que» de 49% dans notre relevé de 2017.
La différence «ne devrait pas dépasser 20%»
Certains libraires, dont Pascal Vandenberghe, ancien directeur de Payot, pointent les diffuseurs romands. Ces intermédiaires, souvent des filiales des grands groupes français, importent de manière exclusive les livres dans notre pays et déterminent les prix auxquels les librairies doivent les acheter. Selon Pascal Vandenberghe, les montants fixés sont largement excessifs, et une baisse permettrait aux libraires d’adoucir leurs prix. Maud Poncé-Hubier, directrice générale de Payot, estime que les prix de vente suisses ne devraient pas dépasser ceux pratiqués en France de plus de 15 à 20%.
Contactés par Bon à Savoir, les diffuseurs justifient leurs tarifs par les salaires et les loyers dans notre pays. Dargaud et Servidis soulignent que plusieurs montants relevés chez Payot sont plus élevés que leurs prix conseillés. Les diffuseurs peuvent, en effet, suggérer des prix de vente en librairie. Mais n’ont pas le droit de les imposer. Le prix conseillé par Servidis pour «Vallée du Silicium» d’Alain Damasio est ainsi de 30.20 fr. alors que Payot le vend 34.20 fr. Maud Poncé-Hubier répond ne pas avoir répercuté certaines recommandations de baisse des diffuseurs, parce qu’elles se font sans compensation pour les libraires.
Certains d’entre eux vendent néanmoins «Vallée du Silicium» à 30.20 fr.
Une pratique illicite?
En septembre 2022, Pascal Vandenberghe a déposé une plainte auprès de la Commission de la concurrence (COMCO) contre le groupe éditorial français Madrigall. La COMCO doit déterminer si Madrigall limite de façon illicite la possibilité pour les librairies suisses de se fournir en France à de meilleures conditions. Selon Patrick Ducrey, directeur de la Commission, «la décision est attendue après la pause estivale».
Mais, même si un abus était constaté, un recours au Tribunal fédéral administratif, puis au Tribunal fédéral reste possible. La procédure pourrait durer des années encore.
Gilles D’Andrès / Sébastien Sautebin
Trouver des livres gratuits ou à prix cassés
Si les prix en librairie sont trop élevés pour vous, tournez-vous vers les livres d’occasion. De quoi réaliser des économies et offrir une seconde vie à des écrits en bon état. Les bons plans:
- Boîtes à livres: on les trouve dans des cabines téléphoniques, des cafés, de vieilles caisses à journaux... N’importe qui peut y échanger des livres gratuitement. En plus de classiques littéraires, guides ou manuels, ces boîtes contiennent des œuvres récentes. Une carte, sur lanuitdelalecture.ch, en recense des centaines en Suisse romande, entre ville et campagne!
- Librairies d’occasion: bouquinistes et brocantes revendent des livres à des prix dérisoires. On paiera souvent entre 1 et 4 fr. pour un format poche. Dans les grandes brocantes Emmaüs, les rayons sont très fournis, et les ouvrages parfois classés par maison d’édition.
- Foires du livre et marchés: les bouquinistes y vendent des milliers d’ouvrages. Exemples: Foire annuelle du livre de Romainmôtier, marchés aux puces de Lausanne ou de Genève, Village du Livre de St-Pierre-de-Clages...
- Soldes en librairie: certains libraires accordent des remises. D’autres possèdent un espace pour les livres d’occasion. Jetez un œil!
- Liseuses: elles sont un investissement au départ, mais deviennent vite profitables, car les livres électroniques restent moins chers que ceux en papier.
- Bibliothèques: elles s’alimentent aussi en nouveautés littéraires. Y emprunter des livres est le plus souvent gratuit, et peut se faire même après 19h00.