Aujourd’hui, en Suisse, le travailleur qui dénonce le comportement frauduleux ou illégal de son employeur n’est protégé que par les règles générales du droit du travail et les principes tirés de la jurisprudence.
Appelé whistle blower par les anglo-saxons, ou lanceur d’alerte en français, le travailleur qui se voit confronté à une irrégularité commise par sa hiérarchie se retrouve entre le marteau et l’enclume. Dénoncer une irrégularité est souvent synonyme de licenciement lorsque l’employeur n’est pas de bonne foi. A contrario, se taire signifie parfois mettre en danger des tiers ou devenir complice de l’infraction.
Le projet est sur la table de nos élus depuis 2008 déjà. Progressant à une allure toute helvétique, ce n’est que le 21 septembre 2018 que le Conseil Fédéral adopte un message additionnel au projet de loi, présageant enfin son avènement.
La nouvelle disposition 321a bis du Code des obligations fixera une fois pour toute les règles qui permettront à l’employé diligent de se protéger des fraudes d’un patron malhonnête. Cet article énonce en effet que le signalement de bonne foi de faits répréhensibles à l'employeur est conforme au devoir de fidélité du travailleur.
Le travailleur peut signaler à l'autorité compétente des faits mettant en jeu l'intérêt public :
a. si l'employeur ne prend pas de mesures effectives dans un délai raisonnable ;
b. si les circonstances permettent de penser que l'employeur ne prendra pas de mesures effectives dans un délai raisonnable;
c. si la poursuite des actes visés risque d'être entravée ;
d. en cas d'urgence.
Si l'autorité compétente n'entreprend pas les démarches requises dans un délai raisonnable ou si des circonstances particulières permettent de penser qu'elle ne les entreprendra pas, le travailleur peut porter les faits répréhensibles à la connaissance du public, en s'adressant en particulier aux médias ou à des organisations concernées.
C’est donc une relativement bonne nouvelle pour les futurs Snowden en puissance. Mais, s’il devient possible de dénoncer sans risque les agissements illégaux de son employeur, il sera également désormais inscrit dans la loi que porter l’affaire à la connaissance des médias sera une solution subsidiaire, possible qu’en cas d’extrême nécessité.
Sophie-Emilia Steinauer