Tous les produits se valent-ils?
Les désinfectants autorisés par l’OFSP dans la lutte contre le coronavirus sont classés en trois grands groupes selon leur domaine d’application: les mains, les surfaces en milieu sensible (hôpitaux, EMS, laboratoires et industries) et les entreprises du secteur alimentaire. Au total, plus de mille produits sont autorisés. Leur efficacité sur les micro-organismes doit être prouvée avant leur mise sur le marché. «Attention à certains produits vendus en ligne qui n’ont pas suivi la procédure d’autorisation et qui sont potentiellement moins ou pas efficaces», prévient Myriam Borgatta, responsable de recherche à l’unité des sciences de l’exposition et toxicologue au centre universitaire de médecine générale et santé publique de Lausanne, Unisanté. Elle recommande notamment de se méfier des désinfectants non alcoolisés. Un avis partagé par Pascal Bonnabry, pharmacien-chef aux HUG, qui précise que seuls les produits contenant 70% d’alcool devraient être considérés comme efficaces.
Avec ou sans glycérine?
A priori, tout désinfectant qui se respecte, contient un émollient. Le plus connu reste la glycérine appelée aussi «glycérol». Cette substance est censée protéger la peau des autres molécules présentes dans les désinfectants, comme l’éthanol ou l’isopropanol. Elle permet de former une couche semi-occlusive à la surface de la peau, qui évite ainsi l’évaporation de l’eau et donc le dessèchement de la peau, ainsi que l’apparition de craquelures parfois douloureuses. La présence de glycérine n’est donc pas indispensable, mais se révèle intéressante pour les peaux sèches. Pour qu’un désinfectant reste entièrement efficace, il est toutefois primordial qu’il ne contienne pas plus de 1,45% de glycérol, selon la formule recommandée par l’OMS.
Quel produit pour mon enfant?
Les petits ont tendance à se salir facilement les mains, surtout lorsqu’ils jouent à l’extérieur. Un détail qui prend toute son importance, lorsque l’on sait que l’efficacité des désinfectants sur la peau grasse et sale est fortement réduite. «Un lavage des mains à l’eau et au savon est donc nécessaire et, d’ailleurs, probablement plus efficace, car il agit plus en profondeur», relève Myriam Borgatta. Si un désinfectant s’impose, les spécialistes recommandent d’en choisir un qui ne contient ni parfum ni colorant. «Ce qui est primordial, c’est que les parents veillent à ce que les enfants évitent tout contact direct avec les yeux», souligne Claudine Backes, pharmacienne et épidémiologiste au Centre universitaire de médecine générale et santé publique de Lausanne, Unisanté. Et d’ajouter que les risques sont bien réels: «Le nombre d’appels à Tox Info Suisse a doublé depuis le début de la crise sanitaire du Covid-19».
L’odeur, un indicateur?
Le parfum d’un produit ne serait représentatif ni de l’efficacité ni de la toxicité de ses molécules. «Une forte odeur reste toutefois la preuve que des molécules passent du flacon au nez, voire plus loin dans le système respiratoire», prévient Myriam Borgatta. Ces molécules peuvent alors atteindre certains tissus ou même passer dans le sang. Or, la toxicité des molécules et leur effet cocktail restent en grande partie inconnus. La majorité des spécialistes l’affirment cependant: l’odeur n’est pas un facteur déterminant pour le choix d’un produit. Par contre, les parfums ajoutés, ainsi que les colorants, peuvent provoquer des réactions allergiques chez certaines personnes. Ajouter des huiles essentielles pour améliorer l’odeur d’un produit n’est d’ailleurs pas anodin. Certaines peuvent en effet se révéler irritantes, oxydantes, dermocaustiques ou encore photosensibles. «Le mieux reste d’opter pour le produit le plus neutre possible, dont l’odeur ne nous incommode pas», conclut Pascal Bonnabry.
Trop désinfecter, c’est risqué?
Se laver ou se désinfecter les mains est primordial. Mais ce geste est-il anodin? La réponse des experts est unanime: le risque d’affaiblir le système immunitaire est rare, voire inexistant. Par contre, «vivre dans un milieu aseptisé, surtout pendant l’enfance, peut conduire au développement d’allergies», explique Myriam Borgatta. Son conseil: utiliser des savons simples, sans parfum ni colorant, tant pour se laver que nettoyer son domicile. «Probablement que moins il y a de molécules chimiques, mieux c’est pour la santé à long terme». Dans le cas de la pandémie actuelle, l’utilisation de désinfectants, lorsqu’il n’est pas possible d’utiliser de l’eau et du savon, reste primordiale.
Sou’al Hemma