Patagonia est une marque bien connue dans l’équipement outdoor qui fait valoir son esprit responsable. Jusqu’à il y a peu, les T-shirts et les pulls qu’elle produisait étaient entièrement à base de coton bio. Mais les choses ont bien évolué. Un sweat-shirt, par exemple, se compose maintenant de 47,5% de coton recyclé, de 47,5% de polyester recyclé et de 5% d’élasthanne. Sur l’étiquette, on peut lire: «Ce sweat-shirt, 95% recyclé, est fabriqué à partir de 10,8 bouteilles en plastique et de 272 grammes de chutes de coton, et permet d’économiser plus de 540 litres d’eau par rapport à un modèle en coton conventionnel.»
Le coton, un pêché écologique
Remplacer le coton par du plastique, est-ce une solution pertinente pour l’environnement? «Le coton est une matière première qui n’est pas dénuée de problèmes», tempère Marc Sidler, de Testex AG à Zurich, un institut de certification de textiles. Faire pousser un kilo de coton nécessite entre 8000 et 10 000 litres d’eau. Par ailleurs, il s’agit de la culture agricole pour laquelle on utilise le plus de produits phytosanitaires. Les plantations de coton conduisent à des monocultures au détriment des denrées alimentaires. Il faut aussi savoir que 70% du coton cultivé est génétiquement modifié, alors que la part du bio atteint à peine 1% des cultures, selon Marc Sidler.
Même son de cloche du côté de l’institut allemand de recherche sur l’environnement, Öko-Institut. «Mais l’utilisation grandissante de fibres synthétiques nous inquiète», admet l’un de ses chercheurs, Andreas Köhler. Le polyester recyclé améliore certes le bilan CO2 et réduit la consommation d’eau, mais la production de microplastiques, à savoir des particules de plastique d’un diamètre inférieur à 5 mm, pose problème. On en trouve désormais partout: dans les rivières, les lacs, la glace de l’Arctique, la neige, les sols et même l’air. Et les textiles synthétiques en sont les grands responsables.
Au lave-linge, chaque kilo de linge relâche jusqu’à 0,1 g de microplastiques, montre une étude du Laboratoire fédéral d’essai des matériaux et de recherche Empa. Le problème s’est intensifié, ces dernières années à cause de la montée en force des fibres synthétiques. Entre 1992 et 2010, la part de plastique dans les habits est passée de 16 à 42 millions de tonnes, selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a calculé que, environ, 1,5 million de tonnes de microplastiques provenant de ménages privés terminent dans la mer, chaque année.
Acheter moins, mais mieux
Il est vrai que la problématique est un peu différente aux Etats-Unis, où est basée Patagonia. Les bouteilles en PET sont largement moins recyclées qu’en Suisse et les ordures n’y sont pas incinérées. «Toutefois, si les vêtements synthétiques usagés terminent dans des décharges ou sont exportés dans des pays où il n’y a pas de traitement organisé des déchets, le problème des microplastiques demeure», souligne Andreas Köhler.
Patagonia est consciente du problème. Contactée par Bon à Savoir, l’entreprise met en avant plusieurs projets de recherches internes, notamment pour le développement de plastique biodégradable. Ces démarches ne sont toutefois pas encore près d’aboutir.
En attendant, pour préserver la planète, mieux vaut acheter peu d’habits en préférant ceux qui ont une qualité élevée et qui sont fabriqués avec des fibres naturelles, conseillent Andreas Köhler et Marc Sidler.
Michael Soukup / sp
Comment limiter les microplastiques
⇨ Eviter d’acheter des vêtements contenant du plastique (polyester, acrylique, nylon, etc.).
⇨ Préférer les programmes de lavage courts, car plus on lave longtemps, plus les fibres se détachent.
⇨ Privilégier les cycles à 30° C qui usent moins les textiles.
⇨ Aérer les habits au lieu de les laver quand cela n’est pas indispensable.
⇨ Renoncer aux agents blanchissants et aux autres détachants abrasifs pour enlever les taches peu tenaces.
⇨ Eviter le sèche-linge qui casse encore davantage de fibres textiles.
⇨ Utiliser un sac à lessive qui filtre les microplastiques. Après le lavage, il suffit de jeter les particules emprisonnées à la poubelle.