Ça a commencé par des virées entre filles. Les cabines d’essayage, les fous rires et le bus où on déballait ses emplettes pour être sûre d’avoir bien choisi. Un jeans qui va bien, ça fait partie des plaisirs de la vie: le petit shoot d’adrénaline qui remet le moral à l’endroit, avec le sentiment d’avoir bien mérité ça.
Au fil du temps, on a appris à faire ses emplettes d’un coup de pouce, au gré des publicités qui défilent sur Instagram ou TikTok, entre deux messages WhatsApp, entre deux arrêts de bus. Plus besoin de casser la tirelire, le top coûte moins cher que les courses du dîner.
En 2022, 3,3 milliards de vêtements ont ainsi été vendus en France, soit 48 pièces par habitant et par an. La mode éphémère est à l’origine de 10% des émissions de CO2. Ne parlons pas des petites mains qui ont assemblé la robe: une femme, un enfant, mal payés, peut-être enfermés.
En France, un projet de loi veut taxer la fast fashion pour calmer le jeu. Il est même question d’interdire ce genre de publicité sur les réseaux sociaux.
Rien de tel en Suisse: le Parlement ne va quand même pas gâcher la fête. Tant pis si nos vêtements bon marché sentent la sueur et le charbon! Au final, tout repose, comme d’habitude, sur le consommateur. Et c’est dur à avaler. Va-t-on se priver au prétexte que des escrocs se remplissent les poches à la barbe des autorités, alors que tous les autres postes du budget augmentent massivement?
Acheter local, c’est plus facile pour les carottes que pour les jeans. Alors on va résister à la fast fashion, mais continuer à se faire plaisir. Retrouver les copines, acheter moins souvent, parce que c’est beau, parce que ça nous va bien.
Pour le shoot d’adrénaline, varier le programme: danser, buller en eau chaude, nager en eau froide ou aller courir. Et surtout, faire la nique aux pantalons vite achetés et mal coupés, indignes des coquettes.
Claire Houriet Rime