«Depuis l’accident, je me dis que j’ai eu de la chance de ne blesser personne», confie Corinne Badan. Le 10 mars 2017, notre lectrice a dû faire un freinage d’urgence sur l’autoroute. «Ma voiture est immédiatement devenue incontrôlable. Elle a viré sur la droite, puis sur la gauche, avant d’emboutir la glissière centrale, où elle s’est immobilisée.»
Selon l’infortunée conductrice, le système antiblocage des roues (ABS) de son Audi A3 Sportback n’a pas fonctionné. Et cette dernière de se souvenir que quelques semaines auparavant, le témoin ABS du tableau de bord s’était allumé avant de s’éteindre au démarrage suivant. «J’avais alors passé chez le concessionnaire Audi, mais on m’avait alors simplement répondu que, si le témoin s’était éteint de lui-même, il ne pouvait pas y avoir de problème.»
ABS défectueux
Car l’ABS de certaines Audi est bel et bien défectueux comme l’apprennent Corinne Badan et son mari Bernard en juillet 2017. Ils découvrent, dans la presse, que 22 000 véhicules en Suisse sont rappelés dont les A3 sorties d’usine en 2008 et 2009, comme celle des Badan! Une mise à jour informatique devait régler le problème.
En menant des recherches, nos lecteurs découvrent qu’un rappel similaire avait déjà été lancé au Canada en décembre 2016, soit plusieurs mois avant l’accident! Selon un document officiel, l’anomalie était susceptible d’entraîner une indisponibilité du système de freinage et du contrôle de stabilité (ABS/ESC), «ce qui pourrait augmenter les risques de perte de contrôle du véhicule et causer une collision (…) ou des dommages aux biens». Une description qui correspond exactement à ce qui est arrivé à Corinne Badan.
Cette information vient d’ailleurs compléter une expertise indépendante réalisée sur l’Audi A3 peu après l’accident à la demande du couple. Le spécialiste avait alors relevé l’existence d’«un dysfonctionnement de freinage (…) qui devait être présent avant la survenance du choc».
Perte de 5215 fr.
Au vu de ces éléments, le couple décide d’écrire à Amag, importateur officiel de la marque aux anneaux en Suisse. Il lui demande alors de prendre en charge les conséquences financières de la défaillance. Le montant n’est pas astronomique: personne n’a été blessé, la glissière a été payée par la RC de la conductrice (lire encadré) et, fait notable, le préfet et le Service des automobiles ont décidé de ne pas sanctionner Corinne Badan, estimant que le véhicule avait bel et bien un défaut.
Il ne reste donc que le dégât total de l’A3, qui n’était plus couverte par une casco collision. A la date de l’accident, sa valeur vénale se monte à 9000 fr. et la vente de l’épave a permis de récupérer 4325 fr. La perte est donc de
4675 fr. à laquelle s’ajoutent les frais de l’expertise indépendante, soit un total de 5215 fr.
Audi dit «niet» puis change d’avis
Audi Suisse refuse pourtant catégoriquement d’entrer en matière, arguant, entre autres, que «le véhicule n’est plus disponible pour une analyse, car il a déjà été mis au rebut». Désarçonnés mais pas vaincus, Corinne et Bernard Badan décident de prendre contact avec Bon à Savoir.
Malgré l’absence de l’épave, le dossier nous a paru solide, les prétentions étaient raisonnables, et le couple indiscutablement en droit d’attendre une attitude plus élégante d’une marque Premium comme Audi.
Pendant des semaines, Bon à Savoir a donc envoyé toute une série de courriels dans ce sens au siège allemand de la marque. Les destinataires ne nous ont jamais répondu, mais un bref message est finalement venu d’Audi Suisse, indiquant que le problème serait réglé directement avec les clients. A la fin du mois de mars, le constructeur d’Ingolstadt a finalement versé l’intégralité du montant demandé. En se gardant, bien entendu, de reconnaître toute responsabilité.
Sébastien Sautebin
Dans la pratique
En cas de défaut constructeur
En Suisse, les assureurs sont tenus de régler les dommages causés aux tiers par leur client (couverture RC), même en cas de défectuosité du véhicule. En revanche, ce n’est pas le cas de la casco complète qui couvre les propres dégâts matériels de l’assuré: les conditions générales excluent souvent les défauts de fabrication ou de construction. Certaines compagnies expliquent toutefois n’appliquer cette clause d’exclusion qu’avec la plus grande réserve. «Le défaut doit être prouvé de manière stricte au moyen d’une expertise complète, explique La Mobilière. Si cette dernière ne peut pas le déterminer de manière probante, nous renonçons à l’application de cette cause.» Même son de cloche du côté d’Allianz qui affirme «agir généralement en faveur du client en lui versant malgré tout la prestation casco». L’assureur décide ensuite de se retourner ou non contre le constructeur.