Des boîtes de médicaments expirés traînent dans les tiroirs de nombreux foyers. Les pharmaciens déconseillent d’utiliser ces produits. Le site de la pharmacie en ligne Zur Rose, par exemple, contient la mise en garde suivante: «Ne prenez pas de médicaments expirés, car leur action change et des effets secondaires peuvent survenir.» L’autorité de surveillance des produits thérapeutiques Swissmedic nous a également affirmé: «Les médicaments périmés ne doivent plus être utilisés.» Selon Swissmedic, il s’agit d’un standard international. Des tonnes de médicaments finissent donc à la poubelle.
En fait, c’est l’industrie pharmaceutique qui détermine les durées de conservation de ses produits. Elles s’étendent habituellement de un à cinq ans. Mais plusieurs études scientifiques démontrent que de nombreuses préparations demeurent stables bien au-delà des dates indiquées, à condition d’être stockées correctement.
L’Institut de pharmacie de Würzburg (Allemagne) a évalué les résultats des études existantes. Certains médicaments avaient plus de 70 ans. Conclusion: la majorité des remèdes périmés agissent encore très efficacement, parfois à presque 100%!
Par exemple, la substance active salbutamol contre l’asthme était encore impeccable vingt ans plus tard, tout comme le montélukast contre le rhume des foins, après plus de quinze ans. L’analgésique naproxène et l’antibiotique ciprofloxacine faisaient toujours effet plus de quatre années après la date limite fixée par le fabriquant.
Des tests menés depuis 1986
Aux Etats-Unis, l’Agence des produits alimentaires et médicamenteux (FDA) contrôle la durée d’efficacité des médicaments depuis 1986 par le biais d’analyses. A condition qu’il n’y ait pas de risques pour la santé, la FDA prolonge les durées de conservation des remèdes importants pour garantir l’approvisionnement de la population. Jusqu’à présent, les dates de péremption d’environ 300 médicaments, dont des antibiotiques et des analgésiques, ont été allongées pour des périodes allant de un à douze ans.
La professeure Ulrike Holzgrabe de l’institut de pharmacie de Würzburg (Allemagne) demande que les autorités européennes et les fabricants soient légalement tenus de tester régulièrement les préparations médicales sur de longues périodes afin d’adapter les dates de péremption aux durées d’efficacité réelles. Selon elle, des extensions seraient particulièrement utiles en cas de pénuries.
Divers antibiotiques et analgésiques manquent actuellement en Suisse. Les autorités fédérales puisent, par exemple, dans les réserves obligatoires de morphine depuis mars 2022.
D’après le pharmacien hospitalier Enea Martinelli, quelques 1000 médicaments n’étaient que peu ou pas disponibles au début du mois de mai 2023, dont 150 remèdes vitaux.
Malgré cela, l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) n’adhère pas à l’idée de prolonger certaines durées de conservation. Dans un rapport publié l’an passé, l’Office affirmait que les consommateurs n’apprécieraient pas des échéances plus longues.