Les ophtalmologues le surnomment le «voleur silencieux de la vue». Pas étonnant, le glaucome peut se développer sur de longues années, sans aucun symptôme perceptible. Existant sous plusieurs formes (lire encadré), il se caractérise par une dégénérescence progressive du nerf optique. Avec une lourde conséquence: un rétrécissement du champ de vision pouvant aller jusqu’à la perte totale de la vue. Il s’agit de la deuxième cause de cécité dans le monde après la cataracte, selon l’Organisation mondiale de la Santé.
Aggravation avec l’âge
Si l’origine du glaucome reste inconnue, la maladie est très souvent liée à une pression intraoculaire élevée. D’autres facteurs de risques ont été identifiés. L’âge en est l’un des principaux, bien que certains enfants puissent être touchés dès leur naissance. En Suisse, on estime qu’environ 2% de la population de plus de 40 ans est atteinte d’un glaucome, une proportion qui augmente à 15% chez les personnes de plus de 70 ans.
D’autres éléments peuvent favoriser son développement. Il s’agit notamment des antécédents familiaux (caractère héréditaire) ou des origines ethniques – les personnes d’origine africaine ou asiatique sont plus touchées. Les fortes myopies (supérieures à -5 dioptries) constituent également un facteur de risque.
Trouble de la vision périphérique
Problème: le glaucome est souvent repéré tardivement puisque la vision demeure préservée aux stades initiaux de la maladie. «Ce n’est que lors d’atteintes plus sévères qu’on remarque un trouble de la vision périphérique. Le patient peut par exemple rencontrer des difficultés à s’orienter dans l’espace, ou perdre son habilité à la conduite d’un véhicule», explique Sarah Vez, médecin à l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin de Lausanne.
Freiner l’avancée de la maladie
Une détection précoce est donc indispensable. Médecin-cheffe au Service d’ophtalmologie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), la Professeure Gabriele Thumann recommande un dépistage chez un ophtalmologue à partir de 40 ans, idéalement chaque année, surtout si l’on a des antécédents familiaux (lire aussi: «Confirmer son glaucome, une étape nécessaire»). Le but: intervenir avant que le nerf optique soit abîmé voire totalement détruit. «Près de 80% des informations reçues par notre cerveau proviennent de la vue. L’altération ou la perte de ce sens essentiel engendrent donc de sérieux problèmes», souligne la spécialiste.
Ce contrôle régulier est d’autant plus important que le glaucome est une maladie incurable et irréversible. Les déficits de vision ne peuvent donc pas être récupérés. A l’heure actuelle, les traitements existants visent à freiner voire, dans le meilleur des cas, à stopper la dégradation du nerf optique.
Le plus souvent, des gouttes à instiller chaque jour permettent d’équilibrer la pression intraoculaire. Avec un bémol: l’exposition à ces gouttes peut parfois provoquer une irritation de l’œil. Dans les situations les plus complexes, une opération au laser ou une intervention chirurgicale peut avoir lieu.
Kevin Gertsch
Une même maladie, plusieurs formes
Le glaucome existe sous différentes formes. Chacune entraîne une détérioration du nerf optique, qui transmet les signaux nerveux entre l’œil et le cerveau. Voici les trois principales:
Le glaucome à angle ouvert
C’est la forme la plus fréquente. Dans ce cas, le liquide produit par l’œil, appelé humeur aqueuse, n’est pas évacué correctement. En s’accumulant, il entraîne une élévation de la pression intraoculaire. Comme son évolution est lente, il est généralement diagnostiqué tardivement.
Le glaucome à angle fermé
Sous cette forme, l’iris de l’œil se colle sur le trabéculum, qui sert à filtrer l’humeur aqueuse, et l’obstrue. La vidange est empêchée. Il en résulte, là encore, une augmentation de la pression intraoculaire. Ces glaucomes peuvent évoluer lentement ou survenir de manière aiguë, entraînant de vives douleurs.
Le glaucome à pression normale
Plus rarement, un glaucome à angle ouvert se déclare alors que la pression de l’œil reste dans la norme. Il est souvent diagnostiqué tardivement et peut survenir en raison de troubles circulatoires au niveau du nerf optique.