Payer autant que les voisins, alors qu’ils vivent les fenêtres grandes ouvertes tout l’hiver sans fermer les radiateurs? A l’heure où les coûts de l’énergie explosent, c’est une injustice qui ne passe plus. Pourtant, nombreux sont les locataires dont les frais de chauffage et d’eau chaude, au lieu de se baser sur leur consommation effective, sont répartis selon le volume de leur appartement. Et, peu importe, les efforts consentis par les uns et pas les autres, ou le nombre d’occupants dans le logement, chacun paiera, au final, à volume égal, les mêmes charges.
Obligation dans les bâtiments modernes
Bonne nouvelle: depuis les années 1990, les cantons imposent aux bâtiments construits ou lourdement rénovés d’être équipés d’appareils permettant de mesurer la consommation individuelle de chauffage et d’eau chaude. Voire, dans certains cas, d’équiper les bâtiments construits avant cette période. Moins bonne nouvelle: il y a de notables exceptions à ce régime. Pour ne rien arranger, l’application des différentes législations cantonales sur l’énergie n’est pas toujours évidente, en pratique.
Dans les immeubles de cinq logements ou plus
Les villas individuelles et les petits immeubles ne sont pas concernés. Seuls les bâtiments comportant au moins cinq unités d’habitation doivent être équipés des appareils nécessaires. Les bâtiments peu gourmands en énergie en sont dispensés. Excepté à Genève où l’obligation de mesurer la consommation individuelle d’eau chaude demeure. Depuis 2020, Fribourg n’impose plus que des compteurs d’eau chaude pour les nouvelles constructions, justifiant cette simplification par leur consommation énergétique de plus en plus faible grâce à de nouveaux standards.
Les bâtiments construits avant l’entrée en vigueur de ces nouvelles normes sont également tenus de s’adapter, mais uniquement lorsque cela est techniquement possible. Ce qui exclut, par exemple, les logements non équipés de vanne unique d’eau chaude ou avec un chauffage au sol.
Contrôles rarissimes
Le locataire qui a un doute doit commencer par vérifier si son immeuble devrait être équipé des installations requises ou s’il a bénéficié de dérogations. Pour en avoir le cœur net, il peut s’informer auprès de la Commune qui a délivré le permis de construire et, au besoin, au service cantonal compétent en matière d’énergie.
En cas d’infraction, et sur dénonciation, les Services cantonaux du Valais, de Genève et de Neuchâtel sont chargés de remettre à l’ordre – voire amender – les bailleurs récalcitrants. Sur le papier en tout cas. Car dans les faits, tous confirment que de telles procédures sont rarissimes, voire n’ont jamais eu lieu. Genève admet par exemple avoir peu procédé à des contrôles, à ce jour, mais précise que «la situation actuelle amène l’Office cantonal de l’énergie à faire évoluer sa position». Les cantons de Vaud, Fribourg, Berne et du Jura renvoient, pour leur part, la balle aux communes. Avec plus ou moins de succès: sur ces questions, l’Office des permis de construire de la Ville de Lausanne nous a, de son côté, renvoyés... au canton.
Se tourner vers sa régie
Si l’immeuble n’est pas conforme, le locataire peut tenter aussi de s’adresser directement à sa régie. Dans le cas où le bailleur ne veut rien savoir, il faudra alors saisir la Commission de conciliation en matière de bail à loyer. Mais la procédure n’est pas forcément gagnée d’avance, surtout si les coûts d’équipement du bâtiment sont disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. En cas de travaux, une augmentation de loyer n’est pas non plus exclue.
Attention: selon le Tribunal fédéral, les décomptes établis sur la base du volume des appartements ne sont pas nuls, même si le propriétaire avait l’obligation de poser des compteurs. Il faut donc, malgré tout, continuer à payer les charges.
Silvia Diaz
Bonus web: les Services de l’énergie par canton romand.