Le statut du mari comme «chef de famille» est mort de sa belle mort un certain 1er janvier 1988. Au détour de la révision du droit matrimonial, disparut alors la disposition selon laquelle l’homme du couple – hétérosexuel, forcément – était seul responsable des activités lucratives et des comptes bancaires du foyer. On sait ce qui attendait son épouse: tâches ménagères et soins à la famille.
Tout cela est derrière nous. Sans regret! Les femmes peuvent ouvrir leur propre compte bancaire, gérer seules leurs affaires administratives, n’ont plus besoin de l’accord de leur époux pour travailler.
Oui mais. Parfois, le «chef de famille» sort de sa tombe et se voit ressuscité. Chez PostFinance, lorsqu’un compte est au nom d’un couple, seul le mari est consulté en cas de démarches administrative. Et l’institution brandit la menace de bloquer le compte si les documents ne sont pas retournés par Monsieur. Punition collective, sans pour autant en avertir l’épouse: on comprend la colère de la conseillère nationale Laurence Fehlmann Rielle (PS, Genève), qui a dénoncé la posture sexiste de PostFinance et demandé au Conseil fédéral de réagir. Peine perdue: celui-ci a admis fixer des objectifs stratégiques à la Poste suisse. Mais il s’agirait là de pure question opérationnelle. Et tant pis pour l’égalité des sexes ancrée dans la Constitution.
PostFinance n’est pas la seule à vénérer les patriarches déchus. Ici, c’est une assurance maladie qui décide de centraliser factures et remboursements à une seule personne du foyer. Par défaut, l’époux. Là, c’est un office cantonal qui exige la signature du père d’un étudiant pour une bourse d’études, alors même que la mère a l’autorité parentale unique.
Aux banques, assurances et autres offices de la population de prendre le train de la modernité en marche. Le 14 juin et sa grève féministe suisse approchent: l’occasion d’enterrer pour de bon le statut du chef de famille.
Laura Drompt