Vous avez ouvert l’œil, et le bon! Après notre appel à témoins, de nombreux exemples de produits aux paquets revisités nous sont parvenus. Leur point commun: une hausse de prix cachée derrière la réduction de la quantité vendue dans un paquet.
En apparence, le prix payé à la caisse demeure le même. Parfois, il diminue même légèrement. Mais, rapporté aux 100g, le coût augmente (lire: «Plus petits... et plus chers!»). On désigne ce mécanisme par l’anglicisme shrinkflation.
30 sachets de thé en moins
Utilisée par les marques et les distributeurs, cette ruse passe souvent inaperçue aux yeux des consommateurs. Pour l’identifier, il faut sortir la calculette et avoir gardé une preuve des quantités vendues auparavant (avec d’anciens emballages, publicités ou tickets de caisse). Sans cette mémoire, impossible de connaître l’ampleur des hausses cachées.
Une lectrice nous a ainsi fait suivre les emballages de son thé bio préféré, acheté chez Coop: passé de 50 à 20 sachets. Du côté de Nyon (VD), Andrew Brookes a conservé des tickets de caisse et a joint des photos démontrant plusieurs augmentations de prix dans sa Migros habituelle: +8% pour le lard à griller, +18% pour du savon, +30% pour la mousse à raser...
L’effet de surprise agace
«C’est seulement au bout de deux jours que je me suis rendu compte que les portions étaient plus petites!», s’agace pour sa part Monica Regnery (Etoy, VD). Sur les cartons d’aliments pour chat qu’elle achète, nul avertissement du changement. «Cela ne devrait-il pas être précisé?»
Malheureusement, il incombe aux consommateurs de repérer le prix unitaire (prix par litre, kilo, mètre, etc.). En Suisse, celui-ci doit être affiché pour les marchandises mesurables ou dont le prix est calculé en fonction de la quantité vendue. La règle est imposée par l’ordonnance sur l’indication des prix. Les consommateurs, eux, pointent le manque de transparence des magasins et l’effet de surprise, une fois l’astuce découverte.
Stratégie marketing à déjouer
La population subit l’inflation de plein fouet et change ses habitudes. «Cela s’avère particulièrement difficile pour les personnes à faible revenu, qui font face à une hausse du coût de la vie», déclare le cabinet Deloitte, qui a sondé 1900 personnes en Suisse sur leurs habitudes durant l’année 2023. Constat: 57% des personnes interrogées réduisent leurs dépenses dans les biens non essentiels; 51% accordent plus d’attention aux offres spéciales; 37% cherchent des alternatives moins chères et 34% ont diminué leurs dépenses pour la nourriture.
Dans ce contexte, la shrinkflation est une façon de répondre aux nouvelles habitudes de consommation. Elle fait baisser la garde aux acheteurs, soucieux de limiter la facture, en masquant les hausses de prix trop visibles. A ce titre, les «packs» promotionnels ont un effet particulièrement retors: ils donnent un signal de bonne affaire, dans un contexte économique défavorable. Plus que jamais, le meilleur conseil est de ne pas se laisser influencer par des promesses marketing, mais de soupeser les produits et de se fier au prix unitaire.
Laura Drompt / Geneviève Comby
Demandez le ticket de caisse
C’est en comparant ses tickets qu’un lecteur a constaté la hausse du prix du lard M-Budget. 15 centimes de moins en caisse, un paquet allégé de quelques grammes et, au final, une hausse de 7,9%. Or, beaucoup de distributeurs ne remettent plus les tickets automatiquement, mais sur demande. La raison écologique est mise en avant: cela «permet d’économiser plus de 100 tonnes de papier par an», déclare par exemple Migros. Dans les faits, cela rend plus difficile de repérer les hausses cachées.
Des lingettes loin d’être XL
Les nouveaux paquets Swift, estampillés «XL» contiennent des lingettes trop petites et impossibles à fixer sur le balai à poussière, regrette une lectrice. En ligne, Migros confirme à d’autres utilisateurs fâchés que «le fabricant a adapté la taille à un système plus récent et plus petit» car ce serait «plus écologique». Dans la même réponse surgit la shrinkflation: «Les prix sont en hausse. Si le fabricant avait laissé la taille inchangée, il aurait dû augmenter le prix.»
Moins de sachets dans un paquet
Bio Pure Ceylon Tea Mix: +140%
Avant: 50 sachets de 2g
2.50 fr. (2.50 fr. / 100g)
Après: 20 sachets de 2g
2.40 fr. (6 fr. / 100g)
Un chat condamné à manger moins
Davantage que le prix, c’est le fait d’avoir diminué la quantité de nourriture par portion qui choque Monica Regnery: «Etant donné que notre chat mange 3 fois par jour, cela va lui faire 30g en moins sur la journée! Je ne trouve pas normal que l’on fasse du gain de cette façon en utilisant la nourriture des animaux!»
Sachets Nutrisavour Cabillaud: +10,2%
Avant: sachet 85g (4x10)
56.45 fr. (1.66 fr. / 100g)
Après: sachet 75g (4x10)
54.90 fr. (1.83 fr. / 100g)
L’étiquette «super pack» pour détourner l’attention
«Duo-pack», «Maxi-pack» ou «2 pour 1» ne sont pas gages de bonnes affaires. Des cas de shrinkflation, déguisés derrière ces offres, ont été relevés par nos lecteurs:
Lemon Tabs Handymatic: +8,8%
(souvent en action 2 pour 1)
Avant: 88 pièces
14.95 fr., 17ct pièce
Après: 70 pièces
12.95 fr., 18.5ct pièce
Kellogg’s Tresor Choco Nut: +4,8%
(Mega pack, devenu maxi pack)
Avant: 2x660g
10.95 fr. (prix en action) (0.83 fr. / 100 g)
Après: 2x620g
10.80 fr. (prix en action) (0.87 fr. / 100 g)
Mousse à raser Gillette: +30,5%
(action duopack)
Avant: 2x250ml
4.75 fr. (prix en action)
0.95 fr. / 100 ml
Après: 2x200ml
4.95 fr. (prix en action)
1.24 fr. / 100 ml