J’ai eu l’impression d’être pestiférée.» Nathalie Cobos garde un mauvais souvenir de sa dernière tentative pour donner son sang. La Vaudoise participe régulièrement aux collectes et détient une carte de donneuse. Mais voilà, en mars 2020, elle tombe malade du Covid: elle cherche ses mots, éprouve une énorme fatigue et subit une perte d’odorat. Les mois passent et sa situation s’améliore. «Je me réjouissais d’y retourner enfin, j’ai fait les tests sanguins, j’ai rempli le questionnaire.» Elle ne cache pas avoir eu le Covid. Lorsqu’on lui demande si elle est «complètement remise», elle répond que oui, même si son odorat n’est pas encore totalement revenu. Et là, tout se gâte: sa réponse met fin au don, elle est renvoyée chez elle.
Bernhard Wegmüller, directeur de Transfusion CRS Suisse, se désole de cette mésaventure et dit «comprendre la déception» de se voir refuser un don du sang après avoir pris du temps pour cette action. Mais il confirme que toute personne n’ayant pas totalement récupéré le goût ou l’odorat doit, pour l’heure, s’abstenir de donner son sang. «Nous manquons d’études sur le Covid long. Même si on ne trouve pas de trace du virus dans le sang, les réactions immunitaires et leurs effets chez le receveur restent incertains.»
Selon Bernhard Wegmüller, cette perte d’odorat «pourrait être un effet chronique de la réponse du système immunitaire contre le virus». Devant le manque de données scientifiques, le principe de précaution s’applique. De manière générale, rappelle-t-il, «on doit se sentir en parfaite santé pour donner son sang». Ces critères ne sont-ils pas trop restrictifs? Risquent-ils de décourager les volontaires? A son sens, les critères se justifient, mais l’information doit parvenir en amont, avant de se retrouver sur place pour le don. «En cas de doute, appelez le centre pour en savoir plus sur les critères. Nous avons toujours besoin de donneurs.» Bernhard Wegmüller espère que l’avancée de la recherche permettra d’en savoir davantage sur les risques effectifs, au moyen d’études contrôlées. Alors, seulement, sera-t-il possible de revoir les normes.
Aujourd’hui, Nathalie Cobos est partagée: elle comprend, bien sûr, le principe de précaution face à une maladie encore peu étudiée. Mais pourquoi, lorsqu’elle cherche du soutien médical devant sa perte d’odorat ou sa fatigue intense, s’entend-elle répondre que «ce n’est pas grand-chose»? Elle lance donc un appel au corps médical: «Qu’on nous traite et qu’on nous prenne au sérieux lorsqu’on consulte avec ces symptômes!»
Informations sur: jedonnemonsang.ch
Laura Drompt