Cet été, l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) tirait la sonnette d’alarme: 53% des plus de 65 ans sont en surpoids. «Des chiffres préoccupants, soulignait le communiqué, car cela augmente non seulement le risque de maladies cardiovasculaires, mais aussi celui de développer plusieurs sortes de cancers ainsi que le diabète de type 2.»
Les seniors un poil rondouillards doivent-ils donc frémir en regardant leur assiette? Pas du tout, nous ont répondu deux spécialistes romands. Alors, quand faut-il s’émouvoir du résultat affiché par sa balance? Quelle activité physique est-elle bénéfique pour les anciens? Quelle alimentation? Bon à Savoir fait le point avec le Pr Alain Golay, médecin chef du Service d’endocrinologie, diabétologie, nutrition et éducation du patient, aux HUG, et le Dr Sylvain Nguyen, médecin hospitalier au Service de gériatrie du CHUV.
Etes-vous en surpoids?
Pour faire le point sur son embonpoint, on peut déterminer son indice de masse corporelle (IMC). «C’est l’indice de référence, explique Sylvain Nguyen, et il est calculable assez facilement.» Il suffit de diviser son poids par sa taille en hauteur en mètre, au carré (kg/m2).
Exemple: un individu de 90 kilos pour 1.75 mètre a un indice de 29.4 kg/m2 [90/(1.75 x 1.75)]. Il se trouve donc en surpoids. En effet, selon l’échelle IMC, un résultat inférieur à 18,5 (kg/m2) révèle une insuffisance pondérale; entre 18,5 et 24,9, il correspond à une corpulence normale; de 25 à 29,9 à un surpoids et, au-dessus de 30, à une obésité.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) qualifie l’IMC de «mesure la plus utile de l’obésité», mais relève que c’est aussi un indicateur approximatif qui, parce qu’il ne prend pas en compte l’âge, l’activité physique et le sexe, peut surestimer ou sous-estimer l’adiposité réelle.
Des protéines et du plaisir
«L’état de santé à l’âge de la retraite est souvent la suite d’un processus qui a commencé des décennies avant», rappelle Sylvain Nguyen. Pratiquer une activité physique régulière et se nourrir sainement rendront les vieux jours plus doux. Et, puisqu’il est question d’assiette, on relèvera que les seniors ont un besoin accru en protéines, (œuf, viande, poisson, fromage, etc.) afin de préserver la masse musculaire et sa fonctionnalité. Et, bien évidemment, pour bichonner ses muscles, l’apport en protéines doit être associé à une activité physique régulière.
En outre, «il est important de garder le plaisir de manger, que ce soit en compagnie ou tout seul», souligne l’OFAS. Un avis partagé par nos deux spécialistes pour qui il faut garder une balance harmonieuse entre vie saine et plaisirs de la vie. «Ne culpabilisez surtout pas si vous vous offrez un bon repas», glisse Sylvain Nguyen.
De l’activité physique régulière et adaptée
La masse musculaire diminue avec l’âge. Il est donc essentiel de maintenir une activité physique régulière. Chez les personnes qui souffrent de fortes douleurs articulaires et qui bougent de moins en moins, cela peut passer par des actes élémentaires comme repasser ou nettoyer sa cuisine, et, surtout, insiste Alain Golay, marcher: «Idéalement, il faudrait faire quelque 5000 pas par jour, mais commencez avec prudence, 2500 c’est déjà mieux que rien.»
La prudence est de mise si vous envisagez une pratique plus sportive. «Avec l’âge, le sport devient dangereux, et présente des risques de déchirures ligamentaires accrus, voire d’infarctus», met en garde le spécialiste des HUG.
L’avis du médecin traitant s’impose au préalable, note Sylvain Nguyen: «C’est lui qui connaît le mieux son patient. Il pourra donc lui conseiller une activité adaptée et l’aiguiller au besoin.»
Le meilleur ami des seniors
«Un patient qui reçoit un chien a 40% de survie supplémentaire, lance Alain Golay, et pour les personnes souffrant de solitude, c’est extraordinaire.» Outre sa bienveillante compagnie, posséder un chien implique des promenades quotidiennes. Lors de ces dernières, nos compagnons à quatre pattes sont de formidables créateurs de liens sociaux. Les seniors qui n’ont jamais eu de chien peuvent tester leur compatibilité avec les canidés en demandant à promener des animaux de la SPA. Et, bien sûr, on évitera de choisir un animal trop costaud ou trop vif.
Un peu de réserves, c’est bien!
«Après 60 ans, les personnes en surpoids sont celles qui ont la meilleure survie!» souligne, de manière surprenante, Sylvain Nguyen. Des études montrent en effet que, jusqu’à la soixantaine, les êtres ayant un IMC dans la norme ont le taux de mortalité le plus bas. Mais, à partir de cet âge, et plus encore à la septantaine, les individus avec un léger surpoids sont les plus avantagés. En revanche, les obèses d’âge similaire, et plus encore ceux qui sont en insuffisance pondérale, ont des probabilités de décès beaucoup plus élevées.
De ce fait, «il ne faut pas s’inquiéter outre mesure lorsqu’on est en surpoids après 65 ans, et il n’y a aucun intérêt à perdre des kilos», résume Sylvain Nguyen. Un avis que partage Alain Golay, pour qui «il est bien d’avoir un IMC de 25 à 30, car cette petite réserve d’énergie peut s’avérer utile en cas de maladie».
De leur côté, les retraités obèses qui souhaitent perdre de la masse graisseuse doivent impérativement être accompagnés. «N’entamez une éventuelle perte de poids que sous la surveillance d’un médecin et d’un diététicien reconnu», insiste l’Office fédéral de la sécurité alimentaire (OSAV) dans sa nouvelle brochure Recommandations alimentaires suisses pour les seniors. «Cela passera par l’activité physique et la diète», résume Alain Golay. Et on agira avec doigté, précise Sylvain Nguyen: «En plus de l'activité physique, la restriction énergétique doit être modérée, et ne pas dépasser 500 calories par jour.»
Sébastien Sautebin