Un courrier de La Poste adressé à 330 000 ménages avait provoqué un tollé en 2015. Le document annonçait l’expédition d’échantillons gratuits, mais conditionnait leur distribution à l’absence d’autocollant antipub sur la boîte aux lettres.
Le géant jaune vient de récidiver, en proposant un envoi par mois, d’octobre à décembre, à savoir du bouillon en poudre, du muesli et un parfum d’intérieur. Le courrier, similaire au précédent, était accompagné d’un sticker «Publicité OK» permettant de recouvrir facilement les autocollants «Non à la pub».
Cette fois encore, la démarche n’a pas plu à tout le monde, et plusieurs lecteurs nous ont fait part de leur mécontentement. Marianne Vessaz Ott, de Neuchâtel (photo), par exemple, s’irrite d’un procédé qu’elle juge hypocrite: «Les personnes qui ont enlevé leur autocollant n’ont pas reçu que trois petits échantillons, elles ont aussi été submergées de publicité!»
L’emploi comme argument
Notre lectrice a parfaitement saisi les enjeux. Le publipostage représente un marché colossal pour le géant jaune, qui a envoyé pas moins de 1,957 milliard de courriers de ce genre en 2015. Un chiffre toutefois en baisse de 1,7% par rapport à l’année précédente. Car, face à une telle avalanche, les inscriptions contre la pub se sont multipliées. Près de la moitié des boîtes en sont pourvues en Suisse contre 23% en Allemagne et 17% en France.
L’un des objectifs de l’opération était donc de «ralentir l’augmentation de ces autocollants», comme le reconnaît Nathalie Dérobert Fellay, porte-parole de l’entreprise. Quitte à fâcher? Face à la polémique, notre interlocutrice joue la carte de l’emploi. «Le publipostage constitue un pilier important pour nous et permet de préserver des postes de travail dans la distribution. Il ne faut pas non plus sous-estimer son importance pour l’économie suisse.»
Le conseiller national Yannick Buttet (PDC/VS), très critique en 2015, juge, quant à lui, cette récidive inacceptable. «Le géant jaune dit aux gens d’enlever leur autocollant pour gagner beaucoup d’argent en contrepartie d’échantillons, qui constituent le petit bout de fromage dans la trappe à souris.» L’argument des emplois ne touche-t-il pas l’élu? «J’y serais sensible si La Poste était conséquente dans le domaine. Mais lorsqu’on lui dit qu’il y a suffisamment de volume pour maintenir un office postal, elle nous rit au nez.» L’ex-régie fédérale a ainsi annoncé que plus de 500 offices devraient fermer jusqu’en 2020, touchant quelque 1200 collaborateurs.
Sébastien Sautebin