A. Le sucre en embuscade
Stupeur! En buvant un litre de Volvic citron-limette () une chaude journée d’été, vous avalerez près de dix carrés de sucre (49 g). C’est quasiment la quantité maximale quotidienne recommandée par l’OMS (50 g), qui précise même que «ce serait encore meilleur pour la santé de réduire l’apport à 25 g». Une consommation excessive augmente les risques de caries, d’obésité, de maladies cardiovasculaires et de diabète *.
«Leur teneur en sucre est l’élément fondamental à considérer», souligne Roger Darioli. Dans les faits, la grande majorité des eaux aromatisées se situent à mi-chemin entre l’eau et les sodas. Elles contiennent du sucre (concerne les numéros du tableau 1, 2, 3, 4, 6, 7, 9) en quantités variables, mais avoisinant souvent la moitié de celle du Coca (10,6 g/100 ml). Quelques fabricants ont opté pour les édulcorants (8), parfois en plus du sucre (2, 3).
Bonne nouvelle toutefois, on peut trouver quelques eaux aromatisées sans sucre ni édulcorants. Dans notre panel, il s’agit de la Valser Limette et de l’Aproz Mint-Lime (5, 10)**.
b. Édulcorants, la disgrâce
Ces succédanés du sucre ont, pour avantage, de ne contenir que peu ou pas de calories et de ne pas provoquer de caries. Mais ils présentent surtout de nombreux inconvénients. Du point de vue nutritif, ils sont inutiles et, contrairement à ce qu’on pourrait penser, ne permettent pas de perdre du poids, puisqu’ils ne réduisent ni le besoin ni l’envie de manger du sucre. «Au contraire, ils entretiennent la dépendance au goût sucré», relève Roger Darioli. Enfin, si plusieurs études se veulent rassurantes, leur dangerosité pour la santé fait toujours débat. «Ma recommandation est de dire non aux édulcorants et, si l’on en consomme, de préférer les variantes issues de produits naturels comme la stévia (glycosides de stéviol), qui est acalorique (2, 3 ces deux boissons contiennent toutefois aussi du sucre) à celles de synthèse comme le sucralose ou l’acésulfame K (8)», résume notre expert.
c. Arômes, préférer le naturel
Leur présence peut avoir un effet incitatif positif sur les personnes âgées qui n’aiment pas le goût de l’eau et ne s’hydratent pas suffisamment. Principe général: préférer les produits contenant des «arômes naturels» à ceux pouvant renfermer des produits de synthèse («arôme») (7). Ceci garantit, selon la loi, que l’agent aromatisant se compose exclusivement de substances naturelles. Et, bien sûr, rien ne vaut le goût d’une eau fraîche agrémentée simplement d’une simple rondelle de citron ou de jus fraîchement pressé. C’est plus sain, meilleur et moins cher.
d. Des fruits, mais pour le goût
Les fruits dessinés sur les étiquettes ne se retrouvent souvent que sous forme d’arômes. Dans plusieurs produits (1, 2, 4, 7), du jus à base de concentré a toutefois été ajouté, dans des proportions totales allant jusqu’à 10%. Pour le vice-président de la Société suisse de nutrition, «cela ne remplace en aucun cas une portion de fruits». En fait, le seul intérêt réel de l’ajout de concentré est d’améliorer la saveur.
e. Inutiles ajouts de vitamines et sels minéraux
Quelques produits sont enrichis en vitamines et/ou en sels minéraux (3, 9). «Il s’agit d’un pur argument marketing, estime Roger Darioli. Du point de vue nutritionnel, cela ne présente aucun intérêt, car les vitamines et les minéraux ajoutés se trouvent en quantité suffisante dans l’alimentation courante. Les sportifs, quant à eux, mangent en conséquence.»
f. De la caféine, ma non troppo
L’Aproz O2 (9) en renferme 30 mg par bouteille de 5 dl. Les adeptes de cette molécule aux propriétés stimulantes noteront que c’est beaucoup moins qu’une tasse de café (80 mg à 95 mg) ou qu’une boisson énergisante (environ 160 mg pour 5 dl). Néanmoins, les enfants et les personnes sensibles à la caféine s’abstiendront.
g. Conservateur au nom barbare
Une seule boisson contient un conservateur (6), du benzoate de sodium (E211). C’est un antioxydant qui ralentit la dégradation des aliments. Certains soupçons pèsent sur lui: il serait, entre autres, susceptible de provoquer des réactions allergiques dans de très rares cas et pourrait exacerber l’hyperactivité chez certains enfants. Roger Darioli se veut plutôt rassurant: «Ces accusations ne me semblent pas vérifiées et le benzoate de sodium ne figure pas sur la liste officielle des ingrédients «allergisants».
h. De l’acide citrique issu de moisissures
L’acide citrique (E330) est très largement utilisé par l’industrie. On le retrouve dans quasiment toutes les eaux aromatisées. Il ralentit le processus oxydatif, permet de mieux maintenir les arômes et donne une saveur fraîche et fruitée. Consommé très souvent et à haute dose, il peut attaquer l’émail dentaire, mais Roger Darioli relativise. L’acide citrique se trouve en quantité minime dans les boissons achetées, où l’ennemi numéro un de nos molaires demeure le sucre. C’est d’ailleurs un produit naturel qu’on trouve en quantité importante dans les agrumes, notamment les citrons ainsi que dans de nombreux autres fruits et légumes. Mais l’immense majorité du E330 utilisé dans l’industrie agroalimentaire provient en fait de la culture de la moisissure Aspergillus niger sur un substrat sucré. Quelques boissons contiennent aussi de l’acide ascorbique, soit de la vitamine C, utilisé comme antioxydant.
i. Une bombe à oxygène qui fait plouf
Une boisson se démarque de ses rivales par l’ajout d’oxygène! L’Aproz O2 (9) en contiendrait ainsi «dix fois plus qu’une Aproz Classique» selon l’étiquette. Cela représente-t-il un quelconque intérêt pour la santé? «La réponse est non», tranche Roger Darioli. L’oxygène a bien un effet anti-infectieux, mais, dès que le consommateur ouvrira la bouteille, l’oxygène va filer, car il ne peut pas se lier aux molécules d’eau. Selon le marketing alimentaire, un produit doit susciter de l’émotion, de la curiosité et l’envie de goûter, et c’est bien ce qui est recherché ici.
Sébastien Sautebin
Lire le bonus web: Des eaux très chargées