C’est le genre de nouvelles qui provoque l’incompréhension sauf chez les actionnaires: le 22 janvier dernier, UBS annonce une baisse de son bénéfice net, qui se monte toutefois à 1,16 milliard en 2017! Toute proportion gardée, on se dit que le matelas est encore confortable. Or, le même jour, la grande banque informe qu’elle va baisser le taux de conversion de sa caisse de pension de 5,44% à 4,42%, ce qui en fera un des plus bas du pays.
Du coup, la rente de ses futurs retraités va diminuer de 18,75%. Concrètement, cela revient à dire que si, actuellement, ils touchent une rente annuelle de 16 320 fr. (1360 fr./mois) avec un capital de 300 000 fr., il n’en auront plus que 13 260 fr. (1105 fr.) avec les futures conditions.
Durée de vie
La faute aux rendements extrêmement faibles que peuvent espérer les institutions de prévoyance, estime UBS, qui répercute son pessimisme sur son taux technique (1) en le réduisant de 3% à 1,5%. Pourtant, l’indice des caisses de pension calculé par cette même banque annonçait, pour 2017, un rendement de 7,8%... Du coup, le taux de conversion, déterminant pour calculer le montant de la rente diminue, lui aussi, à 4,42%.
Le tableau ci-contre le démontre: dans le cas extrême d’un rendement nul (0%), le capital cumulé à 65 ans va permettre – quel que soit son montant – de financer une rente fixée avec un taux de conversion de 4,4% jusqu’à 87 ans et
9 mois. Autrement dit: la caisse de pension ne va rien perdre jusque-là. Puis, si l’assuré survit au-delà de cette limite, elle va devoir puiser dans les réserves, notamment celles constituées «grâce» à ceux qui sont décédés avant cette limite.
Mais si bas soit-il, le solde du capital en cours de consommation va évidemment dégager un rendement. S’il est de 1,5%, comme l’espère UBS, l’âge limite est repoussé a minima à 92 ans et 9 mois. Or, selon les plus récentes statistiques de l’OFS, l’espérance de vie moyenne d’un homme âgé de 65 ans en 2016 est de 19,8 années (22,6 années pour une femme). Soit un âge de 84 ans et 10 mois (87 ans et 7 mois). Même si on prend pour référence le modèle plus généreux de Jacques Mentonnex (2), il sera de 86 ans et 7 mois (89 ans et 7 mois). Et, selon ce même modèle, il augmentera au plus de 18 mois
(13 mois) d’ici à 2030. UBS est donc très, très pessimiste!
Situation surréaliste
Cette façon de faire engendre, en plus, une situation quelque peu surréaliste. La Confédération oblige, en effet, les caisses à convertir les rentes avec un taux de 6,8% pour la partie obligatoire. Mais, on le sait, elles ont le droit d’utiliser un taux «enveloppant» pour la totalité du capital, pour autant que le montant de la rente ne soit pas inférieur à celui obtenu avec le minima légal.
Exemple: un assuré dispose d’un capital de 200 000 fr. obtenu avec la part obligatoire et de 107 700 fr. avec la part surobligatoire. Il doit donc obtenir au moins 6,8% de 200 000 fr., soit 13 600 fr. Or, avec un taux de conversion de 4,42% appliqué sur 307 700 fr., sa rente sera aussi de 13 600 fr. Conclusion: qu’il ait un capital de 200 000 fr. ou de 307 700 fr. – dont 107 700 fr. de surobligatoire – il touchera la même rente!
(1) Le taux technique correspond au rendement à long terme que l’institution estime devoir atteindre pour faire face à ses engagements (paiement des rentes et du risque de ses assurés).
(2) L’étude complète peut être téléchargée sur bonasavoir.ch
Christian Chevrolet
Lire le bonus web: L'espérance de vie en Suisse