Politiciens et représentants de l’industrie ont longtemps cherché un moyen de renforcer la protection de la marque «Suisse» et de la fameuse croix blanche sur fond rouge. Ils ont révisé des lois, modifié des ordonnances ou en ont créé de nouvelles. C’est finalement en janvier 2017 qu’est arrivée la nouvelle législation «Swissness», censée enrayer pour de bon les usages frauduleux. La situation n’a malheureusement que peu changé. Du point de vue des consommateurs, la situation reste toujours aussi floue et les abus fréquents. Illustration avec quelques exemples.
Lindt: la plaque Excellence Caramel à la pointe de sel est estampillée «Maître chocolatier suisse». Or, son chocolat vient de France. Et sa pâte de cacao n’a absolument pas été produite en Suisse. Selon Lindt, le tampon «fait référence à la longue tradition suisse du groupe».
Kambly: «Spécialités de biscuits suisses», peut-on lire sur l’emballage des flûtes. Les observateurs attentifs remarqueront toutefois que la croix suisse n’apparaît pas dans le logo Kambly. Normal, c’est un produit fabriqué en France, comme l’indique une petite inscription cachée dans la liste des ingrédients. Réaction de Kambly: «Spécialités de biscuits suisses, c’est le nom officiel de notre société».
Hero: les fameux Berner Rösti, «avec des pommes de terre suisses» et le label «Suisse Garantie» proviennent en réalité du Liechtenstein.
Floralp: affublée d’un «Swiss cream», cette crème chantilly vient effectivement de Suisse. Elle est néanmoinse mise en bouteille en Italie. «Il n’y a pas d’usine de remplissage de boîtes de conserve en Suisse», se défend l’Organisation sectorielle pour le beurre (OS Beurre), gestionnaire de la marque Floralp.
Valflora: le logo et l’adresse d’Elsa, la laiterie Migros établie à Estavayer (FR), ressortent clairement sur la bouteille de crème fouettée Valflora. Mais au dos, on peut aussi lire «fabriqué en Belgique avec de la crème suisse». En d’autres termes, cette crème traverse la moitié de l’Europe, pour être embouteillée en Belgique, avant de revenir dans les rayons en Suisse.
Tartare: «J’aime le fromage.ch», clame l’emballage de cette mousse de raifort. Une adresse internet suisse qui perd tout son sens, lorsqu’on sait que cet article vient en fait de Pologne. Le fabricant, français, rétorque qu’il n’y a aucun lien entre l’adresse web et l’origine des produits.
Distronics: importateur suisse des appareils ménagers Haier, Distronics propose une gamme «Sailor Swiss Line». Des réfrigérateurs dont la société ne connaît en réalité pas la provenance. «Ils viennent probablement de Chine», écrit-elle.
Donc, celui qui veut être sûr qu’un produit vient de Suisse, a plutôt intérêt à y regarder de très près.
Marco Diener / sh