Certains produits sont restés suisses, d’autres volent sous les ailes de multinationales étrangères, mais leur image demeure résolument suisse. S’ils sont exclusivement consommés dans notre pays, ils suscitent une curiosité polie hors de nosfrontières. Parmi ces nombreux classiques, nous en avons sélectionné quatre et avons analysé leur intérêt nutritionnel.
Le Parfait
Cette fameuse pâte à tartiner a vu le jour pendant la Seconde Guerre mondiale, à une époque où la viande était rare. Il doit ses origines à un étudiant en chimie qui a eu l’idée de mélanger de la levure de bière à des graisses végétales. Le produit a connu un certain succès jusqu’aux lendemains de la guerre. La fin des privations a contraint le fabricant à rendre son produit plus attractif. Il a donc ajouté du foie de porc et des truffes. Depuis, le succès ne s’est pas démenti!
Intérêt nutritionnel: étonnamment, la liste des ingrédients entrant dans la composition du Parfait est simple et exempte d’additifs: on y trouve 45% de levure, à laquelle s’ajoutent des graisses et des huiles végétales – dont la provenance n’est hélas pas précisée (lire pages 16-17) – 12% de foie de porc, de l’amidon, du sel, des cornes d’abondance (qui ont remplacé la truffe) et des extraits d’épices. Un bon point, car la liste des ingrédients et additifs des crèmes à tartiner des autres marques est bien plus longue et frise l’indigestion.
Le Parfait apporte plus de 20 g de graisses pour 8,5 g de protéines. C’est donc un produit gras qu’on ne retiendra pas pour un en-cas quotidien. En revanche, il convient bien pour les sandwichs du pique-nique… à condition de ne pas y ajouter du beurre!
L’Ovomaltine
On doit le succès de cette poudre maltée à un terrible constat qui a interpellé le pharmacien Georg Wander vers le milieu du 19e siècle: un enfant sur cinq en Suisse mourait de malnutrition avant d’atteindre l’âge de 1 an. Son idée: offrir un produit particulièrement nourrissant, basé sur le mélange d’œufs et de malt. En 1904, Wander y a incorporé du cacao et du lait pour obtenir la recette actuelle.
Intérêt nutritionnel: ce produit se distingue des autres poudres chocolatées par un apport deux à trois fois plus important en protéines. Autre bon point, Wander n’a pas ajouté de sucre (saccharose) dans son produit, alors que c’est l’ingrédient principal des autres poudres chocolatées. Enfin, comme ses concurrentes, l’Ovomaltine est enrichie en vitamines et en sels minéraux. Mais cet ajout répond davantage à des besoins marketing qu’à une nécessité nutritionnelle.
En conclusion, l’Ovomaltine – qui appartient à une société britannique – est un produit particulièrement intéressant.
Le Cenovis
En 1920, un brasseur allemand a mis au point un procédé qui permettait de récupérer les levures utilisées pour la fermentation de la bière et de les débarrasser ainsi de leur amertume. Un groupe suisse s’est intéressé à ce produit, auquel il a incorporé du sel et des extraits de légumes. C’est ainsi qu’est né, en 1931, le Cenovis, qui a connu un succès immédiat.
Intérêt nutritionnel: riche en vitamine B1, ce produit purement végétal, ne contient aucune matière grasse. Dès lors, garnir une tartine de Cenovis est cinq fois moins calorique qu’avec de la confiture. De plus, avec 5 g de pâte, une tartine au Cenovis couvre plus de 50% des besoins journaliers en vitamine B1 (0,7 mg). En revanche, son point faible est sa teneur élevée en sel: un demi-gramme de sel dans une portion de 5 g de Cenovis, alors que les recommandations quotidiennes maximales s’élèvent à 6 g. Voilà pourquoi la marque a mis sur le marché une version sans sel, commercialisée dans un emballage bleu.
Au final, ce produit intéressant convient parfaitement au petit-déjeuner.
Le schabziger
Bien connu pour son parfum primitif et sauvage, le schabziger est un sérac (Ziger) auquel a été incorporé du sel et de la poudre de trigonelle des prés, une variété de trèfle cultivée en Suisse centrale, mais originaire du Moyen-Orient. C’est cette herbe qui lui confère son parfum corsé et sa couleur verte.
Ce fromage, originaire du canton de Glaris, est le premier article de marque suisse! Puisque c’est en 1463 (!) qu’il a obtenu une certification – ancêtre des actuelles AOC – qui en définit sa recette, sa forme et le dote d’une empreinte pour le protéger des imitations.
Même s’il est parfois présent sur un plateau de fromages, le schabziger ne se consomme pas tel quel, mais il est utilisé comme condiment: dans un risotto ou une soupe, mélangé au beurre sur du pain ou râpé sur des pâtes.
Intérêt nutritionnel: le schabziger se démarque des autres fromages, car il ne contient presque pas de graisses et donc peu de calories (137 kcal/ 100 g), soit trois fois moins que le gruyère. Cependant, il contient autant de protéines et de calcium que ce dernier.
Ce fromage-condiment n’étant consommé qu’en petites quantités, son intérêt nutritionnel est donc limité.
Doris Favre, diététicienne diplômée