Le constat est inquiétant: un tiers des 120 aliments testés par l’Ecole polytechnique de Zurich entre 2006 et 2007 contenait une teneur en acides gras trans (AGT) trop élevée. Or, leurs méfaits sur l’organisme ne sont plus à démontrer.
En 1993 déjà, une étude – publiée dans le magazine scientifique Lancet – démontrait que sur cent mille infirmières suivies pendant sept ans celles qui consommaient plus d’AGT avaient significativement plus de risques de mourir de maladies cardiovasculaires que leurs collègues. On le sait, ces grais-ses ont notamment pour effet d’augmenter le taux de «mauvais» cholestérol, tout en abaissant celui de «bon» cholestérol!
Double origine
Notre organisme ingère les AGT depuis la nuit des temps ou presque, en tout cas depuis que l’on mange des produits laitiers, du beurre et de la viande de ruminants. En effet, lors de la digestion, ces derniers transforment en AGT une partie des acides gras insaturés contenus dans l’herbe qu’ils broutent. Il s’agit dans ce cas d’une transformation naturelle qui n’entraîne pas les conséquences évoquées ci-dessus.
Le problème est ailleurs: une nouvelle forme d’AGT est apparue depuis que l’industrie solidifie les huiles végétales par hydrogénation afin d’obtenir une source de matière grasse bon marché, qui se conserve plus longtemps et qui garde une consistance ferme à température ambiante.
Limitations
Le Danemark a fait le premier pas en 2004 en limitant la teneur en acides gras trans industriels à 2% des huiles végétales contenues dans un produit industriel. La ville de New York a emboîté le pas en 2007, en interdisant des teneurs supérieures à 0,5 g par portion dans les 22 000 restaurants de la Cité. Au Canada, leur indication sur les emballages est obligatoire depuis 2005, initiative que les Etats-Unis ont suivie une année plus tard.
En Suisse, l’Ordonnance sur les huiles et graisses comestibles a fixé en mars 2008 une limite de 2% d’AGT dans la graisse végétale, avec un délai transitoire d’un an. Migros et Coop ont devancé cette ordonnance en réduisant ce type de graisses de leurs produits (lire notre test publié en janvier 2008*).
Ce succès est réjouissant, mais, hélas, l’industrie a trop souvent remplacé les AGT par des acides gras saturés bon marché, comme l’huile de palme. Or ces graisses sont également responsables de favoriser les maladies cardiovasculaires, sans parler de leur bilan écologique particulièrement mauvais.
Cet effet pervers est d’autant plus inquiétant que l’étiquetage des produits est déficient en ce domaine. La législation suisse n’oblige pas les industriels à spécifier la nature de l’huile qu’ils emploient ni la quantité qu’ils utilisent.
Or il faut savoir qu’à partir de 20 à 25 grammes par jour, les effets néfastes de l’huile de palme se font ressentir. Il faut aussi savoir que cette huile se cache dans d’innombrables produits industriels: biscuits, céréales pour petit-déjeuner, margarines, chocolat, petits pots pour bébés, barres de céréales, pizzas, plats précuisinés, etc. Le label bio ne préserve de rien dans ce domaine!
Recommandations
Puisque aucune législation limitant la quantité de graisses saturées ne semble être à l’ordre du jour, il ne reste au consommateur plus qu’à rester vigilant et à:
- éviter les AGT en bannissant les produits où figurent les termes huiles ou graisses végétales partiellement hydrogénées;
- éviter les graisses saturées en écartant les produits qui mentionnent la présence de graisses végétales ou d’huile végétale, car il y a fort à parier qu’il s’agit d’huile de palme;
- consommer avec modération les produits préparés, en choisissant de préférence ceux qui indiquent la qualité de leur graisse (p.ex. huile d’olive ou beurre);
- limiter les fritures car, à l’exception des huiles d’arachide et d’olive, les autres huiles soumises à forte température peuvent modifier les acides gras en AGT;
- choisir des huiles de qualité (colza et olive).
Doris Favre, diététicienne diplômée