Une hypothèque avec un taux de 1,13% bloqué durant 10 ans, c’est non seulement possible, mais encore négociable. Selon la qualité de l’objet, la capacité financière et le volume de fonds propres, il peut même descendre au-dessous de 1%! Qui aurait dit cela, il y a moins de dix ans, à l’époque où l’on estimait qu’un taux de 3% pour une même durée était une véritable aubaine?
Jamais les emprunts immobiliers n’ont donc été aussi avantageux. Les experts sont toutefois unanimes: il sera difficile d’aller plus bas encore. L’Office fédéral des logements reconnaît, certes, que certains prêts ont été consentis avec un taux de 0%, mais ce sont des cas particuliers. En revanche, aucune hausse ne semble se pointer à l’horizon, du moins jusqu’à la fin de 2017.
Paradoxalement, le nombre de propriétaires n’augmente pas, il aurait même tendance à reculer. La faute aux exigences de l’Autorité de surveillance du marché financier (la Finma), qui obligent les prêteurs à se montrer plus restrictifs que par le passé (lire encadré).
Trop d’argent
De fait, les banques et les assurances vie sont face à un même problème: elles ont énormément de liquidités, mais peu de solutions pour les placer. En plus, la Banque nationale facture, depuis l’an dernier, un intérêt négatif de 0,75% en cas de dépôt dans ses coffres. Elles sont donc disposées à prêter, même à long terme, avec un rendement certes modeste, mais presque sans risque, surtout si elles appliquent les mesures de la Finma.
Et voilà comment le taux global de tous les crédits en Suisse est aujourd’hui de 1,7% environ, contre 3,4% lors du dernier petit pic de 2008. Toutefois, les différences entre les institutions sont significatives, comme le démontrent les tableaux ci-dessous. Pour un emprunt durant cinq ans, l’intérêt varie de 0,97% à 1,45%. L’emprunteur malin va donc économiser 11 520 fr. avec une hypothèque de 480 000 fr. Et plus encore (21 120 fr.) s’il s’engage pour dix ans.
Qui choisir?
Maintenant, comment et qui choisir? Si l’on ne compare que les chiffres, il est impossible – comme on le lit parfois – de prétendre que les assurances sont plus avantageuses que les banques. A ce petit jeu, ce sont d’ailleurs les offres en ligne et les banques privées qui ont une longueur d’avance: Swisquote proposait, le 30 août dernier, un taux fixe de 0,75% pour cinq ans et CA Financement de 0,78%. Nous y reviendrons dans notre prochaine édition. Les assurances sont toutefois les seules à proposer des emprunts fixes à très long terme (jusqu’à 25 ans chez SwissLife). En revanche, contrairement aux banques, elles n’accordent pas d’hypothèques pour l’achat d’un terrain – PostFinance ne le fait pas non plus – ou d’une résidence secondaire.
Les assurances ont aussi la réputation d’être plus restrictives, ce qui ne se confirme pas de façon flagrante à la lecture de l’encadré. Mais il est vrai qu’elles ont parfois contourné nos questions par un très vague «calculation individuelle». Autrement dit: à la tête du client ou, plutôt, selon le volume de son portefeuille, et tant pis si cela ne laisse aucun point de repère pour négocier. Exactement comme avec les banques qui, depuis quelque temps, ont renoncé à publier leur taux sur leur site internet et à les transmettre dans le cadre d’études comparatives (liste au-dessous des tableaux).
Christian Chevrolet
Lire le bonus web: conditions d'octroi d'une hypothèque dans le détail
Eclairage
Les conditions d’octroi
⇨ Les banques comme les assurances accordent une hypothèque pouvant aller jusqu’à 80% du prix d’achat et demandent que l’emprunteur dispose des autres 20%. Mais, comme le veut la Finma, 10% de fonds propres au moins ne doivent pas provenir du 2e pilier.
⇨ Contrairement à ce que l’on pourrait croire, aucune des compagnies comparées n’impose que l’emprunteur soit assuré chez elle. Il n’y a, finalement, que Raiffeisen qui exige qu’il soit sociétaire; il est vrai que cela ne coûte qu’un engagement de 200 fr. et offre d’autres avantages.
⇨ Pour calculer la capacité financière du futur propriétaire, les prêteurs ne font pas leur calcul avec les taux actuels. Ils se basent sur un taux de référence nettement plus élevé, puisqu’il varie entre 4,5% et 5,5%. Ajoutez à cela un intérêt censé couvrir les charges et les frais d’entretien (entre 0,5% et 1,5% du prix d’achat), et les frais théoriques se monteront à 30 000 fr. environ par an pour une hypothèque de 480 000 fr., contre 10 650 fr. (au mieux) aujourd’hui!
⇨ Par ailleurs, ces frais ne doivent pas dépasser un tiers des revenus nets. Autrement dit, il faut disposer d’un revenu annuel de 90 000 fr. au moins pour contracter une hypothèque de 480 000 fr.
⇨ La Finma exige aussi que la part excédant les deux tiers du prix d’achat soit amortie en 15 ans. C’est ce qu’on appelle le «2e rang», avec, le plus souvent, le même taux que le 1er rang. Pour notre exemple, l’amortissement représente un supplément de 7200 fr. par an environ. Les assurances et certaines banques ajoutent souvent qu’il doit, de toute façon, être bouclé à la retraite, voire à 60 ans ou même à 55 ans déjà!
⇨ Alors que les banques entrent en matière dès 100 000 fr., les assurances n’accordent des prêts que pour un minimum de 200 000 fr. (Allianz) à 400 000 fr. (Generali).
⇨ La durée des prêts varie d’un ou de deux ans, jusqu’à 10 ans le plus souvent. Certaines offres vont jusqu’à 15 ans (voir tableau), voire même 20 ans (idem) et 25 ans (SwissLife).
⇨ Enfin, toutes les banques (excepté la BCF et la BCGE) et une assurance sur deux prévoient un «appel de marge» dans leurs conditions générales. Cela revient à dire que, si le prix de l’objet hypothéqué vient à baisser, elles peuvent exiger que leur client verse immédiatement une certaine somme pour augmenter ses fonds propres.