Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) de l’OMS a classé, le 26 octobre, la consommation de viande transformée (charcuterie) comme «cancérigène pour l’homme» et celle de viande rouge comme «probablement cancérigène» pour l’homme. L’inquiétude mondiale, mais aussi le tollé provoqué par cette décision, ont poussé l’OMS à clarifier sa position trois jours plus tard en écrivant, notamment, que «le dernier rapport du CIRC ne demande pas de ne plus manger de viandes transformées, mais indique qu’une baisse de la consommation de ces produits peut entraîner une réduction du risque de cancer colorectal».
L’OMS s’est aussi empressée de rappeler que l’évaluation du CIRC ne fait finalement que confirmer une recommandation qu’elle avait émise en 2002 déjà, selon laquelle il convenait de modérer sa consommation de hot-dogs, saucisses, jambon et autres viandes transformées. Dans ce sens, hormis l’acte de classification lui-même, il n’y a finalement rien de nouveau dans la récente annonce du CIRC. Et c’est logique, puisque les experts ont, en fait, examiné la littérature scientifique existante sur le sujet, en l’occurrence plus de 800 études épidémiologiques.
On le savait déjà
En Suisse, diverses mises en garde ont été émises ces dernières années. La ligue suisse contre le cancer explique, ainsi, dans un article web actualisé en mai 2014 qu’«une consommation élevée de viande rouge ou de charcuterie augmente le risque de cancer de l’intestin, voir d’autres cancers». Autre exemple: dans son rapport «Aspects de santé de la consommation de viande» publié en octobre 2014, la Commission fédérale de l’alimentation (COFA) était déjà parvenue à la conclusion que «la consommation de viande rouge et surtout de viande transformée a visiblement, à long terme, des conséquences négatives sur la santé: augmentation de la mortalité et du risque de maladies cardiovasculaires et de certaines formes de cancer comme le cancer du côlon et du diabète sucré de type 2».
Incertitude pour la viande rouge
En fait, le communiqué du 26 octobre, qui a fait tant de bruit, pourrait même paraître modéré lorsqu’il précise, entre autres, que «pour un individu, le risque de développer un cancer colorectal en raison de sa consommation de viande transformée reste faible, mais ce risque augmente avec la quantité de viande consommée». Quant à la viande rouge, l’OMS se veut encore plus prudente et parle d’«indications limitées». En d’autres termes, une association a bien été observée entre la consommation de viande rouge et le cancer mais d’autres facteurs ne peuvent être exclues.
Toute proportion gardée
Finalement, l’OMS relativise encore, par les statistiques, le danger de la consommation de charcuterie et de viande rouge. La première causerait environ 34 000 décès par an, alors que pour la seconde la causalité n’est pas encore prouvée. Si tel était le cas, le nombre de victimes pourrait avoisiner les 50 000 par an. L’Organisation mondiale reconnaît que «ces chiffres contrastent avec un million de décès annuels par cancer imputables à la consommation de tabac à l’échelle mondiale, 600 000 à la consommation d’alcool et plus de 200 000 à la pollution atmosphérique».
Sébastien Sautebin