Comme toute convention, le contrat de travail doit être respecté par les deux parties. L’employeur ne peut donc pas le modifier, au gré de ses envies ou besoins économiques. Mais il peut donner des consignes sur l’exécution des tâches. Il faut s’y conformer, dans certaines limites et à condition qu’elles ne visent pas à modifier les clauses du contrat. Pour examiner si c’est le cas, ou pas, on se référera aux conditions d’engagement convenues. Plus celles-ci étaient précises, plus il sera difficile de les modifier.
Les limites des directives
Certains contrats prévoient une clause de mobilité, permettant de modifier le lieu de travail. Mais l’employeur doit toujours agir de bonne foi: cette clause ne peut pas servir à vous affecter à l’autre bout de la Suisse quand bon lui semble!
Pas question, non plus, de vous confier des tâches à l’opposé de celles pour lesquelles il vous a engagé. S’il vous affecte, sans raison, à des activités ne correspondant pas du tout à vos qualifications, il viole son devoir de respecter votre personnalité. Dans ce cas, vous pouvez exiger que votre contrat soit respecté. Si l’employeur réagit en vous licenciant, il s’expose à devoir vous indemniser pour congé abusif.
L’entreprise ne peut pas non plus vous imposer un changement de taux d’occupation. Elle peut toutefois attendre de vous une certaine flexibilité et vous demander d’effectuer des heures supplémentaires.
Clause tacite
Le contrat se limite souvent aux points essentiels, tels que type de poste, taux de travail ou salaire, sans entrer dans les détails. Parfois, il se résume même à une poignée de main, sans autre précision sur le lieu de travail ou le jour de congé. Ces éléments constituent pourtant, eux aussi, des clauses tacites ou orales. Et répondent aux mêmes règles que les écrits.
Le congé-modification
Il ne faut pas perdre de vue la liberté contractuelle: on ne peut pas contraindre l’employeur à rester éternellement dans une relation inchangée. Ainsi, s’il souhaite à tout prix modifier une clause, il peut effectuer un congé sous réserve de modification. Cet outil lui permet d’imposer au collaborateur le choix entre une modification de son contrat et le licenciement. Les changements envisagés doivent être justifiés par un intérêt spécifique (comme des raisons économiques), et le préavis du collaborateur doit toujours être respecté.
Pour ce faire, l’employeur doit informer clairement le collaborateur que son contrat est résilié, sauf s’il accepte la modification. Il doit également lui donner un délai de réflexion raisonnable. Si l’employé accepte la modification, elle entrera en vigueur après échéance du préavis; s’il refuse, le contrat prendra fin dans le même délai.
Les règles concernant le report de préavis en cas de maladie ou l’interdiction de licencier durant la grossesse s’appliquent comme pour un congé ordinaire.
Pas de chantage
Cette possibilité ne donne pas à l’employeur le droit de brandir la menace d’un licenciement pour imposer, sans raison, une péjoration des conditions de travail.
S’il n’a pas l’intention de mettre fin au contrat, mais ne vise qu’à réduire les salaires et ce, sans nécessité économique, il agit de manière abusive. Si le travailleur ne cède pas à ce chantage et que cette réaction débouche sur un licenciement, il pourrait réclamer une indemnité pour congé abusif.
Catherine Amiguet
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Cruel dilemme
En l’absence d’une véritable protection contre les licenciements, le travailleur doit finalement choisir entre la peste et le choléra: soit il accepte les changements, soit il perd son emploi, et peut tout au plus espérer une indemnité pour licenciement abusif…
Et c’est sans parler des sanctions du chômage. Chacun est libre de choisir à quelles conditions il veut conclure un contrat. Vous n’êtes donc pas obligé d’accepter des modifications prévoyant un salaire moindre ou un nouveau lieu de travail à une heure de route. Mais si vous refusez cet emploi et que vous vous inscrivez au chômage, l’assurance pourrait vous pénaliser, arguant que vous avez refusé un travail considéré convenable (et sa définition est large). La pénalité consiste en des jours sans indemnités.