Avec un printemps qui n’a pas réussi à aligner deux jours radieux à la suite, les écrans solaires sont tombés aux oubliettes. Mais viendra bien, un jour, où le soleil aura cessé de se cacher derrière les nuages… Et, ce jour-là, les tubes de crème retrouveront leurs droits pour barrer la route des rayons UV. Comme la peau des enfants est particulièrement sensible, il est conseillé d’opter pour des lotions qui ont un indice de protection solaire (IPS) qui s’élève à 50 ou plus (50+).
Pour juger l’efficacité de tels produits, nous en avons fait analyser douze parmi les plus vendus. Les laboratoires mandatés ont vérifié l’indice indiqué, tout en s’intéressant à la présence de substances critiques pour la santé (lire encadré «Les critères du test»).
Un conservateur à bannir
Les résultats sont plutôt positifs: toutes les marques tiennent leurs promesses quant à leur perméabilité aux UV. Et aucune ne renfermait de composants néfastes au-delà des limites légales. La majorité des crèmes a été jugée «très bon» et une seule a reçu la mention «insuffisant»: la Sun kids lait solaire roll-on de Nivea. Les experts ont décelé des parfums allergènes, du phénoxy-éthanol et des dérivés de polyéthylène glycol. Et le filtrage des rayons UV était moins poussé que celui des autres lotions. Constat qui vaut aussi pour l’Ambre solaire kids de Garnier et l’Emulsion solaire baby d’Ultrasun.
La Nivea n’était pas la seule à renfermer du phénoxyéthanol. Les écrans des marques Eucerin, Sun Look, Louis Widmer, Sherpa Tensing et Garnier, ont également été épinglés sur ce point. On sait pourtant que ce conservateur est peu indiqué, en particulier dans les cosmétiques destinés aux enfants.
La pirouette de Nivea
Confrontés à nos résultats, Louis Widmer, Ultrasun et Beiersdorf (Nivea) expliquent que les indices de leurs lotions sont testés conformément aux recommandations de la Commission européenne. Mais il se peut, selon eux, que les valeurs calculées varient d’une méthode à l’autre. D’après les tests internes de Beiersdorf et de L’Oréal, société-mère de Garnier, leurs écrans auraient une protection contre le soleil nettement plus élevée que celle qui a été mesurée par nos experts.
Le plus étonnant, c’est que Beiersdof ne voit pas de problème à l’utilisation d’allergènes, de phénoxyéthanol et de dérivés de polyéthylène glycol dans des cosmétiques pour enfants. La firme estime que les consommateurs qui le désirent, peuvent se tourner vers la gamme Nivea Protect & Sensitive, sans parfum ni conservateur. Pour Louis Widmer, le phénoxyéthanol serait inoffensif à cette concentration. Il permettrait même d’éviter des conservateurs plus néfastes pour la santé. Par ailleurs, l’entreprise précise qu’elle proposera prochainement son produit avec un indice 50+.
Selon Coop, le parfum de la Sherpa Tensing est très prisé des consommateurs. L’enseigne dit avoir tenté d’enlever tous les allergènes potentiels il y a quelques années, mais aurait fait marche arrière en raison des plaintes de nombreux clients.
Ecarts de prix hallucinants
Dans leurs recommandations, les dermatologues préconisent d’appliquer 10 à 20 ml de crème pour les enfants. Opération qui doit être répétée régulièrement, et qui a donc un coût. Or, les différences de prix entre les flacons sont impressionnantes. Le meilleur marché, l’Ombia Sun, revient à 2 fr./100 ml contre
56 fr./100 ml pour l’Eau thermale réflexe solaire d’Avène! Ce rapport de 1 à 28 est d’autant plus abyssal que les deux produits ont reçu la même appréciation…
A ce propos, Migros indique que son lait est également disponible dans un emballage de 200 ml. Le prix aux 100 ml serait donc seulement de 6.90 fr. et non de 10.40 fr. Ultrasun, pour sa part, précise que son l’Emulsion solaire baby peut être trouvée dans les magasins pour 37 fr.
Andreas Schildknecht / bu
Les critères du test
Deux laboratoires ont examiné douze crèmes solaires pour enfants d’indices 50 ou 50+ selon les critères suivants.
1. Dosage indice protection UVB
La majorité des fabricants vendent des lotions avec un indice de protection légèrement supérieur à celui indiqué sur l’emballage. Cette marge de sécurité est importante, car de nombreuses personnes ne mettent pas suffisamment de crème ou pas assez régulièrement. Au fil de la journée, la couche appliquée est, en effet, éliminée par la transpiration, les frottements ou les baignades.
2. Parfums faiblement allergènes
Moins il y a de parfums allergènes, mieux la peau se porte. Avec l’action du soleil, les fragrances peuvent, de plus, créer des sous-produits de dégradation irritants.
3. Phénoxyéthanol
Ce conservateur est suspecté d’être toxique pour la croissance et la reproduction. L’Agence nationale française de sécurité du médicament et des produits de santé recommande un plafonnement de sa concentration à 0,4% pour les cosmétiques destinés aux jeunes enfants.
4. Dérivés du polyéthylène glycol
Ces substances sont notamment utilisées par les fabricants pour mélanger de façon homogène eau et matière grasse. Mais certaines d’entre elles accroissent aussi l’absorption par la peau d’autres composés présents dans les cosmétiques. Elles ne sont pas souhaitables dans les laits solaires qui doivent agir à la surface de la peau.
Ce qu’il faut savoir
⇨ Des filtres chimiques qui perturbent le système hormonal: les filtres chimiques sont constitués de molécules qui absorbent les UV. Les fabricants prétendent qu’ils sont sans danger. Des études ont néanmoins montré que certains peuvent perturber le système hormonal. Ils sont donc à éviter pour les bébés qui ont une peau particulièrement mince et perméable. Mais, quoi qu’il en soit, les enfants de moins de 1 an ne devraient pas être exposés directement au soleil. La meilleure protection? Des vêtements couvrants ou le choix de l’ombre!
⇨ Des nanoparticules qui entrent par les voies respiratoires: les fabricants optent parfois pour des filtres minéraux qui réfléchissent les rayons UV. Souvent, ils contiennent des nanoparticules qui ne sont pas sans risques. En l’état des connaissances actuelles, ces substances seraient surtout dangereuses à l’inhalation et pas au contact de la peau. Mieux vaut donc ne pas les respirer. Et, si vous préférez les éviter, sortez votre loupe pour dénicher tous les composants qui contiennent le préfixe «nano».
⇨ Un peu de soleil pour engranger de la vitamine D: celle-ci est synthétisée par notre corps sous l’effet du soleil. Les filtres, qu’ils soient chimiques ou minéraux, en réduisent l’absorption. Pour un adulte, il est donc conseillé de s’exposer le visage et les bras sans crème solaire. A condition de ne pas dépasser dix minutes quand l’astre est à son plus haut et pas plus de 30 minutes en début de matinée ou à la fin de l’après-midi. Comme ces recommandations ne s’appliquent pas aux tout-petits, il est important de leur administrer des compléments de vitamine D jusqu’à l’âge de 3 ans.
⇨Une peau bronzée n’exclut pas le risque de cancer: le bronzage est une réponse protectrice de la peau au rayonnement solaire. Si une peau bronzée brûle moins facilement qu’une blanche, une exposition exagérée au soleil augmente malgré tout le risque de cancer.
⇨ L’indice de protection solaire (IPS) peut être trompeur: cet indice indique la perméabilité d’un écran solaire aux UV. Une crème dotée d’un IPS 20 laisse, par exemple, passer 1/20e du rayonnement et en retient donc 95%. Avec un IPS 50, elle en arrête 98%. Si une peau non protégée attrape un coup de soleil après cinq minutes, il lui faudra donc 250 minutes pour être dans le même état avec une crème IPS 50. Pour les adultes, un facteur de protection de
30 est souvent suffisant. Les indices supérieurs donnent parfois un sentiment de fausse sécurité: on s’expose plus longtemps et on oublie de se crémer de nouveau toutes les deux heures.