«On nous prend pour des pigeons», s’emporte Raphaël Badoud, de Vevey. Ce lecteur a en effet commandé des disques Bluray sur un site britannique pour un montant total de 57.35 fr. comprenant la valeur de la marchandise et les frais d’expédition. L’expéditeur n’a toutefois pas indiqué le détail de la note sur l’emballage.
Estimation à la louche
Or, depuis le 1er mars 2012, les envois provenant d’autres pays ne sont pas taxés si leur valeur est inférieure à 62.50 fr., voire 200 fr. pour les produits (livres, etc.) soumis à la TVA réduite de 2%. Mais attention: ce montant est censé comprendre les coûts d’expédition. S’ils ne sont pas indiqués sur le colis, La Poste les évalue à sa façon et les ajoute à la valeur de l’envoi. Et tant pis s’ils sont plus chers que le montant réellement payé avec, pour conséquence, un total supérieur au seuil fatidique de 62.50 fr. (ou de 200 fr.).
«Dans un tel cas, nous procédons à une estimation basée sur la provenance du paquet et son poids», explique Nathalie Dérobert, porte-parole de La Poste. Pour l’occasion, le géant jaune a évalué les frais d’expédition du colis de Raphaël Badoud à 9 fr., portant ainsi la valeur totale de l’envoi de 57.35 fr. à 66.35 fr. Corollaire: comme le plafond de 62.50 fr. a été franchi, le paquet a été soumis à toute la procédure de dédouanement et aux frais qui vont avec (lire BàS 4/2012).
Taxe sur le dédouanement
Une fois la calculette enclenchée, l’addition a très vite pris l’ascenseur pour notre lecteur (voir tableau). Conformément à la zone de provenance du paquet (Angleterre), les frais de dédouanement comprennent un montant forfaitaire de 16.50 fr. et 3% de la valeur du contenu (2 fr.) pour un total de 18.50 fr. En ajoutant cette somme à la valeur d’origine de l’envoi (57.35 fr.) et aux frais d’expédition estimés par La Poste (9 fr.), on arrive à 84 fr.
C’est sur ce montant global que la TVA suisse (8%) – en l’occurrence 6.70 fr. – est perçue. Car, comme le veut la législation helvétique, les frais de port et de dédouanement sont considérés comme des services. Par conséquent, ils doivent également être taxés.
Au final, ce mécanisme kafkaïen a entraîné un supplément de 25.20 fr. pour notre lecteur, qui a dû, en plus, se rendre au bureau de poste le plus proche pour récupérer son bien. Sur la base de la facture détaillée, le géant jaune a, certes, reconnu le couac et a remboursé Raphaël Badoud. Mais ce dernier estime avoir perdu beaucoup de temps et d’énergie dans l’aventure.
«La Poste ne pourrait-elle pas exiger des fournisseurs étrangers qu’ils indiquent les frais de port sur le colis?» s’interroge-t-il. «L’étiquetage des paquets est réglé par l’Union postale internationale, répond Nathalie Dérobert. L’expéditeur commercial doit seulement déclarer le contenu et sa valeur pour le passage à la douane; libre à lui de détailler la facture. Seuls les envois dont la valeur dépasse 700 fr., doivent être accompagnés d’un formulaire indiquant clairement le montant des timbres.»
Scinder ses commandes
La moralité, c’est qu’il vaut mieux contrôler à deux fois le détail des colis en provenance de l’étranger. A l’exemple de notre lecteur, il ne faut pas hésiter à approcher le transporteur pour prouver le montant réellement payé à l’expéditeur. Et, pour éviter de crever les fameuses limites d’imposition (62.50 fr. ou 200 fr.), il est souvent préférable de diviser ses commandes, quitte à payer davantage de frais de port.
Claire Houriet Rime
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