Qui n’a jamais rêvé de humer chez soi les douces senteurs d’une nuit d’été en forêt? Ou l’air parfumé d’une fin d’après-midi en Provence? Pour répondre à ce genre d’envies olfactives, les commerces offrent désormais un large choix de sprays d’ambiance. Mais ceux-ci posent aussi de graves problèmes.
De nombreuses personnes souffrent en effet d’intolérance aux produits chimiques – ou MCS, «Multiple Chemical Sensitivity». Les symptômes: yeux qui brûlent, quintes de toux, problèmes de respiration, voire même vertiges et malaises. Les victimes réagissent particulièrement fort à certaines substances entrant dans la composition des parfums, ainsi qu’à d’autres produits chimiques.
Mais de façon plus générale, tout le monde peut être, un jour, victime d’allergies. En effet, plus les particules projetées par les sprays sont petites, plus elles se logent profondément dans les poumons lors de leur inhalation. Le processus est encore plus dangereux lorsque les composants sont toxiques.
Bon à Savoir a donc confié dix sprays d’ambiance à un laboratoire, qui a analysé:
- le taux de particules pouvant pénétrer dans les poumons;
- la présence de substances présentant un haut risque allergène;
- la présence de muscs synthétiques.
Les résultats
> Taux de microparticules
Le taux des microparticules diffère beaucoup d’un produit à l’autre.
Le spray de la marque Crabtree & Evelyn – le produit le plus onéreux du test – est le seul à obtenir la mention «conseillé», notamment à cause de son taux minime de microparticules. L’institut n’a en effet décelé que 0,2% de gouttelettes dangereuses, vraisemblablement parce le spray est pourvu d’un vaporisateur qui diffuse le parfum sans utiliser de gaz propulseur. D’ailleurs, les deux autres vaporisateurs du même type – le M-Fresh Neutro de Migros et le Super Fresh d’Eduard Vogt – affichent également de bons résultats pour ce critère.
En revanche, le spray d’ambiance Citrus M-Fresh de Migros renferme 32 fois plus de microparticules dangereuses que le premier de notre classement! Il est donc «déconseillé», tout comme les modèles Brise Mandarine (vendu chez Coop) et Roses (de la marque Cosmetic 1001).
«Les particules dont la taille est inférieure à 10 microns (1/1000 de mm) sont dangereuses», assure le pneumologue Karl Klingler. Et il est prouvé qu’elles provoquent de l’asthme.» Jan-Olaf Gebbers, médecin-chef à l’Hôpital cantonal de Lucerne, confirme: «Inhaler à tout moment de fines particules, qu’elles proviennent de fumée de cigarette, de gaz d’échappement ou d’un parfum d’ambiance, est néfaste pour notre organisme.»
> Substances allergènes
Notre test démontre aussi que les désodorisants d’ambiance contiennent tous entre 8 et 15 substances allergènes. De quoi faire fuir immédiatement les asthmatiques hors d’une pièce «parfumée»! D’autant que «ces substances peuvent provoquer des réactions allergiques de la peau, notamment de l’eczéma», commente le dermatologue et allergologue Brunello Wüthrich. La pulvérisation de substances nocives peut par exemple provoquer un eczéma au visage chez les personnes particulièrement sensibles.
Conscient du problème, le Comité scientifique européen des produits cosmétiques et non alimentaires destinés aux consommateurs (SCCNFP) a dressé la liste des 26 substances particulièrement allergènes qui devront, à l’avenir, être clairement mentionnées sur les emballages des cosmétiques qui les contiennent. La Suisse a d’ailleurs suivi le mouvement. Ce dont se félicite Brunello Wüthrich, qui nous apprend que si l’on étale un mélange de ces 26 composants sur la peau, une personne sur dix au moins développera de l’eczéma. Et que, contrairement à une idée largement répandue, ce ne sont pas seulement les substances chimiques, mais également les composants naturels qui peuvent déclencher ce type d’allergie.
Notre test prouve que les sprays d’ambiance devraient, eux aussi, être soumis aux règles adoptées pour les cosmétiques, et donc comporter la mention précise des substances allergènes répertoriées par le SCCNFP.
> Muscs synthétiques
Les sprays d’ambiance contiennent également des muscs synthétiques. Ceux-ci se répandent dans l’environnement, pénètrent parfois dans le corps humain et sont de toute façon difficilement bio-dégradables: leur usage doit donc être évité au maximum.
«Par ailleurs, souligne Volker Mersch-Sundermann, professeur en toxicologie de l’environnement à la Clinique universitaire de Giessen (D), on soupçonne toujours le musc-xylène d’être cancérigène.» Néanmoins, le muscxylène précisément, tout comme le musc-cétone (un autre composé nitromusqué) ne sont plus guère utilisés de nos jours. Il est donc stupéfiant que le spray de Cosmetic 1001, arrivé bon dernier du test, contienne l’un et l’autre, même en quantité minime! L’entreprise désire vérifier s’il est désormais possible de fabriquer le produit sans ces substances.
Autre résultat surprenant: le spray Eduard Vogt – une marque pourtant réputée pour ses produits «doux» – contient trois muscs, dont du musc-cétone. Un comble: l’entreprise l’ignorait! «Ces composants sont contraires à notre philosophie, nous a-t-elle écrit. La composition de ce produit sera corrigée.»
Au-delà des produits
Au-delà des problèmes spécifiques à chaque produit, il faut savoir que le nombre de personnes sensibles à ces substances augmente. C’est pourquoi il est extrêmement important de prévenir les allergies en ne contaminant pas inutilement une pièce avec des substances chimiques.
Il est donc totalement inutile de vouloir atténuer l’odeur de fumée de cigarette avec un spray d’ambiance! Mieux vaut aérer efficacement la pièce, ou, mieux encore, s’abstenir de fumer dans un espace fermé!
Rolf Muntwyler / vk
Informations sur l’intolérance aux produits chimiques: Ligue MCS, 032 941 30 14 ou à l’adresse: www.mcs-liga.ch