En 2018, notre test de quinze salamis (lire «Graisse et tendons pour l’apéro») avait décerné la palme à un produit à base de viande maigre, Il Salame Nobile de la marque Macelleria Falorni. Celui-ci contenait 20,1 g de matières grasses aux 100 g. Les saucisses de Vienne de notre panel ne font guère mieux. Sur les dix-huit échantillons, treize en renferment jusqu’à 25 g/100 g, soit un quart de graisse pure!
Avec une note globale de 4.8, les Bell occupent la tête du classement. Ce sont, par ailleurs, les seules à obtenir – de justesse – la mention «bon». Treize autres sont considérées comme «satisfaisant», alors que les quatre dernières écopent de la mention «insatisfaisant».
Phosphate à profusion
Notre test donne de précieux renseignements sur la composition des wienerlis disponibles dans la grande distribution. Celles-ci ont été passées à la loupe par un laboratoire spécialisé, sur la base des critères suivants: la qualité de la viande, la teneur en eau, en phosphate et en nitrites ainsi que la présence de germes, voire de bactéries nocives pour la santé (lire encadré «Les critères du test»). Et les surprises ne manquent pas…
La majeure partie des saucisses de Vienne analysées contiennent des phosphates en quantité. D’un point de vue technique, cet additif est utilisé par les fabricants comme agent de conservation, stabilisant et exhausteur de goût. D’un point de vue médical, il contribue à l’augmentation du risque d’artériosclérose, de crise cardiaque et d’accident vasculaire cérébral. Le législateur suisse a tranché en la matière et n’autorise pas plus de 5000 milligrammes de phosphate par kilo (mg/kg).
Parmi les dix-huit produits examinés, les saucisses de Vienne pour enfants Jamadu dépassent ce seuil de référence avec une valeur de 5060 mg/kg de phosphates. Il en va de même des Qualité & Prix 60% de gras en moins, qui atteignent des valeurs identiques…
Jusqu’à 18% de flotte!
Deux produits de Coop, les Jamadu et les Qualité & Prix 60% de gras en moins, obtiennent les meilleures notes pour la qualité de leur viande, compte tenu de leur faible teneur en tissus conjonctifs et en matières grasses. On retrouve également de la viande maigre dans les saucisses de Bell, Maestade et Volg.
Nos experts ont, en revanche, décelé une importante quantité d’eau dans quatre de ces cinq produits, allant de 11% pour les saucisses de Vienne Maestade et Volg, à 18% pour les Qualité & Prix 60% de gras en moins. En comparaison, celles de la marque Bell n’en contiennent que 6,5%.
Les treize autres échantillons renfermaient, pour leur part, beaucoup de tissus conjonctifs et/ou de matières grasses. Les Prix Garantie, Qualité & Prix Hello Familiy, Denner, Aldi et Maestade Terra Natura, obtiennent une note de 4 pour la qualité de leur viande. Les wienerlis Spiess font moins bien, avec un score de 3.8.
Des échantillons impropres à la consommation!
A en croire les producteurs, les saucisses de Vienne peuvent également être dégustées crues. Les résultats microbiologiques de notre test ont pourtant de quoi couper l’appétit! En effet, selon les recommandations de la Société allemande de microbiologie, le nombre total de germes toléré dans les wienerlis ne devrait pas dépasser 5 millions d’unités par colonie et par gramme (UFC/g).
Or, quatre de nos échantillons dépassaient allégrement ce chiffre. Ils étaient donc impropres à la consommation. Les Wienerli Delikatessen de la marque Keller contenaient ainsi 6,4 millions UFC/g, celles de Denner, 8,3 millions UFC/g, celles d’Aldi, 11 millions UFC/g et les Maestade Terra Natura, plus de 30 millions UFC/g. Information plus rassurante, le laboratoire n’a trouvé aucun pathogène dangereux pour la santé comme la listériose.
Plusieurs fabricants ont réagi aux résultats de notre test. Denner a indiqué n’avoir constaté aucune concentration élevée de germes lors de ses contrôles internes. Keller se dit surpris, soulignant que la chaîne du froid a été respectée jusqu’à la livraison des saucisses chez Globus. Leur durée de conservation fera toutefois l’objet d’une nouvelle analyse. La marque Lidl, quant à elle, prend «très au sérieux» cette augmentation du nombre de germes et introduira «tous les contrôles supplémentaires nécessaires». Il en va de même de Coop, qui veut examiner la quantité d’eau et de phosphates décelée dans ses produits, les valeurs révélées ne répondant pas à ses exigences.
Sabine Rindlisbacher / tb
Les critères du test
Un laboratoire allemand spécialisé a mis à l’épreuve dix-huit saucisses de Vienne, achetées dans la grande distribution, en considérant les critères suivants.
Qualité de la viande
Si on se réfère aux directives de qualité de l’Union professionnelle suisse de la viande, une portion de 100 g de wienerli peut contenir jusqu’à 4 g de tissus conjonctifs et 25 g de matières grasses. Notre test révèle toutefois qu’il est possible d’en produire avec des teneurs plus faibles. Nous avons donc attribué des notes insatisfaisantes à celles qui renfermaient déjà 3,6 g de tissus conjonctifs et 23,6 g de matières grasses. A noter que l’ensemble de nos échantillons était composé de viande de porc et de bœuf.
Teneur en eau
Les produits qui contenaient plus de 12% d’eau se sont vu attribuer des notes insatisfaisantes.
Teneur en phosphates
Les fabricants utilisent les phosphates comme agents conservateurs, stabilisants et exhausteurs de goût. L’augmentation de leur taux dans le sang peut provoquer de l’artériosclérose, des crises cardiaques et des AVC. Les additifs phosphatés sont répertoriés dans les listes d’ingrédients sous les codes «E» suivants: E338 à E341, E343, E442, E450 à E452, E541, E1410, E1412 à E1414, E1442. La réglementation suisse autorise jusqu’à 5000 mg de phosphate par kilo (mg/kg). Sur ce critère, nous avons toutefois attribué une note «insatisfaisant» aux saucisses de Vienne qui en contenaient déjà 4501 mg/kg.
Teneur en nitrites et nitrosamines
Le nitrite est un composant du sel de saumure. C’est un exhausteur de goût, mais il permet aussi une meilleure conservation des wienerlis et participe à leur couleur rouge. Combiné aux amines présents dans des aliments comme la viande, les saucisses et le fromage, le nitrite peut former des nitrosamines cancérigènes. En Suisse, les saucisses de Vienne peuvent contenir jusqu’à 150 mg/kg de nitrite. Aucun échantillon de notre panel n’a dépassé cette valeur et aucune trace de nitrosamines n’a été détectée.
Qualité microbiologique
Enfin, nos experts se sont intéressés à d’éventuelles traces de germes et d’agents pathogène, tels que la listériose, les staphylocoques, le Clostridium perfringens ou les entérobactéries Escherichia Coli.
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Véritables pochettes-surprises
L’Union professionnelle suisse de la viande propose certes une recette de wienerlis à ses membres en suggérant notamment les ingrédients suivants: bœuf, porc, veau, lard et couenne. Mais, à défaut de réglementation en la matière, les fabricants peuvent faire ce qu’ils veulent et utiliser n’importe quelle viande dans leurs saucisses de Vienne.
Si on se fie à leurs déclarations, les saucisses de Vienne de la marque Bell seraient composées à 30% de porc et 24% de bœuf et celles d’Alpina, à 44% de porc et 5% de bœuf. Neuf échantillons testés ne contiennent aucune indication à ce sujet, si ce n’est qu’il s’agit de viande suisse. Seul Coop précise que la viande utilisée pour son label Prix Garantie provient d’Allemagne et d’Autriche.
Migros et Denner admettent, eux aussi, se fournir à l’étranger pour les enveloppes de boyaux de leurs saucisses, ce qui est autorisé en Suisse. Pour Denner, ce procédé se justifierait en raison de la petitesse de notre marché national.