Avant d’embarquer dans l’avion, une fois s’être docilement soumis aux fastidieux contrôles de sécurité, la visite au «duty free shop» constitue, pour certains, un passage obligé. Concurrencées par le train sur les courtes distances, les compagnies d’aviation ne cessent de vanter les bonnes affaires à portée de tout voyageur avisé. C’est souvent vrai. Mais il est erroné de faire ses achats les yeux fermés, en pensant que les boutiques hors taxes sont systématiquement moins chères que les grandes surfaces. C’est ce que montre notre comparatif réalisé au début du mois de juin sur une quinzaine de produits courants vendus franco de taxes au duty free de l’aéroport international de Genève.
Premier constat, les accros à la clope y sont choyés, assurés de se fournir à très bon compte. Pour les trois best-sellers que nous avons sélectionnés, il n’y a pas photo. Par rapport à Coop et à Denner, les cartouches y sont quasiment vendues à moitié prix. Même un discounter comme Aldi accuse un écart de 65% avec le duty free. Rien d’étonnant, sachant que les taxes sur le tabac constituent près des deux tiers du prix final, soit environ 5 fr. pour un paquet vendu 8 fr. C’est d’ailleurs un motif récurrent de courroux des associations de lutte contre le tabagisme qui voudraient bannir le tabac des boutiques hors taxes.
Champagne moins cher en ville
Au rayon des alcools forts (plus de 15 degrés), les différences sont déjà plus floues. Pour les grands «classiques», le duty free fait le plus souvent la course en tête. Il faut savoir que, contrairement aux commerces traditionnels, il n’a pas à s’acquitter ni de la TVA (8%) ni de la taxe sur l’alcool qui se monte à 8.12 fr. pour une bouteille de spiritueux de 70 cl à 40 degrés. Ainsi, il propose le litre de Bacardi Carta Blanca à seulement 17.90 fr. alors que le flacon de 70 cl vaut 18.45 fr. (soit 26.35 fr./l) à Denner et 19.25 fr. (27.50 fr./l) à Coop.
Mais pour le whisky Johnnie Walker, Black Label, la différence, bien que sensible, n’est déjà plus que de 23% avec Coop et Manor. Ensuite, l’écart se creuse légèrement, mais à l’avantage de Denner et de Coop, cette fois, pour le whisky Glenfiddich Single Malt (12 ans). De même, lorsqu’on s’intéresse au champagne Moët et Chandon, on s’aperçoit que les prix se tiennent à quelques centimes près, avec un léger avantage pour Denner et Manor. Et ce, quand bien même la boutique de l’aéroport n’a pas de TVA à acquitter sur ce produit.
L’aéroport est aussi un centre commercial
Au rayon des parfums et cosmétiques, le duty free tire légèrement son épingle du jeu. Toutes les eaux de toilette de notre sélection y sont vendues meilleur marché que chez Manor et Marionnaud. Les écarts dépassent toutefois rarement quelques francs, à l’exception de Terre d’Hermès. La suprématie des boutiques hors taxes n’est toutefois pas absolue. Une vendeuse de Marionnaud nous a confié que certains articles étaient moins chers en ville. Par ailleurs, pour les adeptes des achats en ligne, il y a souvent des bonnes affaires à réaliser. Ainsi, parmi notre petit échantillon, deux eaux de toilette sont proposées à meilleur compte sur le site d’achat en ligne 1000parfums.ch.
Enfin, à titre illustratif, nous avons également comparé le prix d’un article normalement taxé, tel que le Toblerone, lait, 100 g. Celui-ci est vendu 2.50 fr. au duty free, soit nettement plus cher que chez Denner, Coop et Manor où il est proposé à 1.75 fr.
De l’aveu même de Bertrand Stämpfli, porte-parole de l’aéroport, hormis les produits hors taxes – à savoir les spiritueux, mousseux, tabacs, parfums et cosmétiques –, tout le reste est généralement «un peu plus cher» au duty free que dans les commerces traditionnels, même si la consigne est de «s’aligner le plus possible sur les prix en ville». Il rappelle que l’aéroport est aussi un centre commercial qui fournit la moitié des recettes non aéroportuaires du site. Et de souligner que, sans ces revenus, le billet d’avion coûterait sensiblement plus cher...
Philippe Chevalier / pg
CONFUSION
Un cognac incomparable…
Initialement, notre comparatif comprenait une bouteille de Rémy Martin VSOP. Or, après 40 ans de bons et loyaux services, le fabricant a légèrement modifié la formule et l’emballage de son produit phare. Du coup, c’est la confusion. A Denner, où nous nous sommes rendus, l’ancienne boîte trône toujours sur les étalages, mais c’est le nouveau produit (mature cask finish) qui est remis à la caisse. Manor nous assure vendre l’ancienne version, alors que c’est la nouvelle. Enfin, au duty free, il apparaît que la bouteille «Premier cru» est un produit exclusif, introuvable dans les magasins traditionnels. Et donc incomparable, évidemment...