«Un ménage type paiera 20.2 ct. par kilowattheure (ct./kWh) en 2017, ce qui correspond à une réduction de 0.4 ct./kWh, soit une baisse de 2%.» A priori, le communiqué de la Commission fédérale de l’électricité a de quoi réjouir. Pourtant, tous les foyers ne verront pas leur facture s’adoucir. C'est ce que montre notre comparatif des distributeurs approvisionnant dix communes romandes au moins.
En examinant le tarif H4 – qui correspond à un ménage type consommant 4500 kWh par an – on constate que certaines régions paieront plus cher leur courant en 2017 qu’en 2016. C’est vrai pour toutes les zones desservies par le géant bernois BKW: la grande majorité des communes du Jura, du Jura bernois ainsi qu’une partie du territoire neuchâtelois. Les localités alimentées par les Services industriels de Lausanne subiront également une légère hausse (+0,6%).
Etonnament, BKW est non seulement celui qui majorera le plus ses tarifs en 2017 (+2,16%), il est aussi celui qui affiche les tarifs actuels les plus élevés (25.42 ct./kWh). A contrario, Sierre Energie, aujourd’hui le plus attractif (15.47 ct./kWh), fera baisser encore la note de
6,7% l’an prochain!
Ecart de 79,8%!
Ce phénomène trahit le fossé grandissant entre le prix facturé par les gestionnaires de réseau électrique. En 2009, l’écart entre le moins cher (Sierre Energie toujours!) et le plus onéreux (Forces électriques de La Goule) se montait à 5.9 ct./kWh. En 2016, la différence atteint
9.9 ct./kWh pour grimper encore à 11.5 ct./kWh l’an prochain.
Le hic, c’est que les foyers ne peuvent pas choisir leur fournisseur, contrairement aux entreprises dont les besoins sont supérieurs à 100 000 kWh par an. Par conséquent, la majorité des ménages bernois, jurassiens et une partie des neuchâtelois auront une facture annuelle 79,8% plus élevée que les foyers valaisans reliés à Sierre Energie: 1168 fr. contre 650 fr. pour une consommation de 4500 kWh!
Certaines communes ont néanmoins développé d’autres stratégies pour que le courant soit plus attractif sur leur territoire. C’est le cas de trois communes du Jura (Develier, Delémont, Courchapoix) et de six du Jura bernois (Moutier, Tramelan, Saint-Imier, Nods, Lamboing et La Neuveville) qui gèrent en commun la Société d’approvisionnement et de commerce de l’énergie (Sacen). Cela leur permet de négocier l’achat d’électricité sur le marché. Résultat: un ménage de Develier paiera 18.69 ct./kWh en 2017 contre 25,56 ct./kWh pour ses voisins de Boécourt liés à BKW…
Interrogé sur sa politique tarifaire, BKW répond qu’il n’est pas possible de comparer les prix entre les fournisseurs. «BKW couvre la demande de ses clients au moyen de sa propre production. Or, l’électricité se négocie à des prix très bas sur les marchés internationaux, ce qui avantage les distributeurs qui ne disposent pas d’un grand parc de production propre. Ce n’est pas le cas de BKW», justifie son porte-parole Gilles Seuret.
Coup de frein en 2018
En tous les cas, les choses pourraient bouger en 2018. Un récent arrêt du Tribunal fédéral ne rendra plus possible les subventionnements croisés pratiqués par certains fournisseurs. En résumé, ils ne pourront plus réserver l’électricité bon marché aux grandes entreprises et facturer le kWh au prix fort aux ménages captifs. Et ces derniers, qui auraient dû être libres de choisir leur distributeur dès 2018 devront patienter: le Conseil fédéral a repoussé l’ouverture complète du marché de l’électricité sans fixer de nouvelle échéance. A suivre...
Yves-Noël Grin