La réputation de l’huile d’olive a été passablement ternie, ces derniers mois. En Italie, sept grandes marques vendaient de l’extravierge qui n’avait pas les qualités requises, alors que des tests ont révélé la présence de nombreuses substances indésirables en Allemagne. Pourtant, presque toutes les bouteilles vendues dans les supermarchés suisses sont étiquetées «extravierge», soit la plus haute catégorie. Et cela à des prix allant de 4 fr. à 27 fr. le litre.
Pour savoir ce qu’il en est vraiment, nous avons fait analyser seize huiles d’olive extravierge parmi les plus vendues. L’objectif était de déterminer la présence de substances problématiques (lire encadré) ainsi que leur qualité réelle.
Des résidus peu reluisants
Comme le montrent nos résultats, les flacons contiennent tous des substances indésirables. Certes, celles-ci ne présentent pas de risque immédiat pour la santé lorsqu’elles sont considérées séparément et les quantités mesurées assez faibles. Mais la multitude de substances décelées dans certaines bouteilles n’en est pas moins inquiétante.
Dans dix produits, les experts ont trouvé à la fois des résidus d’hydrocarbures, de pesticides et de plastifiants. Les études manquent encore quant aux interactions – le fameux «effet cocktail» – entre ces divers éléments lorsqu’ils sont mélangés. Il n’empêche, moins il y en a, mieux c’est. Nous avons ainsi attribué nos notes en fonction du nombre de substances trouvées. Attention toutefois: une huile propre du point de vue chimique n’a pas obligatoirement un goût excellent, comme l’a montré une dégustation de Bon à Savoir en 2013*.
indicateur de qualité
Dans l’ensemble, aucune valeur limite européenne n’a été dépassée. Mais la législation est un compromis qui fixe des exigences standard et non pas un niveau élevé de qualité. Un exemple? Les alkyles esters. Ces marqueurs de dégradation sont de bons indicateurs de qualité (lire encadré). De l’huile d’olive extravierge produite avec soin n’en contient, après pressage, que 10 à 15 milligrammes (mg) par kilo. En Europe et en Suisse, les limites sont pourtant fixées à 75 mg/kg!
Onze flacons en avaient moins de 20 mg/kg, prouvant qu’il est possible de faire bien mieux que les limites légales. De fait, nous avons infligé un point de pénalité lorsque le résultat dépassait 20 mg/kg et deux points au-delà de 35 mg/kg. La Bertolli, dernière du classement, en contient presque 45 mg/kg. La Naturaplan vendue par Coop a, de surcroît, été dépréciée d’un demi-point, parce qu’elle renfermait presque quatre fois plus de DEHP que la moyenne des autres huiles. Ce phtalate, utilisé pour assouplir le plastique, est susceptible d’altérer la fertilité humaine.
Les réactions des fabricants
Aldi, Lidl, Coop, Migros, Sabo, Deoleo et De Cecco nous ont répondu que leurs produits respectent les normes suisses et européennes et peuvent être consommés sans risque. Filippo Berio a écrit qu’il n’existe pas de limites contraignantes pour les résidus de plastifiants dans l’huile d’olive et que les quantités trouvées sont faibles. Aldi précise que la Castello a été retirée de l’assortiment. De son côté, Denner nous a rétorqué que «lorsque des valeurs limites sont fixées, elles sont respectées».
Migros dit vouloir éclaircir la présence des plastifiants avec ses fournisseurs. Coop affirme avoir demandé des explications à ses partenaires et exigera désormais des certificats d’analyse à chaque récolte. Enfin, selon Deoleo, les plastifiants se retrouvent dans de nombreuses autres denrées alimentaires et les valeurs trouvées sont faibles.
Bonus web: Comment choisir son huile d’olive
Andreas Schildknecht / seb
En détail
Les critères du test
Le laboratoire a analysé les seize huiles selon les critères suivants.
1. Teneur en alkyles esters
Ce sont des indicateurs de qualité. On les retrouve en quantités élevées lorsque le fabricant utilise des olives abîmées ou trop mûres.
2. Résidus d’hydrocarbures
Les experts ont trouvé deux catégories d’hydrocarbures saturés: les MOSH et les POSH. Les études manquent sur ces derniers. Les MOSH peuvent migrer dans les organes. Chez les rats, cette situation a provoqué des inflammations du foie. Les sources possibles: gaz d’échappement des machines de récolte, lubrifiants des installations de production, matériel d’emballage, etc.
3. Traces de pesticides
Parmi les substances trouvées, le chlorpyrifos, le phosmet et la deltaméthrine servent à tuer les insectes. L’oxyfluorfen est un herbicide, alors que le tebuconazole détruit les champignons. Ils peuvent avoir des effets négatifs sur les humains, la faune et la flore.
4. Résidus de plastifiants
L’industrie utilise des phtalates pour rendre les plastiques plus souples. Certains d’entre eux sont soupçonnés d’être cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques.