Vous en avez peut-être fait l’étonnante expérience. De l’autre côté du Röstigraben, croyant bien faire, vous avez baragouiné quelques mots d’allemand. Et vous avez eu la surprise d’entendre votre interlocuteur, amusé ou dédaigneux, vous répondre en français. «Pour nous autres Alémaniques, l’allemand est la langue administrative. Il ne me viendrait pas à l’idée de le parler avec mes amis ou à mon chat», résume Rose Bader, professeur de schwitzerdütsch.
Qu’on se le dise, nos voisins apprécient qu’un Welsche fasse l’effort de s’essayer, même maladroitement, à leur dialecte. Las, les Romands sont peu enclins à l’apprendre. A l’Université de Lausanne, par exemple, 113 étudiants seulement s’y sont intéressés sur les 6000 élèves qui ont suivi les cours du Centre de langues en 2013-2014. Du côté de l’Ecole-club Migros, moins de 2% des participants aux cours de langue l’ont abordé. «C’est vraiment un marché de niche, résume Christophe Cattin, directeur d’Avenir Formation, une école basée dans le Jura.
Jacqueline Scarone, directrice de la Wessex Academy, le déplore: «L’allemand et le suisse allemand sont des langues primordiales pour trouver du travail en Suisse et collaborer. Si les Romands se donnaient la peine d’apprendre le schwitzerdütsch, cela leur ouvrirait des portes supplémentaires.» Attention toutefois: ne s’initie pas qui veut! Des connaissances élémentaires d’allemand (niveau A1 ou A2) sont généralement requises.
Les prix des cours
En terres romandes, une simple recherche sur internet montre qu’il existe des possibilités relativement nombreuses de s’initier aux dialectes d’outre-Sarine. Certaines Ecoles-club Migros et Universités populaires (UP) ainsi que pas mal d’écoles privées l’enseignent, du moins les bases.
Les prix sont très variables. Quelques exemples: à l’Ecole-club Migros, ils peuvent différer selon les lieux, la durée, le niveau et le nombre admis de participants. Un cours en soirée pour débutants, comprenant 10 séances de 100 minutes, coûte 480 fr., soit 28.80 fr. l’heure. L’objectif? Etre capable de comprendre et d’utiliser des phrases simples dans des situations de tous les jours. L’UP de Lausanne propose un cours d’introduction de 16 périodes de 45 minutes, dispensé en quatre séances, avec dix personnes au maximum, pour 290 fr., soit 24.15 fr. l’heure.
Les leçons privées sont évidemment plus chères. A la Wessex Academy, qui propose aussi des versions collectives (de 27.25 fr. à 32.70 fr. l’heure en cours du soir), les 60 minutes sont facturées 110 fr., un tarif dégressif selon le nombre de périodes suivies et de participants. Avec trois personnes, il descend à 45 fr. par élève.
Il existe aussi des modules très spécifiques, par exemple pour l’environnement professionnel (business coaching). L’Espace Allemand de Lausanne propose un package de 20 cours, avec déplacement du formateur à domicile ou sur le lieu de travail pour 130 fr. l’heure.
Approche multidialectale
Le suisse allemand étant composé d’une pléthore de dialectes, l’approche pour les débutants est le plus souvent multidialectale. «Je montre d’abord les différences entre l’allemand et le suisse allemand et, ensuite, entre les dialectes. Les élèves parlent, après, comme eux l’imaginent, inventent leurs variantes. C’est une langue orale très flexible», explique Rose Bader.
Cette vision est partagée en partie par Sabrina Gerhartl, enseignante au Centre de langues de l’Université de Lausanne: «L’objectif est de comprendre rapidement plusieurs dialectes. Par contre, les élèves qui veulent aussi apprendre à parler choisissent normalement un seul d’entre eux. Je leur propose le zurichois ou le bernois, mais nous utilisons aussi du matériel audio avec d’autres variantes.» Ils écriront ensuite à leur manière, puisque la transcription écrite du schwitzerdütsch n’est pas standardisée.
Sébastien Sautebin
Dans le détail
Quelques bouquins
Si vous désirez vous initier au suisse allemand tout seul, il existe quelques livres. Parmi eux, le Hoi! Et après. Manuel de survie en suisse allemand (Bergli Books, 29.80 fr.). Il ne s’agit cependant pas d’une méthode, mais d’un petit guide de conversation qui dépanne avec quelques phrases utiles. Un bouquin assez humoristique, truffé d’illustrations, qui joue beaucoup sur la culture alémanique. Dans la même catégorie, on trouve aussi Le suisse alémanique de poche (Assimil France 13.50 fr.), plus classique. Pour une méthode plus complète, on peut s’orienter vers le Chunsch druus? (Schulverlag, 58 fr.), rédigé en allemand, qui comprend un livre, quatre CD, un DVD ainsi qu’un support en ligne. L’objectif de l’ouvrage? Comprendre aussi vite que possible le schwitzerdütsch!