C’est l’histoire d’un retraité comblé, qui a rencontré l’âme sœur peu avant de rendre son tablier. Cet ancien cadre syndical, appelons-le Robert, avait alors dûment signalé sa partenaire à la caisse de pension. Tous les feux étaient au vert, puisque cette dernière prévoyait une rente pour les concubins ayant vécu ensemble cinq ans au moins avant le décès.
Dix ans plus tard, Robert reçoit un courrier l’informant d’une modification du règlement de l’institution. C’est la douche froide: les conditions d’octroi de la rente de partenaire ont changé. Désormais, seuls les couples ayant vécu ensemble 5 ans avant la retraite y ont droit! Si Robert décède avant son amie, elle ne touchera donc rien.
Les caisses de pension sont, en effet, libres de reconnaître les survivants non mariés, à condition de respecter le critère de «communauté de vie au moins avant le décès». Elles peuvent prolonger ce délai en plaçant le curseur cinq ans «avant la retraite».
Les institutions qui tentent de limiter les frais par ce biais sont toujours plus nombreuses. Une minorité d’entre elles ne reconnaissent pas les partenaires non mariés, et celles qui le font restreignent les conditions pour éviter de servir, pendant de longues années, une rente à une compagne beaucoup plus jeune que le défunt, ou l’inverse.
Il est nécessaire de prévoir des prestations réalistes, mais la prévoyance professionnelle ne sort pas gagnante de coups de canif donnés en catimini pour fabriquer une vieillesse à deux vitesses. Il y a les concubins qui touchent une rente et les autres. Il y a les salariés qui rendent leur tablier à 60 ans et ceux qui triment jusqu’à 65 ans, même sur les chantiers. Il y a des employés de l’Etat qui descendent encore dans la rue pour défendre des acquis devenus improbables dans l’économie privée et, pour les regarder passer, des femmes en situation précaire qui n’ont jamais pu se constituer un 2e pilier.
Pour donner sa chance à la réforme des retraites qui est au menu du nouveau Parlement, il est urgent de renforcer le 1er pilier pour restaurer la confiance de la population.
Claire Houriet Rime