La Suisse, qui prétend sortir du nucléaire d’ici à 2034, a pris beaucoup de retard avec les énergies renouvelables et l’électricité photovoltaïque en particulier. L’affaire est pourtant intéressante pour les propriétaires, sachant que la Confédération rachète à un prix très favorable ce type de courant réinjecté dans le réseau, par le mécanisme de la rétribution à prix coûtant (RPC). Actuellement le tarif, pour les privés, varie entre 33.1 ct. et 42.8 ct. le kilowattheure (kWh), alors qu’il est vendu autour de 20 ct. sur le marché. A cette subvention confédérale s’ajoutent des aides fiscales cantonales qui raccourcissent d’autant la durée de l’amortissement de l’installation.
Nous avons ainsi calculé la rentabilité de quatre installations photovoltaïques destinées à un usage privé, occupant une surface de panneaux comprise entre 25 m2 et 70 m2, en laissant sciemment de côté la production d’eau chaude par capteurs thermiques. Pour le volet fiscal, nous avons fait une simulation basée sur un couple fribourgeois, sans enfant, disposant d’un revenu annuel de 130 000 fr. (voir tableau*) d'une fortune de 80 000 fr. et d’une maison consommant en moyenne 3500 kWh.
Épineuse question fiscale
Notre équation intègre le prix de l’installation, les coûts d’entretien ainsi que la revente des kWh sur la base des tarifs fixés pour les petits producteurs (jusqu’à 10 kW), avec des capteurs installés (et non intégrés) sur la toiture. Reste la question fiscale qui varie énormément d’un canton à l’autre. Tous permettent désormais de déduire (en une fois) le prix de l’installation du revenu, au titre de frais d’entretien. Attention, les bâtiments neufs, par définition, n’en bénéficient donc pas!
En revanche, les bénéfices obtenus grâce à la revente d’électricité sont considérés comme un revenu immobilier. A ce titre, ils sont imposés dans leur totalité dans les cantons de Genève et de Vaud, dès lors qu’ils dépassent la consommation personnelle. Moins gourmands, les fiscs de Fribourg et de Neuchâtel se contentent de taxer le surplus de production, déduction faite de la consommation personnelle, alors que le Valais accorde un abattement pour les 10 000 premiers kWh et que le Jura renonce, pour l’heure, à cette imposition.
«Découragement fiscal»
En définitive, au bout de 25 ans, soit la durée pendant laquelle la Confédération rachète le courant à un prix favorable, les propriétaires qui «carburent» au soleil ont largement remboursé leur installation et dégagent même un bénéfice confortable. Selon le scénario que nous avons élaboré, l’investissement offre ainsi des rendements de l’ordre de 2% à 2,5%, et c'est compter sans la satisfaction de produire du «courant vert». C’est moins vrai dans les cantons de Vaud et de Genève, où le fisc donne d’une main, mais reprend de l’autre. En effet, selon notre scénario, notre couple de Genevois obtiendra, pour une installation de 40 m2, un rabais fiscal de 7095 fr. pour son installation, mais devra s’acquitter de 16 325 fr. dans les 25 ans à venir, au titre de revenu immobilier!
A terme, la hausse prévisible du prix du kWh plaide pour la production d’électricité «maison». Malheureusement, l’incertitude règne quant au subventionnement du photovoltaïque. Le système actuel étant critiqué de toutes parts, la Confédération envisage d’exclure les petits producteurs de la RPC. Ces derniers, en compensation recevraient une subvention unique (on parle de 30%) à l’investissement. A suivre…
Philippe Chevalier
*Bonus web:l’énergie solaire et les impôts
Pour télécharger le tableau comparatif, se référer à l'encadré au-dessous de la photo.