Une Genevoise âgée nous a confié son étonnement lorsque, après de longues années sans histoires, sa régie a tenté de modifier son contrat de bail afin de récupérer l’appartement à son décès – à la place de ses enfants. A force de persuasion et après quelques petites rénovations concédées par la régie, notre lectrice a fini par céder et signer la modification de son contrat.
Elle s’est cependant dite choquée de voir la régie attendre son décès avec autant d’impatience, afin de pouvoir augmenter le loyer pour de futurs locataires. S’il est vrai qu’hériter d’un loyer supplémentaire est souvent perçu comme un fardeau, il en va autrement en ville de Genève, où le marché du logement est extrêmement tendu.
A la suite de cette mésaventure, nous avons demandé son avis à l’Association suisse des locataires (Asloca). François Zutter, avocat répondant de l’Asloca Genève, nous a d’abord confirmé que cette pratique n’était malheureusement pas isolée et que plusieurs régies du canton en faisaient de même: «Ce procédé n’est pas correct, car les régies demandent aux locataires de renoncer à un bail au nom de quelqu’un d’autre, à savoir leurs héritiers.»
Le droit de refuser
Même si la régie tente d’intimider le locataire, elle ne peut en aucun cas le contraindre d’accepter une telle modification. «Paradoxalement, en cas de refus, le locataire sera même mieux protégé. En effet, si le bail devait être résilié par la suite, il pourrait contester cette décision en invoquant qu’il s’agit d’une tentative de représailles», explique François Zutter.
Il ne faut toutefois pas se braquer d’emblée à la réception d’une proposition de résiliation au décès. L’avocat genevois indique, en effet, que, si aucun futur héritier ne veut de l’appartement, un tel accord leur retirera une belle épine du pied (lire encadré). Et c’est aussi l’occasion pour le locataire de négocier le bail à son avantage: «La personne âgée peut profiter de la proposition du bailleur pour imposer ses conditions. Par exemple, en faisant préciser sur le nouveau contrat que le bail ne sera pas résilié jusqu’à son décès.»
Le spécialiste rappelle encore quelques précieux conseils pour ne pas se faire piéger par sa régie: «Il faut toujours se montrer prudent, car une signature peut se révéler lourde de conséquences. Lorsque le bailleur fait une demande de modification par oral, le locataire devrait toujours demander de recevoir la proposition par écrit. Et, dans tous les cas, il faut prendre le temps de la réflexion.»
Enfin, pour qu’une modification du bail soit valable, il faut qu’elle respecte les formes légales, comme pour une résiliation. A savoir:
- l’utilisation du formulaire officiel agréé par le canton;
- le respect de la prochaine échéance du bail et du délai de préavis.
Si tel n’est pas le cas, la modification n’aura tout simplement aucune valeur.
Yves-Alain Cornu
CONSEILS PRATIQUES
Se départir d’un bail hérité
Au décès d’un locataire, ce sont les héritiers qui reprennent l’appartement. Cela peut être une aubaine, mais parfois aussi un véritable fardeau, lorsque personne n’a d’intérêt pour ce logement. Dans ce cas, une résiliation extraordinaire sera demandée: la location peut être interrompue pour le prochain délai légal, moyennant un préavis de trois mois, quels que soient le délai de congé et l’échéance fixés sur le contrat.
Il est également possible de procéder à une résiliation anticipée, en proposant un locataire convenable. Il est possible de procéder à cette résiliation à tout moment, moyennant un délai d’un mois pour la fin d’un mois (afin de permettre au bailleur de vérifier la solvabilité du remplaçant).