Le 3e pilier a est fiscalement intéressant, puisque les versements annuels effectués sont déductibles du revenu imposable à hauteur d’un montant maximal défini tous les deux ans par la Confédération (6739 fr. en 2013). Sans compter qu’il représente un bon moyen de combler les lacunes du 1er et du 2e piliers, lesquels ne permettent pas de subvenir aux besoins de nombreuses personnes une fois l’âge de la retraite atteint. Les vendeurs d’assurances n’hésitent d’ailleurs pas à user de ces deux arguments auprès des jeunes clients pour leur faire souscrire une assurance vie dans le cadre du 3e pilier lié.
Toutefois, il y a lieu de réfléchir sur l’opportunité d’un tel placement à cet âge, sachant qu’on s’engage pour plusieurs dizaines d’années. Or, qui, à 25 ans, est capable de prédire ce qu’il fera dans 40 ans?
Rachat à perte
C’est à cet instant précis du questionnement que les courtiers sortent leur arme secrète: la possibilité de racheter le contrat d’assurance vie avant son échéance. Sans préciser, évidemment, qu’une telle opération, que la loi oblige de proposer, se fait presque toujours à perte si l’on s’en tient aux valeurs de rachat garanties, comme le démontre notre tableau comparatif.
Pour contrer cet excès de pessimisme, les compagnies font miroiter des chiffres autrement plus mirobolants, grâce aux éventuelles participations aux excédents. Exemple: avec la participation possible au surplus de rendement, le capital final de SwissLife en cas de vie passe de 151 032 fr. à 181 822 fr. et celui d'Axa Winterthur de 158 218 fr. à 189 412 fr. Mais l’expérience montre que ces projections sont exagérément positives et que le résultat final correspond plus souvent au minimum garanti.
Comparaison à l’appui
Comparons dès lors ce qui peut l’être sans risque de se tromper et retenons le scénario d’un homme de 40 ans, né en mars 1973, qui conclut, aujourd’hui, une assurance vie mixte (en cas de décès, les proches touchent une somme unique de 150 000 fr. environ, quel que soit la période du contrat). A cette fin, il verse une prime de 6000 fr. le 31 mai de chaque année, 25 ans durant (donc jusqu’en 2038). Le tableau ci-contre résume la situation.
La première année (soit entre le 1er juin 2013 et le 31 mai 2014 dans notre exemple), aucun rachat n’est possible.
A la fin de la deuxième année (nous fixons volontairement notre pointage le 31 décembre pour lever toute équivoque), alors que l’assuré a déjà versé deux fois la prime (12 000 fr.), la valeur de rachat (également calculée sans excédents) varie de 0 fr. à 3499 fr., soit à peine 30% de l’investissement dans le meilleur des cas.
SwissLife est particulièrement avare en la matière, ce qui ne se remarque qu’en lisant les petites lettres du contrat, lesquelles précisent que la compagnie ne garantit que 80% des valeurs indiquées dans le tableau récapitulatif. Elle a beau assurer que c’est un seuil minimal et que la valeur sera certainement plus élevée, nous avons, dans le cadre de notre comparatif, d’ores et déjà ramené ces valeurs au minumum garanti.
Au fil des ans, cette différence s’amoindrit, mais, même dans la dernière année de cotisations (soit entre le 1er juin 2037 et le 31 mai 2038 dans notre exemple), il n’y a que à Axa Winterthur qu’on retrouvera un peu plus que ses billes. Et encore, pour autant que les cotisations restent à 6000 fr./an, car cette compagnie se réserve le droit, en fonction de la fluctuation des taux, de les augmenter jusqu’à 6041 fr./an en cours de contrat. Du coup, dans le pire des cas, le montant des cotisations se montera à 151 025 fr. et, comme partout ailleurs, la valeur de rachat sera inférieure aux primes payées.
Ce n’est donc qu’en poursuivant son contrat jusqu’au bout qu’on peut espérer un résultat positif, soit le capital garanti en cas de vie, ce qui représente un bénéfice variant de 245 fr. (Helvetia) à 8218 fr. (Axa Winterthur).
Sur 25 ans, ce capital représente un rendement garanti de 0,0125% (!) dans le premier cas et de 0,41% dans le deuxième.
Préférer l’assurance vie «risque pur»
Sachant que le rendement d’un compte bancaire 3a varie aujourd’hui entre 1,25% et 1,75%, un même placement aurait rapporté entre 27 000 fr. et 39 500 fr., tout en profitant des mêmes avantages fiscaux. Et encore, ces taux ont rarement été aussi bas!
Le bénéfice laisse donc largement de quoi se payer une assurance vie «risque pur» (environ 500 fr./an pour un capital de 200 000 fr. selon notre comparatif de 2011), tout en faisant un confortable bénéfice par rapport à la solution de l’assurance vie mixte. CQFD.
Christian Chevrolet