Les caisses maladie rivalisent d’imagination pour aller piquer les assurés à la concurrence, garder les leurs ou imposer leur façon de faire. Petit florilège, entre «pas du tout» et «juste» légal, rapporté par nos lecteurs.
Résiliation refusée
Mauvaise expérience pour Sébastien Pencenat. Travaillant non loin du siège lausannois de La Caisse Vaudoise, il y apporte directement la lettre de résiliation de sa femme. Refus de l’employé: «Notre direction exige que les résiliations soient transmises par courrier postal.»
Directive confirmée par Jean-Michel Bonvin, porte- parole du Groupe Mutuel, dont dépend La Caisse Vaudoise, qui signale que les conditions générales d’assurances (CGA) l’ont ainsi prévu. Nul et non avenu, estime l’OFAS, puisque la loi ne dit rien à ce sujet: un assuré peut donc très bien, pour autant que les bureaux soient ouverts, apporter sa résiliation «en main propre», même le 30 novembre (ultime délai) et exiger un reçu comme preuve d’avoir agi dans les délais.
Clients défavorisés
Le Groupe Mutuel, qui regroupe 16 caisses, fait également très fort avec son site Internet: il sélectionne automatiquement la caisse du groupe la plus avantageuse en fonction de l’âge et du lieu de domicile de l’internaute, sans la désigner. La prime varie en effet selon la caisse d’origine. Ainsi, un lecteur jurassien de 1971 s’est vu proposer une prime de 117 fr. lorsqu’il disait venir d’Helsana, mais de 135 fr. s’il avouait venir de La Caisse vaudoise. Et il en va de même avec toutes les caisses du groupe...
«C’est la politique de la maison, explique Jean-Michel Bonvin: nous laissons nos assurés là où ils sont et ne leur proposons pas de passer dans l’une de nos caisses plus avantageuses.» En d’autres termes: on fait l’effort nécessaire pour aller piquer les assurés à la concurrence, mais que ceux qui sont chez nous se contentent de ce qu’ils ont...
Trop vieux!
Surprise de Daniel Haus lorsqu’il tente de demander une offre pour l’assurance de base sur le site Internet de Progrès. Après avoir entré les informations d’usage, dont la date de naissance, le programme refuse d’afficher les primes. Motif (imprimé en rouge sur l’écran): aucune proposition ne peut être établie si l’âge dépasse 65 ans... Est-ce légal, demande notre lecteur?
Bien sûr que non, répond sans hésitation l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS), puisque la loi interdit les réserves dues à l’âge pour l’assurance de soins obligatoire (base). Ce qui ne fait même pas sourciller Christian Beusch, porte-parole de Progrès: puisque «nous précisons que l’internaute peut nous contacter pour obtenir d’autres offres». Et si vous rétorquez qu’il s’agit alors d’une intolérable dissuasion, le représentant de Progrès semble sincèrement affligé d’un jugement aussi péremptoire!
Assurance imposée
Sylvain Mange a d’excellentes dents. Aussi son père n’a-t-il guère apprécié que Helsana ajoute, sans qu’il n’ait rien demandé, et surtout sans un mot d’information ou d’explication personnel, une police d’assurance dentaire. En bas de page, on peut lire: «Si la teneur de la police ou des avenants ne concorde pas avec les conventions intervenues,
le preneur d’assurance doit
en demander la rectification dans les 4 semaines à partir de la réception de l’acte, faute de quoi, la teneur est considérée comme acceptée.»
Le comble, c’est que ce tour de passe-passe est tout à fait admis par l’Office fédéral des assurances privées (OFAP). Une personne inattentive peut donc se retrouver avec une assurance complémentaire en plus, sans n’avoir jamais rien demandé ni rien signé! Et une fois encore, Christian Beusch, également porte-parole de Helsana, ne voit pas où est le problème: «Nous faisons ainsi pour tous nos assurés de 11 à 17 ans bénéficiant d’une assurance complémentaire, sachant que 80% d’entre eux approuvent notre démarche. Et s’ils n’en sont pas informés personnellement, ils ont dû le lire dans Plus, la brochure d’information jointe à la police.» Vivent la pub et le droit privé!
Prime obligée
Plus inadmissible encore: en guise d’avis de prime, Helsana a envoyé à Pierre Capt une nouvelle police avec une franchise de 1200 fr., alors qu’il avait jusqu’alors une franchise minimale de 230 fr.
«Nous faisons ainsi pour tous les assurés qui passent de la catégorie “Jeune” à “Adulte”, explique l’inébranlable porte-parole de Helsana, de façon à réduire la forte augmentation que cette transition engendre.» Et, une fois encore, l’information est à chercher dans la brochure Plus... Toutefois, comme il s’agit ici de l’assurance de base, et donc de droit public, c’est à l’OFAS de trancher: illégal, décrètent ses représentants, qui rappellent que seul l’assuré est en droit de choisir sa franchise.
Christian Chevrolet