Rien n’arrête l’industrie du tabac pour attirer les jeunes consommateurs dans ses filets. En dépit de leurs dénégations faussement outragées, Philip Morris et consorts ne savent que trop bien que, plus on commence à fumer jeune, plus on aura de difficulté à arrêter, à l’âge adulte.
Or, la dernière campagne de L&M met en scène trois jeunes adultes à la plage, bronzés, «lookés», alliant les plaisirs du bain et ceux de l’apéro dans une attitude décrite comme anticonformiste. La légende, opportunément placée à côté du paquet de clopes, en regard de la mention légale «Fumer tue», professe: «Défie la norme». Pour un ado qui se construit en s’opposant à l’ordre établi, le message est reçu cinq sur cinq!
Autre campagne, celle de Marlboro. Le vieux cowboy ne faisant plus rêver les jeunes générations, il a été remplacé par des anonymes juste sortis de l’adolescence. Depuis mai 2012, le cigarettier abreuve les pages people de 20 minutes et autres tabloïds en sermonant (en anglais, c’est plus cool) que les «Maybe never wins» ou que les «Maybe will never fall in love». Le message est ici que les «Maybe», littéralement les «peut–être», soit les timorés qui écoutent les conseils de prudence, sont des «losers». Les gagnants, eux, font fi de tous les dangers et fument, crânement, des Marlboro.
Ces deux exemples montrent que les autorités sanitaires sont toujours en retard d’une guerre. Non seulement leurs messages de prévention ont, par nature, peu de prise sur les ados qui sont la cible des cigarettiers, mais ces derniers récupèrent les mises en garde à leur profit pour les inciter à fumer! En Allemagne, la campagne «Be>Marlboro» a suscité un tollé, obligeant Philip Morris à faire machine arrière. En Suisse, rien: la voie est libre!
Philippe Chevalier