La rédaction et le Service juridique de Bon à Savoir sont quotidiennement approchés par des lecteurs qui regrettent d’avoir cédé aux pressions d’un vendeur insistant ou d’avoir répondu à un courrier leur promettant des gains mirobolants. Parmi ces victimes, force est de constater que les personnes âgées se trouvent surreprésentées. Elles sont certes une proie facile, car souvent à la maison. Mais elles ont aussi gardé l’habitude de… rester polies avec quiconque les appelle par téléphone ou sonne à la porte. Or, pour se débarrasser d’un vendeur insistant, il n’y a parfois pas d’autres moyens que de boucler le téléphone ou de refermer la porte. Dire oui pour «avoir la paix» est la pire des solutions, car cela équivaut à conclure un contrat. Un droit de révocation, dans un délai de sept jours, n’est prévu que pour le démarchage à domicile (voir ci-contre).
Un contrat conclu par une personne capable de discernement est valable, même si l’accord a été donné par oral (à la porte, au téléphone). Contrairement à une idée reçue, une signature n’est pas obligatoire dans le domaine de la consommation courante. Il est toutefois possible d’invoquer la nullité du contrat lorsqu’on a été victime d’une «erreur essentielle», c’est-à-dire, par exemple, lorsque la prestation ne correspond pas à ce qui a été promis (art. 23 et 24 du Code des obligations (CO). Le «dol», c’est-à-dire la tromperie, est aussi une circonstance qui permet d’annuler un contrat (art. 28 CO). Mais le problème, c’est que les fausses promesses sont généralement faites par oral et qu’il est, par conséquent, difficile d’en apporter la preuve.
Déloyal
Par ailleurs, le recours à des méthodes de vente agressives est contraire à la loi contre la concurrence déloyale (LCD). Mais, une fois de plus, lorsque les «boniments» du démarcheur sont prononcés oralement, cela pose le problème de la preuve. Et, lorsqu’ils sont consignés par écrit, comme c’est le cas pour les promesses de gain reçues dans sa boîte aux lettres (voir ci-dessous), il n’est pas non plus aisé de faire valoir ses droits. L’action en justice contre Brillant Versand soutenue par Bon à Savoir en est une criante illustration: trois ans après, elle n’a toujours pas abouti… (lire Bàs 4/2010.)
Courriers indésirables
On a gagné un concours, mais, pour toucher un gain mirobolant, il faut composer un numéro à valeur ajoutée qui alourdit sérieusement la facture de téléphone (par exemple les envois estampillés Friedrich Müller) ou encore passer commande d’un objet sur un catalogue. Ces fausses promesses de gain envahissent les boîtes aux lettres de bon nombre de nos lecteurs. Qui, lorsqu’ils ont la faiblesse d’y répondre, ne parviennent plus à stopper l’avalanche d’envois intempestifs.
D’autres sociétés (par exemple Atlas ou Meister) adressent des courriers publicitaires pour des produits apparemment sérieux, comme des collections de fiches ou de monnaies. Mais les clients en viennent alors à débourser des sommes considérables pour constituer des collections complètes. Sans compter ceux qui se retrouvent abonnés malgré eux, tout simplement parce qu’ils ont accepté de recevoir un «cadeau», sans remarquer qu’il ne s’agissait que d’un appât pour la conclusion d’un contrat.
Ces procédés peuvent souvent être qualifiés de trompeurs et de déloyaux. Mais les moyens d’action pour les faire cesser restent malheureusement limités (lire ci-dessus).
Démarchage à domicile
En recul par rapport à la vente par téléphone, le démarchage à domicile peut se révéler particulièrement agressif. Pour preuve, le cas, rapporté à Bon à Savoir, d’une dame de 88 ans qui a accepté d’équiper son appartement d’un système de sécurité coûtant 140 fr. par mois, pour une durée de cinq ans. Un modèle destiné aux entreprises, mais qu’un représentant sans scrupules n’a pas hésité à vendre à cette personne âgée vivant avec un petit budget.
Les marchands de produits de beauté et de bien-être sont également nombreux à sonner à la porte, après avoir pris contact par téléphone. Cette situation est aussi considérée comme du démarchage à domicile (au sens des art. 40 a et suivants CO), bien qu’un rendez-vous ait été fixé préalablement. Il n’en va pas de même pour les contrats conclus à la maison sur l’initiative du client, lorsqu’il a lui-même sollicité le vendeur.
En cas de démarchage à domicile portant sur des marchandises ou des services (à l’exclusion des assurances!) d’une valeur de plus de 100 fr., le consommateur dispose d’un droit de révocation de sept jours. Ce délai commence à courir dès que le contrat est conclu et que le client a été informé par écrit de son droit.
Dans la rue
Sont assimilés au démarchage à domicile, les commandes passées à l’occasion de voyages ou de soupers publicitaires ou encore sur la voie publique: rues, parcs publics, terrasses de café, halls des centres commerciaux. Ainsi, lorsqu’on cède, dans ce type d’endroits, au bagou d’un opérateur téléphonique ou d’un marchand de meubles, il faut prendre le temps de lire les conditions du contrat et, le cas échéant, le résilier dans les sept jours, de préférence par lettre recommandée.
Démarchage téléphonique
Le démarchage téléphonique est le procédé le plus dérangeant pour nos lecteurs, qui se trouvent fréquemment interrompus dans leurs occupations quotidiennes, voire pendant le repas ou la sieste. Les personnes âgées semblent être une cible de choix pour les vendeurs de produits de bien-être: matelas, coussins, gélules en tout genre, «gelée royale», etc.
Mais les appels proviennent surtout des sociétés pratiquant le démarchage téléphonique à grande échelle, principalement les conseillers en assurances et les opérateurs téléphoniques. Parmi ces derniers, certains n’hésitent pas à mentir en promettant au futur client qu’il restera chez Swisscom, alors que le contrat implique en réalité un changement d’opérateur. Sans parler des prestations «gratuites» qui deviennent soudain payantes sur le contrat écrit expédié quelques jours plus tard.
Après de nombreuses tergiversations, les parlementaires fédéraux ont admis qu’il fallait mettre un frein aux méthodes de vente agressives par téléphone: ils ont accepté le principe d’un droit de révocation de sept jours, sur le modèle du démarchage à domicile. Mais attention: ce vœu n’a pas encore trouvé sa concrétisation dans la loi. Cela signifie que le consommateur ne bénéficie pas encore du droit de révocation!
Cependant, en cas de doute sur l’existence d’un contrat (on a par exemple accepté de recevoir une offre, sans intention de s’engager), il faut réclamer la preuve de cet accord. C’est alors au démarcheur de l’apporter, au moyen de l’enregistrement de la conversation. S’il n’y parvient pas, il doit alors laisser tomber ses prétentions.
En matière de télécommunications, les opérateurs ont d’ailleurs l’obligation de fournir sur demande, dans les dix jours, l’enregistrement de l’entier de la conversation commerciale (et non pas seulement du «oui» en réponse à une question). Et, si l’accord n’est pas clairement exprimé, l’opérateur doit rétablir l’ancien contrat à ses frais.
Conseils pratiques
Voici comment limiter les désagréments.
- Lors d’un appel, éviter d’entrer en matière en affirmant d’emblée qu’on n’est pas intéressé et, si nécessaire, boucler le téléphone.
- Exiger de son interlocuteur qu’il nous supprime de sa liste d’adresses. Ou, encore mieux, faire cette demande par écrit à la société, dont on peut obtenir les coordonnées auprès de l’opérateur, sur la base du numéro s’affichant sur le téléphone.
- Faire mettre l’astérisque dans l’annuaire téléphonique, bien que sa véritable utilité soit réduite.
- Bloquer l’entrée des appels masqués (dont le numéro n’apparaît pas sur le clavier) en appuyant sur les touches * 99 # de son téléphone (pour désactiver ce service: # 99 #). Cela stoppera tous les appels anonymes, provenant souvent de démarcheurs. Mais, évidemment, cette fonction gênera ceux dont l’entourage recourt à des numéros masqués.
- Installer un répondeur et ne décrocher qu’après avoir pu identifier l’appelant, pour autant qu’on le souhaite.
Suzanne Pasquier