De novembre à la fin de mars, 60% de la population suisse manque de vitamine D. Cette carence hivernale est directement liée au raccourcissement des jours et à l’insuffisance du rayonnement solaire: notre peau ne parvient plus à fabriquer cette vitamine. Or, les conséquences ne sont pas anodines: cela peut entraîner des troubles de la croissance osseuse (rachitisme) chez les enfants et un ramollissement des os (ostéomalacie) chez l’adulte.
Contre le rachitisme et l’ostéomalacie
Il y a quelques décennies encore, on ingurgitait de l’huile de foie de morue pour compenser ce déficit. Si ce produit était déjà connu du temps des Vikings, son utilisation massive pour préserver la santé osseuse est nettement plus tardive. C’est au début du XIXe siècle seulement qu’on a remarqué son efficacité contre le rachitisme. Mais le principe actif qui en était responsable restait un mystère. Ce n’est qu’en 1922 qu’on a découvert et isolé cette fameuse vitamine. La consommation de l’huile de foie de morue s’est alors développée à travers le monde pour atteindre son apogée dans les années 1950.
Le hic, c’est que les aliments qui contiennent cette vitamine sont rares (poissons gras, produits laitiers, œufs, champignons). Et, pour couvrir nos besoins, il faudrait en consommer quotidiennement des quantités considérables: plus de 300 g de saumon d’élevage ou 10 œufs ou 480 g de morilles ou encore un bon kilo de beurre!
Le soleil avant tout
Le soleil est donc notre seul allié. Pour cela, notre peau doit être suffisamment exposée. Sous nos latitudes, c’est le cas d’avril à octobre. Durant cette période, 80% de la population reçoit suffisamment d’UV pour synthétiser cette vitamine, à condition d’exposer mains et visage au moins 20 minutes en été et 40 minutes au printemps et en automne. Les 20% qui restent regroupent les individus dont la capacité à synthétiser la vitamine D est diminuée (personnes âgées, en surpoids, à la peau noire), les femmes enceintes et allaitantes dont les besoins sont plus importants et ceux qui voient peu le soleil (malades, détenus, etc.).
L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) a néanmoins émis des recommandations en 2012: l’exposition au soleil n’est pas sans risque et ne constitue pas une source fiable en raison des variations saisonnières. Dès lors, il conseille aux personnes à risque (plus de 60 ans, enfants de moins de 3 ans, femme enceinte ou allaitante, etc.), de prendre des compléments alimentaires en vitamine D durant toute l’année. Pour ceux âgés de 3 à 60 ans, l’OFSP préconise de recourir à ces suppléments en hiver seulement.
Trop de vitamine A
Si l’huile de foie de morue permet de couvrir facilement nos besoins, elle présente cependant un inconvénient majeur: sa richesse en vitamine A, une substance essentielle pour la vision et le renouvellement des cellules. Mais son surdosage n’est pas sans danger. Il peut augmenter le risque de fractures et causer des malformations fœtales. Par conséquent, les femmes enceintes ne doivent pas consommer d’huile de foie de morue si elles prennent, en plus, d’autres compléments contenant de la vitamine A.
La prudence s’impose aussi pour les enfants (jusqu’à 12 ans) dont les besoins sont moindres. Car, selon les marques, une cuillère à café d’huile ou une seule gélule peut couvrir jusqu’à trois fois leurs besoins en vitamine A! Et cela sans tenir compte de l’apport par les aliments (charcuterie, foie, œufs, etc.)! A ce sujet, les informations et les mises en garde sont hélas plus que lacunaires, voire absentes sur les emballages.
Enfin, relevons que ce produit est fabriqué à partir du foie du poisson, organe qui filtre les toxines nocives pour l’animal. Or, plusieurs études ont démontré que notre fameuse huile était fréquemment contaminée par des métaux lourds et d’autres polluants! Pour éviter ces problèmes, mieux vaut donc recourir à des suppléments contenant uniquement de la vitamine D3, disponibles sous forme de gouttes, de comprimés ou de spray.
Doris Favre, diététicienne diplômée