Qu’ils se faufilent, légers et maniables, dans les embouteillages urbains ou défient les lacets d’une route de montagne, scooters et motos symbolisent l’alliance du pratique et de l’agréable. On ne s’étonnera donc pas de la cote grandissante de ces deux-roues motorisés, qui ont représenté quelque 13% des ventes suisses de véhicules à moteur en 2009, contre 8,5% en 1990. Une ombre vient pourtant ternir le tableau: leur impact écologique disproportionné.
Le constat n’est pas nouveau. Dans un rapport de 2004, l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) soulignait déjà la proportion croissante des hydrocarbures (HC) rejetés par cette catégorie de véhicules: «Actuellement supérieure à 10%, elle devrait atteindre près de 40% en 2020, alors que les motocycles ne fournissent guère plus de 3% des prestations kilométriques du trafic routier.»
L’introduction de la norme Euro 3, en 2007, n’a pas permis aux deux-roues de combler le fossé environnemental (voir tableau). Il est ainsi toléré qu’un scooter de 125 cm3, limité à deux passagers, rejette deux fois plus de monoxyde de carbone (CO) et huit fois plus d’hydrocarbures (HC) qu’une voiture à essence. La réglementation européenne, sur laquelle se calque la Suisse, pèche-t-elle par excès de laxisme? «Les prescriptions sur les émissions de gaz d’échappement pour les motocycles ne sont pas assez sévères, en particulier pour les petites cylindrées», confirme l’OFEV.
Consommation non indiquée
Bien que l’émission de gaz carbonique (CO2) ne soit pas encore réglementée au niveau européen, la branche automobile en fait l’un de ses principaux arguments de vente, au même titre que le confort et la sécurité. De leur côté, les constructeurs de motos peinent à s’extraire d’une culture sportive ou «easy rider» tout droit sortie des années 1970. Un signe qui ne trompe pas: aucun des douze plus grands vendeurs de deux-roues motorisés en Suisse – à l’exception de BMW – n’informe de la consommation de ses véhicules, dont découle directement la quantité de CO2 générée.
Motosuisse, l’Association des importateurs suisses des motos et scooters, botte en touche: «Tous les véhicules à deux-roues remplissent les normes légales imposées. En l’absence d’obligation, il ne fait pas de sens de publier des données relatives à la consommation, d’autant que les moyens à mettre en place pour récolter et publier ces données sont trop importants pour la taille de la branche.» Une branche dont le chiffre d’affaires pèse tout de même 870 millions de francs par année, en Suisse uniquement.
A l’Association transports et environnement (ATE), on ne partage pas l’avis du lobby: «L’ATE exige que les fabricants indiquent en Suisse la consommation de leurs machines, une mesure très facile à mettre en place. Nous sommes aussi favorables à ce que des normes de pollution plus sévères soient introduites pour les deux-roues motorisés.»
Mais l’UE n’en prend pas le chemin. Alors qu’elle projette de faire baisser les émissions moyennes de CO2 des voitures neuves à 130 g/km d’ici à 2015, aucune limitation du genre n’est prévue pour les motocycles. Une consolation tout de même: afin d’encourager les constructeurs à rattraper leur retard technologique, l’obligation d’utiliser l’Etiquette énergie devrait prochainement s’étendre aux deux-roues.
Frank-Olivier Baechler
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