La Suisse n’a rien du Sahara ou du Gobi, mais le niveau famélique des précipitations en ce début d’année soulève inévitablement la question de l’approvisionnement en eau. Avec une consommation estimée à 162 litres d’eau par personne et par jour*, les Suisses ne se privent pas d’ouvrir les vannes et les robinets sans parcimonie. Or, pour couvrir plus de 40% des besoins journaliers, l’eau potable est d’une pureté absolument superflue.
Le plus grand gaspillage, c’est la chasse d’eau des WC qui engloutit quotidiennement 29,6% de l’eau potable des ménages (48 l par personne). Viennent ensuite le lave-linge (10,5%) et l’arrosage du jardin (2,5%). Autant de postes qui se contenteraient volontiers de l’eau de pluie dont la qualité est suffisante, voire supérieure: sa douceur (absence de calcaire) permet notamment de réduire le dosage du produit de lessive et de limiter l’entartrage des tuyaux et du corps de chauffe.
Maousse, le réservoir
Économiser de l’eau et de l’argent en recueillant de son toit ce qui tombe du ciel, c’est bien. Mais, pour la mise en place d’un système qui ne se résume pas au tonneau destiné à abreuver les tulipes et les courgettes, la situation se corse. Une installation pensée pour alimenter les toilettes et la machine à laver nécessite en effet la pose d’un réservoir – généralement enterré –, d’une pompe électrique et d’un réseau permettant d’acheminer l’eau à destination.
Afin d’optimiser cet équipement, les spécialistes recommandent une cuve dont le volume permet d’assurer près d’un mois d’autonomie. «Cela afin de compenser les périodes où les précipitations sont faibles et d’éviter le plus possible de devoir basculer sur le réseau potable. Pour une famille de quatre personnes, nous conseillons un réservoir de 6500 litres», détaille Christian von Gunten, directeur de RVG Energies renouvelables.
Difficile à rentabiliser
L’investissement est aussi maousse que la contenance du réservoir. En ajoutant au matériel (6250 fr.) et à la pose (1500 fr.) les frais d’excavation, variables d’un terrain à l’autre, la facture grimpe facilement à 10 000 fr. (1). Ce montant peut être revu à la baisse – économie sur les frais d’excavation notamment – si ces travaux sont prévus à la construction de la maison.
Quoi qu’il en soit, une telle somme n’est pas rentabilisée du jour au lendemain, comme le démontre notre comparatif (voir tableau).
Notre scénario se base sur une famille de quatre personnes dont la consommation annuelle s’élève à 237 m3 d’eau (2) (acheté au prix de 1.60 fr. m3 (3)). La récupération d’eau de pluie permet de réduire la note de 379.20 fr. à 217.60 fr. (4), soit une économie de 161.60 fr. par année (5). Dans ce cas de figure, l’installation sera rentabilisée après 62 ans d’utilisation, sans tenir compte d’éventuels frais d’entretien ou d’usure.
Une logique durable
Selon Christian von Gunten, il serait faux de réduire la démarche à une telle estimation chiffrée. Il rappelle que le tarif du mètre cube d’eau potable est parfois nettement plus élevé que 1.60 fr., admis comme prix moyen en Suisse, et que le retour sur investissement peut, par conséquent, être plus rapide. Mais, ce qui coule de source, c’est que l’adoption d’un système de récupération d’eau de pluie tient plus de la conscience écologique que du véritable intérêt économique.
*Chiffres issus d’un rapport publié en 2003 par l’Office fédéral de l’environnement, des forêts et du paysage.
Pour télécharger le tableau comparatif, se référer à l'encadré au-dessous de la photo.