Choisir un modèle de soin alternatif pour l’assurance de base permet de réaliser des économies intéressantes sur les primes, à condition d’accepter certaines contraintes. André Helfer connaissait la règle du jeu lorsqu’il décide de rejoindre l’assureur Atupri et son modèle CareMed en janvier 2017: s’engager à passer d’abord chez son généraliste avant d’aller voir un spécialiste. A la clé, 42 fr. par mois d’économie par rapport au modèle standard. Pensionnaire d’un home pour personnes âgées depuis quelques années, notre lecteur de La Neuveville (BE) est donc surpris par le courrier lapidaire qu’il reçoit, en juillet dernier. Sa caisse maladie l’informe que son assurance, annulée, est remplacée automatiquement par la variante standard.
Clause injuste
Atupri justifie sa décision par l’article 6.2 des conditions générales de CareMed, qui indique que l’exclusion est possible en cas de séjour dans un EMS ou un home médicalisé. Dans cette situation, le médecin de famille ne peut plus jouer son rôle de coordinateur des traitements, car l’assuré dépend des décisions prises par le médecin en charge du home dans lequel il réside, explique la caisse. André Helfer et son fils sont surpris, car CareMed n’est pas une complémentaire, mais une variante de la couverture maladie de base. Dès lors, les caisses ne sont-elles pas censées accepter tout le monde? Ni une ni deux, ils sollicitent l’opinion du médiateur de l’assurance maladie.
Sa réponse leur parvient en septembre dernier. Pour lui, l’exclusion d’André du modèle de soin choisi est injustifiée et viole l’obligation de garantir l’égalité de traitement des assurés. En effet, le home dans lequel il réside laisse expressément la possibilité à ses pensionnaires de conserver leur médecin de famille. Or, notre lecteur continue justement de se rendre chez le généraliste qui le suit depuis de longues années. Par pur hasard, celui-ci est aussi le médecin référent du home, mais l’Office de médiation estime que cela ne change pas la donne. «S’ils ont la possibilité de recourir aux services du médecin de leur choix, on ne voit pas pourquoi les résidants devraient être empêchés de profiter des avantages d’un modèle alternatif», détaille-t-il dans sa réponse, en ajoutant avoir déjà rendu Atupri attentive à ce problème par le passé.
Sélection des risques
L’Office de médiation s’inquiète de cette pratique depuis 2011 déjà. Dans son rapport annuel, il l’assimile à une sélection des risques. En d’autres termes, à une stratégie visant à se débarrasser des assurés les plus âgés, susceptibles d’engendrer des coûts élevés. Depuis, Atupri n’a pas changé sa politique pour autant et campe sur ses positions dans le cas de notre lecteur.
«Notre office peut proposer des solutions, mais ne peut pas contraindre les assureurs. Si la proposition de médiation est refusée, il reste à l’assuré la voie du droit», précise son spécialiste, Charles Lorétan (lire encadré). L’instance espère d’ailleurs que l’un d’eux finira par saisir la justice pour qu’un juge puisse trancher la question.
André Helfer, de son côté, a préféré changer de «crèmerie». En fin d’année dernière, il a opté pour une assurance qui ne lui interdit pas de profiter du modèle du médecin de famille – c’est heureusement le cas de la majorité d’entre elles. Cette solution lui permet même une double économie, puisque, en 2018, Atupri n’est pas la caisse la moins chère dans le canton de Berne.
Vincent Cherpillod
En détail: possibilités de recours
Selon l’ombudsman, les voies de droit en matière d’assurance de base sont assez simples et l’assistance d’un avocat n’est pas indispensable. La procédure est la suivante.
1. L’assuré doit demander à sa caisse maladie une décision formelle au sens de l’art. 49 al. 1 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances (LPGA). A partir du moment où celle-ci rend sa décision, il peut faire opposition dans les trente jours. L’opposition doit être envoyée par courrier recommandé à la caisse maladie. L’assureur doit alors rendre une décision sur l’opposition.
2. L’assuré peut ensuite faire recours auprès du Tribunal cantonal des assurances sociales, de nouveau dans les trente jours. Il doit alors fournir un exposé succinct des faits et des motifs invoqués ainsi que des conclusions. L’éventuel avis rendu par l’Office de médiation peut y être joint. L’instance rend alors une décision, qui peut encore être contestée devant le Tribunal fédéral des assurances à Lucerne.
La procédure d’opposition et le recours devant le Tribunal cantonal des assurances sociales sont gratuits; seuls les honoraires d’un avocat sont à la charge de l’assuré s’il est représenté par un homme de loi. En revanche, le recours devant le Tribunal fédéral nécessite une avance de frais, qui se monte en général à 500 fr.