Depuis l’instauration de la taxe poubelle dans la plupart des cantons, le prix des sacs a pris l’ascenseur. Logique, car il couvre désormais une bonne partie du coût d’élimination des déchets. A 20 fr. le rouleau, on fait donc des économies en triant mieux… mais aussi en remplissant son sac au maximum, puisque la majorité des communes taxe leur volume plutôt que leur poids. Dès lors, ceux-ci sont-ils assez solides et offrent-ils réellement la contenance indiquée?
En collaboration avec l’émission On en parle (RTS-La Première), nous en avons envoyé vingt-trois – seize taxés et sept «noirs» – au Laboratoire national de métrologie et d’essais de Trappes (F). Après mesure du volume, nos victimes ont été lestées de 6 kg et lâchées d’une hauteur de 1 mètre 20, lâchées à nouveau pour vérifier la résistance des liens de fermeture et, enfin, remplies de 3 litres d’eau pour tester leur étanchéité.
Le fait est suffisamment rare pour être signalé, alors ne boudons pas notre plaisir: la totalité des sacs a passé l’épreuve avec brio! Aucun trou n’a été relevé à la suite du test de chute, aucune fuite d’eau n’a été détectée, aucun lien ne s’est rompu. Tous ont été déclarés conformes aux exigences de solidité de la norme EN 13592, qui sert de référence en Europe.
Petits mais conformes
La mesure du volume, en revanche, se solde par un résultat surprenant: six exemplaires sur vingt-trois (26%) n’atteignent pas le chiffre annoncé, le plus petit de près d’un demi-litre. Anormal? «Non, ces sacs sont conformes aux exigences de qualité du label suisse «OKS» (Iire plus loin), conteste Guy Flüeli, chef des certifications du Laboratoire Ugra à St-Gall. Dans une production industrielle, il est impossible de parvenir à des dimensions identiques pour tous les sacs. Dès lors, une tolérance de 1,5% (largeur) et 2% (longueur) est prévue.» Etonnamment, celle-ci n’est apparue que récemment dans le document de référence sur la qualité et l’exécution des sacs à ordures, puisqu’elle figure dans la version en vigueur depuis le
1er janvier 2016, mais pas dans la précédente de 2004.
Les fabricants s’abritent, eux aussi, derrière cette tolérance. Petroplast Vinora, leader sur le marché romand, ajoute que le volume est contrôlé sur une moyenne de 10 sacs, alors que nous n’en avons testé qu’un; il est donc parfaitement possible que les autres exemplaires du rouleau soient plus grands. Mais, en prenant davantage de marge, les fabricants ne pourraient-ils pas garantir que toute leur production affiche une contenance égale ou supérieure au chiffre promis? Quoi qu’il en soit, le volume manquant des sacs trop petits ne dépassant pas 2%, nous leur avons tout de même attribué un résultat «satisfaisant» (couleur orange dans le tableau).
Le label a disparu
Chose étonnante, le label «OKS» qui figure sur les sacs noirs a disparu de la plupart des modèles taxés. Créé dans les années 90 par l’Union des villes suisses, il garantit non seulement que diverses exigences de qualité sont remplies, mais aussi qu’un contrôle périodique est réalisé par un laboratoire indépendant, l’Ugra. Doit-on en déduire que les taxés sont de moins bonne qualité que les noirs? Non, selon les responsables régionaux de la taxe au sac que nous avons approchés: le contrat passé avec les fabricants précise qu’ils doivent respecter le label. Autrement dit, sur le papier, ils sont tout aussi solides. Mais il n’en reste pas moins que, au contraire de leurs homologues noirs, ils ne sont pas automatiquement soumis aux tests indépendants de l’Ugra – à l’exception des sacs SIDP de Porrentruy, contrôlés une fois par an.
Pour l’heure, notre test montre que les fabricants jouent le jeu. «Mais il faut se montrer vigilant, note Guy Flüeli. Il est déjà arrivé à notre laboratoire de détecter des produits non conformes peu avant leur mise sur le marché.»
Qui paie le plus?
Notre test a permis de faire un autre constat: d’une région à l’autre, le prix d’un sac varie considérablement. Ainsi, ceux de Bulle (FR) coûtent plus du double de ceux de Moutier (BE). «Normal, car ils reflètent le coût de la filière complète d’élimination des déchets dans la zone couverte, explique le président du Syndicat intercommunal du district de Porrentruy (SIDP). Chez nous, il faut, par exemple, prendre en compte le coût de l’acheminement des déchets vers la centrale d’incinération de La Chaux-de-Fonds.»
En outre, il faut se rappeler qu’une autre taxe s’ajoute à celle des sacs: la taxe annuelle d’élimination des déchets, qui finance notamment la gestion des déchetteries et des écopoints. «Nous avons préféré une taxe moins haute et un sac plus cher pour respecter le principe du pollueur payeur», nous a ainsi répondu la commune de Bulle. Pour avoir une idée de ce qu’un ménage paie chaque année pour éliminer ses déchets, il faut donc également en tenir compte (lire encadré).
Vincent Cherpillod
Lire le bonus web: Le coût des déchets pour un ménage
Tout compte fait
Le coût de mes déchets
Quelle somme débourse-t-on chaque année pour éliminer ses déchets? Pour le savoir, nous avons imaginé deux scénarios. Dans le premier, un ménage de deux personnes utilise un sac taxé de 17 litres par semaine. Dans le second, quatre personnes, dont un enfant de 2 ans, remplissent un sac de 35 litres par semaine, plus un autre pour les couches du bébé.
Nous avons additionné le coût des sacs utilisés avec le prix de la taxe annuelle. Cette dernière est calculée soit par ménage, soit par personne adulte, en fonction de la commune. Enfin, nous avons retranché au total le prix des sacs offerts aux enfants de moins de 3 ans*.
Attention: la première place d’Yverdon s’explique en grande partie par le fait que la commune n’applique, à ce jour, aucune taxe annuelle d’élimination des déchets, ces coûts étant couverts par les impôts communaux. Notons encore que Porrentruy et Yverdon n’offrent pas de sacs taxés aux enfants en bas âge, mais le compensent par des allocations communales de naissance.