Les autorités sanitaires américaines ont suscité la polémique, il y a quelques mois, en autorisant la mise sur le marché d’un saumon transgénique! Baptisé «Frankenfish» ou «saumonstre» par ses détracteurs, ce poisson est, en fait, un saumon de l’Atlantique auquel des gènes de saumon chinook du Pacifique ont été injectés, afin qu’il grossisse deux fois plus vite.
Examen rigoureux
Les consommateurs suisses peuvent se rassurer. La vente de produits contenant des OGM n’est certes pas interdite dans notre pays, mais les autorisations ne sont délivrées par l’Office fédéral de la sécurité alimentaire (OSAV) «que si l’on peut, en l’état actuel des connaissances scientifiques, exclure tout risque pour la santé humaine et l’environnement». En tout, «quatre lignées de plantes sont ainsi autorisées, trois maïs et un soja», précise Stefan Kunfermann, porte-parole de l’OSAV. Deux ont été créées par la société suisse Syngenta et les deux autres par l’américain Monsanto.
La Suisse ne permet pas, pour autant, la culture de ces plantes, puisqu’un moratoire court jusqu’à fin 2017. Mais elle accepte leur présence dans les denrées alimentaires. Quelques composants dérivés de micro-organismes génétiquement modifiés sont, de surcroît, admis: deux vitamines, trois enzymes et une protéine structurante de la glace (ISP). Cette dernière, par exemple, est obtenue à partir d’une souche transformée de levure et peut être utilisée dans la fabrication de glace alimentaire. Interrogé par Bon à Savoir, Unilever affirme pourtant «ne fabriquer aucun produit contenant cette composante en Suisse, malgré l’autorisation obtenue en 2012».
produits de niche
Ainsi, les organismes génétiquement modifiés semblent briller par leur absence dans nos assiettes. Les contrôles menés par les autorités cantonales d’exécution le confirment. En 2014, seuls 26 (5,1%) des 506 échantillons examinés en contenaient. Et cela, alors même que les labos ont ciblé des groupes de produits les plus susceptibles d’en contenir, principalement des denrées à base de soja, de maïs et de riz.
Dans treize cas, les OGM décelés étaient conformes et présents à moins de 0,9%, donc sans infraction à l’obligation d’étiquetage (lire encadré). Dans trois articles, ils n’étaient pas identifiables, et dix échantillons, soit 2% du total, contenaient des OGM non admis. Il s’agissait notamment d’un succédané de viande d’origine tchèque, de biscuits italiens, de barres énergétiques et de protéines en poudre pour sportifs ainsi que de nouilles de riz en provenance de Chine.
Cette situation plutôt réjouissante est favorisée notamment par le fait que les deux grands distributeurs, Migros et Coop, ont très largement renoncé à vendre des organismes génétiquement modifiés. «Coop ne vend pas d’aliments contenant des matières premières qui doivent être étiquetées comme OMG», précise Ramón Gander, son porte-parole. Migros note toutefois que, avec «les produits d’origine animale importés qui n’appartiennent pas à un label, il est impossible d’affirmer que les animaux n’ont pas été nourris avec des aliments contenant des OGM».
Voilà qui ne plaide guère en faveur de la viande étrangère… En Suisse, les différents labels, comme IP-Suisse ou Naturafarm, exigent l’affouragement avec des aliments non transgéniques. Mais, contrairement à la France et à l’Allemagne, notre législation ne permet pas d’indiquer, sur l’emballage, que l’animal a été nourri sans OGM. Le Département fédéral de l’intérieur a renoncé, fin 2014, à modifier la loi dans ce sens.
Sébastien Sautebin
Ce que dit la loi
0,9% autorisé sans mention
En Suisse, les denrées alimentaires et les additifs issus des OGM sont soumis à une obligation d’étiquetage stricte. La mention correspondante doit se trouver sur l’emballage. Comme on ne trouve pratiquement pas d’aliment génétiquement modifié dans le commerce, cette indication est extrêmement rare. Elle doit, par exemple, être formulée comme suit: «semoule de maïs (génétiquement modifié)» ou «huile végétale hydrogénée produite à partir de soja génétiquement modifié».
Il n’est toutefois pas obligatoire de mentionner les traces involontaires d’OGM autorisés si leur taux ne dépasse pas 0,9% de la masse. De surcroît, notre pays tolère des résidus d’OGM non autorisés à hauteur de 0,5%. Et dans l’Union européenne? Les règles sont similaires: les denrées renfermant des OGM doivent être étiquetées en tant que telles, avec un seuil de tolérance à 0,9%.